640-Partage des pouvoirs./ Le parti unique/ La carpe et les lapins 51 posts

La carpinette et les lapins


...Ces gueules cassées de la dernière présidentielle, ces éclopés orphelins de leur leader ne s'étaient pas pour rien rassemblés boulevard de l'Hôpital. On comprend mieux pourquoi ils répétaient les uns après les autres à la tribune à quel point ils se « sentaient bien » d'être ici, comme s'ils étaient dans une clinique de remise en forme en réunion de dynamique de groupe, genre les alcooliques anonymes ravis d'entendre l'un d'entre eux lâcher publiquement ce qu'ils ont tous sur le cœur. Ils n'ont pas pensé les mêmes choses, ils se sont beaucoup combattus mais, réunis par l'habileté des deux grands manœuvriers, Jean-Christophe Cambadélis et Claude Bartolone, ces strauss-kahniens et fabuisiens revivaient.

Plus de ouistes, plus de nonistes, et même plus de sociaux-démocrates molassons d'un côté et plus de radicaux de gauche caricaturaux de l'autre, la carpe et le lapin avaient le sourire épanoui de Martine Aubry cognant contre l'ex-madone des sondages.La carpinette et les lapinous s'étaient trouvés!

Qui va garder les Ch'tis?
On voulait croire à une nouvelle synthèse de gauche entre les fondamentalistes du socialisme et les innovateurs modernistes, une dynamique transcendantale qui serait - momentanément ! - incarnée par Aubry. Comme si Ségolène Royal n'était qu'une « idiote utile », l'acteur démolisseur au service des reconstructeurs, une intérimaire enfin présentable du spectacle qui ferait le ménage pour les grands leaders, momentanément empêchés…

Il faut se méfier des « intéri-maires » et tout particulièrement de cette maire de Lille qui ne se pose plus la question de savoir « qui va garder les Ch'tis », et revendique pour elle la fierté d'un héritage du passé qu'il ne serait plus question de discuter. Aubry n'est pas un homme politique comme une autre. La droite la déteste tellement, la hait même, qu'elle peut en faire une candidate d'élection. A force de la stigmatiser comme responsable de tous nos maux, les sarkozystes la font exister. Surtout qu'elle n'a pas laissé que des mauvais souvenirs avec la couverture maladie universelle par exemple… Ensuite, il faut se rappeler que les mortifications conduisent certains, et certaines, à l'humilité qui est un renoncement à l'orgueil, et d'autres pour qui l'humiliation amène à un renforcement de l'orgueil.

Nicolas Domenach http://www.marianne2.fr/Martine-a-la-place_


Les risques pour l'opposition de l'actuel partage des pouvoirs

Il ne se passe pas de jour sans que la blogosphère et la presse n'évoquent le prochain congrès du parti socialiste.La déception des Français,le mot est faible, après un an de pouvoir du président Sarkozy,est à la mesure des espoirs qu'il avait soulevés.


L'absence momentanée d'une opposition forte,cohérente,
dotée d'un leader incontesté et d'une stratégie claire focalise l'intérêt sur le parti dominant de la gauche au moment où celui de la majorité,l'UMP, se lézarde.La victoire du Parti socialiste aux élections municipales et cantonales,après celle des régionales voilà quatre ans,a fait des socialistes  les détenteurs très majoritaires du pouvoir local.La victoire de M.Sarkozy à la présidentielle et de son parti aux législatives de l'an passé,complétant la majorité conservatrice du Sénat et du gouvernement, fait de la droite la détentrice du pouvoir central.

actualité,dessin de Delize yahoo! cartoons

Pouvoir central et pouvoir local antagonistes se voient comme des gestionnaires interchangeables au besoin.Leur stratégie,leurs propositions confrontées aux lois du marché,
de la mondialisation,leurs méthodes,la formation et l'origine de leurs élites les poussent vers des positions encore différentes mais de plus en plus nuancées et de moins en moins antagonistes.La gestion désidéologisée l'emporte sur les idées.


Les plus anciens se souviennent du socialisme municipal de la Sfio après la guerre.Jusqu'à Epinay,les barons clientélistes du Nord des Bouches du Rhône,de l'Aude,du Pas de Calais les grands Maires (faut-il rappeler les noms?)dictaient leur loi au parti,pourvoyaient les emplois,régnaient sur les fédérations et attribuaient les investitures.C'est contre ce système qui avait dissous le socialisme municipal dans l'opportunisme et la politique du chien crevé au fil de l'eau que s'est constitué le parti d'Epinay,je l'ai déjà écrit ici.


La reconstitution de ces puissants pouvoirs locaux décentralisés,dotés de pouvoirs étendus,de gros effectifs mais mal financés et donc relativement dépendants,n'est pas sans danger pour les socialistes et pour la gauche.Face au gouvernement qui fixe les dotations,elle n'a d'autres recours que la fiscalité devenue injuste et insupportable.D'autre part,la gauche, se voit abandonnée lors des grands rendez vous nationaux par toute une partie de son électorat qui ne se reconnait plus dans la gestion technicienne des grands problèmes.Dans les années 70 et 80 les socialistes partaient du parti et des idées sociales pour gagner les villes et les circonscriptions.Aujourd'hui on part des villes et des régions conquises,des fiefs pour gagner les batailles nationales et la présidentielle en particulier.Ce fut la cas pour Ségolène Royal qui mit en avant ses succès Picto-charentais pour tenter d'emporter l'Elysée.Le risque n'est pas nul de rater la cible.


Comme du temps de la sfio,aujourd'hui encore les élus pèsent très fort sur le PS et la tentation "des alliances électorales à géométrie variable" que souligne Eric Dupin dans son blog sont désormais présentes "comme elles le furent à l'époque de Guy Mollet".Par une étrange analogie le pouvoir local et le pouvoir central reconstitueraient-ils  la lutte séculaire entre les barons régionaux et "le roi" qui imposa contre eux l'unité du pays ?

                                                                                         Marc Baldy

Je publie ici un extrait d'un excellent papier que j'aurais aimé écrire sur l'étrange convergence des idées de droite et de gauche. Marc Baldy



La France s'oriente vers une gouvernance exercée par un parti unique. bernard dugué

Un peu à la manière des Etats-Unis, avec ce parti unique aux deux ailes, démocrate et républicaine, ainsi désigné par l'écrivain Gore Vidal. En France, ne peut-on penser également à l'hypothèse d'un parti unique en voie de constitution, un parti doté de deux ailes, l'une socialiste démocrate et l'autre républicaine de droite ?

Il semble qu'on assiste à une convergence en termes de positionnement politique avec un effondrement de l'opposition traditionnelle gauche-droite. Une opposition qui avait une légitimité, un ressort et un ancrage assez clairs. Une opposition reflétant un antagonisme de classe, naguère incarnée par un parti communiste puissant, dont le déclin fera la force du Parti socialiste qui récupérera un moment la base ouvrière. Qui n'a pas entendu parler de la puissante fédération du Nord, région industrielle et son emblématique figure d'époque, Pierre Mauroy, premier locataire de gauche à Matignon. Mais, peu à peu, la désindustrialisation aidant, le progrès galopant, le tertiaire croissant, la finance en puissance, et l'impuissance face au chômage, tous ces ingrédients ont contribué à redessiner la carte politique française. Le socialisme prend ses couleurs plus libérales ....


Etat des lieux en 2007. Un président Sarkozy maniant les valeurs du travail, mais assez moderniste, surtout pour les réformes que les Français semblent accepter tout en étant mécontents, mais c'est la faute sans doute aux trous d'air économiques, alimentation, pétrole. Sarkozy a pris avec lui des ministres d'ouverture et certains se disent sarkozystes de gauche. Alors que le PS voit quelques-uns de ses chefs pencher également pour les réformes et le modernisme. On dirait une convergence sur l'essentiel. Comme si la politique épousait les « nécessités » de l'économie réelle et de la société réelle. Du coup, quelques députés de l'UMP sont déconcertés par la politique du président alors que des éléphants du PS sont eux aussi désorientés par les évolutions du parti sans que les rênes ne soient fermement tenues par une personnalité. Et, donc, ça pousse dans plusieurs sens. Jusqu'aux prochaines présidentielles. Mais sans qu'on puisse penser à une différence radicale entre droite et gauche. Certes, les façades sont présentées différemment. A gauche, on doit maudire les grands profits et les grandes fortunes. Mais, dans la salle des programmes politiques, rien de bien différent.


Les usines à produire du politique se ressemblent. A gauche, diverses fondations ont servi de laboratoire d'idées. Certes, la fondation Copernic se distingue par ses positions anti-libérales et anti-européistes, mais les instituts liés au PS produisent des idées de réformes ressemblant à celles produites par les think tanks de droite, notamment l'Institut Montaigne et Fondapol.


C'est sans doute pour rivaliser en dimension que Terra Nova a été créé pour faire face aux intellectuels de chez Montaigne. Des intellectuels apparemment interchangeables. Prenons par exemple Patrick Weil, historien à Paris I, qui a participé au Sarko team, autrement dit, à l'équipe de réflexion managée par Emmanuelle Mignon. Patrick Weil qui a usé d'un droit de réponse pour bien mentionner qu'il n'a pas pris l'initiative de collaborer avec le Sarko team, mais qui a juste répondu à la sollicitation de Mme Mignon. Appréciez la nuance. « J'y suis pour rien, je ne suis pas un mauvais type, on est juste venu me chercher ! » Eh bien, on retrouve Patrick Weil dans l'organigramme de Terra Nova, le nouveau think tank déclaré progressiste.


Anecdotique, certes, mais emblématique d'une évolution de la politique axée non pas sur des valeurs, du cœur, des classes sociales, des idéaux, mais sur des expertises, des analyses de problèmes, des solutions techniques. Bref, le nouvel esprit du capitalisme, analysé par Eve Chiapello et Luc Boltanski, avec ses réseaux, sa logique managériale, ses façonneurs d'âmes, ses producteurs de fonctionnalités humaines ajustées dans des tâches évolutives, adaptés pour résoudre et réaliser des objectifs chiffrés… Eh bien, ce nouvel esprit est passé dans le politique. Et les think tanks de droite et de gauche ne font en vérité qu'incarner ce nouvel esprit du politique qui, du reste, est mis en place dans les structures opaques des cabinets. Si bien que ce nouvel esprit du politique n'est ni de droite ni de gauche. Il est de l'efficace et du management d'hommes. Ces think tanks ne sont que des doublons inutiles sauf pendant les campagnes électorales nationales. Le succès de Sarkozy en résulte.


Dans un billet récent, j'avais pointé une consanguinité dans le comité scientifique de Terra Nova. Observons qui émarge et qui débat à l'Institut Montaigne, nous verrons les mêmes profils professionnels, présidents, directeurs… puis des journalistes en vue ; ainsi qu'un métissage discret accueillant quelques intellectuels de gauche. Par exemple, dans un conseil d'orientation marqué à droite, Guy Carcarsonne collabore avec Nicolas Baverez et Alain-Gérard Slama. Quant aux conférenciers invités, ils viennent de l'UMP comme du PS ou bien des Verts. Ce sont les mêmes qui sont interchangeables et que l'on retrouve, selon les affinités en réseaux, dans les journaux, les maisons d'édition, les médias, les cabinets ministériels, les think tanks, les bureaux opaques de Bruxelles où se préparent les directives européennes dans un environnement squatté par les émissaires du lobbying. Et, comme tout parti qui se respecte, des lieux de formation de ses cadres sont prévus. Ena, Sciences po, quelques universités parisiennes et départements de grandes écoles.


On comprend maintenant pourquoi la France va être gouvernée par un parti unique, comme la Chine où ce sont les mêmes qui gèrent les hommes, avec des techniques, des plans, des calculs, des hiérarchies, des scientifiques de la gestion humaine, des administrateurs. La différence, c'est qu'en France, comme dans d'autres démocraties européennes, il y a le choix entre deux fabricants de politique publique. C'est un peu notre héritage qui ressort, mais aussi un pragmatisme plein de bon sens au vu de notre culture. Une politique sera d'autant mieux acceptée, même si elle ne plaît pas, du moment que les gens ont choisi l'équipe aux commandes. Celui qui achète une Peugeot ou une Renault et qui n'est pas satisfait de son véhicule ne va pas le saborder dans un ravin. Il s'en accommode, avec les réparations si nécessaires. Alors que si on lui impose une automobile qui tombe souvent en panne, eh bien il va se plaindre auprès des autorités. Dans le système démocratique à parti unique, deux constructeurs se font concurrence. Les Français ont choisi Sarko plutôt que Ségo.

La politique, en France comme en Chine, est une pièce de la mécanique sociale. Ensuite se greffe une culture qui, sans doute, représente ce qui nous est essentiel et le plus cher. Ici, nous sommes attachés à la liberté d'expression, de manifester, de conspuer les pouvoirs en place. Cela ne change pas grand-chose au cours du monde dominé par la technique, les désirs et l'économie, mais, au moins, ce bien de liberté nous reste précieux pour cette dignité qui nous est proposée et que les uns prennent alors que d'autres préfèrent raser les murs. Ainsi va le cours d'une société qui converge vers une gouvernance par un parti unique proposé par deux fabricants de programme. Soyez heureux, prenez soin de vous !


Voir tout l'article du 15 mai de Bernard Dugué sur Agoravox ou yahoo

http://fr.news.yahoo.com/agoravox/20080515/


actualité,dessin de Delize yahoo! cartoons


13/05/2008
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