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 Gauche et terrorisme : connaître le Hamas pour le condamner

  • par Susie Linfield*, pour Quillette (traduit par Peggy Sastre) - décembre 2023 Republié par JALR
3/5. Quand la gauche s’allie avec les islamistes, cela se termine souvent très mal… Avec le Hamas, l’histoire se répète non pas comme une farce, mais comme une tragédie.
 
En 1979, le réveil fut rude pour les gauchistes qui avaient soutenu la révolution iranienne. Une fois arrivés au pouvoir, les mollahs n'allaient pas tarder à les exécuter, à l'instar des laïcs, syndicalistes, intellectuels, féministes et tous ceux susceptibles d'entrer dans la catégorie extrêmement large des «ennemis de la révolution». Il y a une leçon à en tirer : il incombe à la gauche de connaître les groupes et les causes qu'elle soutient. Et de rompre au plus vite avec les programmes et les régimes fondés sur la violence et l'oppression. De même, ceux qui s'imaginent aujourd'hui que les massacres du Hamas pourraient promouvoir la «libération», la «justice» et la «liberté» pour les Palestiniens, comme ils l'écrivent sur leurs banderoles, ne sont pas au bout de leurs surprises.
 
Mais contrairement à l'Iran de 1979, le Hamas (acronyme de «Mouvement de résistance islamique») ne fait aucun mystère du type d'État qu'il entend créer : il suffit de regarder ce qu'il a déjà fait. Cette fois, personne ne peut plaider l'ignorance. À Gaza, point de libération, de justice ou de liberté à l'horizon. Il n'y a pas non plus de partis politiques d'opposition, d'élections, de liberté de religion, de la presse ou de manifestation. Les opposants sont arrêtés, torturés et parfois exécutés. (Le petit nom de Yahya Sinwar, chef de la branche armée du Hamas ? «Le boucher de Khan Younès», qu'il doit à sa brutalité vis-à-vis de ses compatriotes palestiniens).
 
L'avortement et l'homosexualité y sont aussi interdits (qu'ont dans le ciboulot les manifestants qui se réclament «Queers pour la Palestine» ?). Et gare à vous si vous évoquez les droits des transgenres ! Par contre, le droit des maris à frapper leurs femmes est inscrit dans la loi, et les crimes prétendument «d'honneur» restent impunis. Le degré de corruption de la clique au pouvoir est de notoriété publique et, bien que les habitants de Gaza soient très pauvres, le Hamas est une organisation extrêmement riche.
 
Tuer les Juifs de Palestine, objectif premier du Hamas
 
Tous ceux qui, aujourd'hui, sont fiers de se proclamer «aux côtés de la Palestine», tout en louant le Hamas pour avoir «rajeuni le sens des possibilités politiques» et hâté «l'heure de la libération», que défendent-ils exactement ? Et de quel type de libération s'agit-il ? Exception faite des talibans, on doit au Hamas le pseudo-État le moins progressiste de la planète. Il semble que la leçon de l'Iran n'ait pas été retenue ; l'histoire se répète non pas comme une farce, mais comme une tragédie.
 
On a beaucoup écrit sur l'occupation ; il faut encore en rajouter. Je ne minimise en aucun cas la violence meurtrière de plus en plus effrontée de certains colons, ni la conduite des zélotes messianiques fous de l'actuel gouvernement israélien. Une condition préalable absolue à tout règlement politique entre Israël et les Palestiniens sera la fin de la coalition Netanyahou et de son idéologie, ainsi que la défaite du Hamas. Mais le Hamas n'est pas opposé à l'occupation, et il a clairement exprimé cette position. Il a répondu à chaque avancée vers la souveraineté palestinienne, y compris le retrait inconditionnel d'Israël de Gaza en 2005 et la signature des accords d'Oslo, par une violence accrue, notamment par des attaques à la roquette et des attentats suicides – David Grossman déclarait le mois dernier au New Yorker que si le Hamas avait fait de Gaza une enclave pacifique et prospère, comme l'espéraient de nombreux Palestiniens et Israéliens, cela aurait incité au retrait des colonies de Cisjordanie.
 
Ce que le Hamas qualifie d'«usurpation» est l'État d'Israël en tant que tel, qu'importent ses frontières. Tout accord politique, y compris la création de deux États ou même d'un État binational, est un blasphème. «Les prétendues solutions pacifiques et les conférences internationales» sont «en contradiction avec les principes du Mouvement de la résistance islamique» : c'est écrit noir sur blanc dans sa charte, et c'est prouvé par toutes ses actions.
 
Les événements du 7 octobre ont clarifié pour les Israéliens aux quatre coins du spectre politique – et devraient le clarifier pour tout le monde – ce que signifie une Palestine judenrein, comme le promettent autant la charte originelle du Hamas que ses dirigeants actuels. En effet, le seul moyen de «libérer la Palestine du fleuve à la mer», comme le scandent des milliers de manifestants dans le monde entier, sera de tuer (ou, au mieux, d'expulser) tous les Juifs qui y vivent, soit précisément ce que le Hamas pose ouvertement comme son objectif premier. (Début novembre, la députée américaine Rashida Tlaib publiait une vidéo dans laquelle elle faisait sienne cette revendication, qu'elle a ensuite grotesquement tenté de faire passer pour «un appel à la coexistence pacifique». Peut-être imagine-t-elle que les millions de Juifs expulsés du Yémen, du Maroc, d'Irak, de Syrie et d'un tas d'autres pays arabes se verront offrir un «droit au retour» ?)
 
Le Hamas statue que chaque musulman, femme et «esclave» y compris, a le devoir de se joindre à la lutte eschatologique pour nettoyer la Palestine des «Juifs», qu'il caractérise comme la force la plus puissante du monde et le plus grand ennemi de l'humanité. Le 7 octobre n'aura été que la mise en pratique de ce principe.
 
Entre le Hamas et Israël, un cessez-le-feu mutuel impossible
 
En Occident, la détermination de tant de gens de gauche à ignorer ce programme ou à refuser d'y croire – malgré la constante franchise du Hamas sur ses objectifs et ses moyens – est un signe d'orientalisme intellectuel : les Palestiniens ne sont considérés que comme des victimes impuissantes et réactives, pas comme des personnes génératrices d'idées et d'actions pour lesquelles elles peuvent être tenues responsables. Sauf qu'évidemment, les Palestiniens sont capables de créer des visions du monde et des programmes politiques, et le Hamas n'a eu de cesse d'expliciter en long et en large ses projets d'avenir.
 
Un mois à peine après le 7 octobre, un porte-parole du Hamas, Ghazi Hamad, affirmait que son organisation prévoyait de nombreuses autres répliques «jusqu'à ce qu'Israël soit anéanti». Une semaine plus tard, un autre porte-parole du Hamas, Taher al-Nounou, déclarait ceci au New York Times : «J'espère que l'état de guerre avec Israël deviendra permanent sur toutes les frontières.» Les appels à un «cessez-le-feu mutuel», pour reprendre une formule également chère à Mme Tlaib, n'ont donc aucun sens.
 
De fait, un cessez-le-feu (contrairement à une trêve humanitaire) serait entièrement unilatéral de la part d'Israël. D'où cette question : pourquoi Israël déposerait-il les armes face à un ennemi qui désire ouvertement son élimination et qui détient encore plus de 130 otages ? Que se passerait-il dès cet arrêt unilatéral des hostilités ? (Dans le mois qui a suivi le 7 octobre, le Hamas a tiré près de 10.000 roquettes sur Israël, y compris sur Tel-Aviv ; dans le Nord, c'est le Hezbollah qui se charge d'attaquer).
 
Apparemment, le Hamas devrait avoir le droit de conserver ses bombes et ses usines d'armement, ses fusils d'assaut, ses drones, ses grenades, ses missiles, ses roquettes et ses dizaines de milliers de combattants, tout en planifiant de futurs massacres. On ne sait pas trop comment cela pourrait conduire à quelque chose ressemblant à de la paix, comme l'affirment ses partisans, et non pas à une guerre perpétuelle, comme le promet le Hamas. L'autre possibilité, cela va sans dire, est que beaucoup croient qu'un infini de mort et de destruction est justement ce que les Israéliens méritent.�
 
 
* Susie Linfield enseigne le journalisme à l'université de New York. On lui doit plusieurs livres sur la violence politique et l'histoire des rapports entre sionisme et pensée de gauche.
  • Illustration : Des combattants du groupe terroriste Hamas. AP Photo / Adel Hana
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21/12/2023
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