La Coordination rurale au-dessus de tout

La Nouvelle-Aquitaine bénéficierait-elle d’une double tutelle ? Avec, d’un côté, le représentant de l’État, le préfet de région, Étienne Guyot. Et de l’autre, le chef de la Coordination rurale du Lot-et-Garonne, Serge Bousquet-Cassagne, que la crise agricole a surtout propulsé au rang de phénomène médiatique, à défaut
de l’avoir vu embarquer derrière sa remorque l’ensemble du monde paysan. À la lueur de son nouveau coup de force, hier, à Bordeaux, la question se pose. Et toute analogie avec un héros gaulois teigneux – la Coordination rurale – résistant encore et toujours à l’envahisseur romain – l’administration dans son ensemble et ses hordes de normes venues à cheval de Paris ou de Bruxelles – s’arrête là.

Il n’empêche. Les événements d’hier ont montré qu’il était possible de repeindre de lisier le Conseil régional, déverser des pneus sur la chaussée, prendre la parole durant trente minutes dans l’hémicycle pour accuser les élus d’être des adversaires de l’agriculture, et repartir tranquillement dans le centre-ville garnir le miroir d’eau de lisier, notamment.Le tout sous le regard des forces de l’ordre. Certes, quelques
grenades lacrymogènes ont été tirées, mais la CR 47 avait tenté d’entrer dans le Conseil régional avec un engin agricole… Il faut savoir préserver les apparences.

Quant au nettoyage des rues, l’État et les collectivités s’en chargeront. Et pour ce qui est de la facture,
les contribuables néo-aquitains seront ravis d’entretenir les saines colères de la Coordination rurale du Lot-et-Garonne avec leurs impôts. Il nous semblait pourtant avoir entendu Gabriel Attal, lors de sa déclaration
de politique générale, marteler ces mots : « Tu casses, tu répares, tu salis, tu nettoies. » Mais il est vrai qu’il s’adressait aux mineurs de moins de 16 ans…

Toujours est-il que si la liberté de manifester est un droit fondamental, en Nouvelle-Aquitaine, la défiance de la Coordination rurale frise des records, comme en témoigne sa construction du barrage illégal de
Caussade. Dès lors, pourquoi changerait-elle de méthode ? À ce rythme, les « black blocs » vont finir par porter plainte pour discrimination… Au plus fort de la crise agricole, Gérald Darmanin avait réussi le tour de force de nier être plus conciliant avec les agriculteurs qu’avec d’autres manifestants, tout en reconnaissant les « laisser faire »… N’en déplaise au ministre de l’Intérieur, il y a bien un « deux poids, deux mesures ». Le « totem d’impunité » de la Coordination rurale 47 le prouve. En Nouvelle-Aquitaine, elle est au-dessus de tout.

                                          Jefferson Desport éditorial Sud-Ouest