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Apr 2022 Press Conference Volodymyr Zelenskyy President Ukraine Russian Ukrainian — Photo

 

 

 

 Face à une victoire qui semble impossible, la stratégie du président ukrainien est de plus en plus contestée.


ZELENSKY L’HEURE DU DOUTE


 Courrier international — no 1727 du 7 au 13 décembre 2023 CLAIRE CARRARD



Zelensky, l’heure du doute C’est l’autre guerre. Celle dont la presse étrangère, tout entière focalisée sur le Moyen-Orient, parle forcément moins aujourd’hui. Elle est pourtant loin d’être finie, et c’est pour cela que nous avons choisi d’y consacrer notre une cette semaine.


En février, cela fera deux ans que la Russie de Vladimir Poutine a envahi l’Ukraine, violant toutes les règles du droit international. Après avoir fait mieux que résister la première année, les Ukrainiens marquent le pas, à l’image de leur président, Volodymyr Zelensky, dont la stratégie est aujourd’hui contestée : en interne, notamment par le très populaire chef d’état-major des forces armées, Valeriy Zaloujny  mais aussi par une partie de sa population, qui semble se lasser d’une guerre qui n’en finit plus et semble aujourd’hui impossible à gagner. Une lassitude qui a aussi gagné les alliés occidentaux de Kiev.


“Les Ukrainiens ont clairement gagné la bataille en 2022. La guerre éclair des Russes est un échec”, explique Balazs Jarabik, politologue slovaque, à l’hebdomadaire hongrois Heti Vilaggazdasag. Mais, depuis, le vent a tourné. “L’année 2023 penche plutôt pour les Russes. Le dénouement du conflit dépend en premier lieu de l’ampleur de l’aide occidentale. L’année 2024 sera décisive”, avance cet ancien diplomate à Kiev, qui insiste sur l’importance de la crise politique intérieure ukrainienne dans la suite du conflit.


C’est cette fragilité que nous avons voulu décrypter dans ce dossier. En donnant la parole avant tout aux Ukrainiens, pour tenter de comprendre leur état d’esprit au moment où le monde paraît détourner le regard et où eux-mêmes se divisent. “Alors que le soutien de l’Occident s’étiole, Kiev doit faire preuve de franchise quant à l’évolution de la guerre et ce qu’il faudra pour en inverser la tendance”, écrit ainsi Svitlana Morenets dans l’hebdomadaire britannique The Spectator. Pour cette journaliste ukrainienne,le président Zelensky, qui s’obstine “à ne brosser qu’un tableau positif de la situation”, doit la vérité à ses compatriotes, et cette vérité n’est pas forcément facile à entendre. La grande contre offensive du printemps est un échec. “Au bout de cinq mois de combats sanglants, l’Ukraine n’a avancé que d’une quinzaine de kilomètres.”


Cela, le président ukrainien se refuse à l’admettre, alors que Valeriy Zaloujny reconnaissait lui-même récemment dans une interview à The Economist que le combat était “dans une impasse”. Jusqu’où vont les crispations entre les deux hommes ? La presse ukrainienne reste prudente sur ce point.

“La confiance envers Zaloujny reste stable, celle envers Zelensky diminue chaque jour” dans les sondages, concède pourtant l’analyste et éditorialiste Vitaliy Portnykov sur le site de la chaîne d’information Espreso.


Plus grave, peut-être, le fossé se creuse entre les civils et les soldats sur le front, estime Mykhaïlo Doubynianskiy dans le quotidien Oukraïnska Pravda. “Bien que les combats au front soient comparables aux batailles des grands conflits du xxe siècle, la vie à l’arrière est très éloignée de l’imaginaire lié à la guerre totale”, écrit cet historien ukrainien, qui s’inquiète de la possible rupture du contrat social tacite entre les autorités et la population si l’effort de guerre devait s’étendre. “Les conséquences d’un changement aussi radical sont difficiles à prévoir”,reconnaît-il.


Aujourd’hui, les autorités ukrainiennes ont deux solutions, avance encore Svitlana Morenets dans The Spectator :“Soit elles continuent, avec leurs discours enthousiastes, à tenter de convaincre tout le monde que les combats se déroulent comme prévu, soit elles entament un dialogue honnête sur ce qui est vraiment en train de se passer.”Un devoir de transparence que les Occidentaux doivent aussi avoir vis-à-vis de Kiev, estime la journaliste.


Dans la Süddeutsche Zeitung, Stefan Kornelius abonde : les soutiens de l’Ukraine ne peuvent se permettre de céder à la lassitude, martèle-t-il. “Il y a longtemps déjà que cette guerre est aussi celle des alliés. Si l’Ukraine perd, elle ne sera pas la seule. Ce qui est en jeu, c’est la crédibilité de tous ceux qui, le 24 février 2022, ont juré de défendre l’ordre et le droit européens.”

 



07/12/2023
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