Assemblée nationale : Gabriel Attal déjà à un tournant

En pleine crise agricole, et alors que l’heure est aux économies, le Premier ministre présentera aujourd’hui  dans l’hémicycle les grands axes à venir de sa politique. Un point de passage lourd d’enjeux

Une polémique majuscule avec sa nouvelle ministre de l’Éducation nationale, Amélie Oudéa- Castéra, celle qui lui a succédé Rue de Grenelle. Une crise agricole qui menace de déborder de tous les côtés. Alors qu’il présentera aujourd’hui sa déclaration de politique générale sous la menace d’un blocus de Paris par les agriculteurs, Gabriel Attal a déjà eu, entre sa nomination le 9 janvier et ce point de passage, un aperçu de tous les charmes du poste de Premier ministre.« Un échantillonnage représentatif de l’enfer de Matignon », résume Frédéric Dabi, le directeur général de l’Ifop.Si bien qu’après trois semaines d’exercice, ce discours apparait déjà comme un tournant. Face aux députés, dans un tel contexte, plus que des grandes lignes, ce sont des réponses qui sont attendues. Pour les agriculteurs bien sûr. Mais pas seulement. Car les questions de rémunération et de pouvoir d’achat qu’ils soulèvent irriguent bien au-delà de leurs champs.

Le terrain balisé

Or, comme le rappelle ce cadre de la majorité, « le président de la République nous a demandé de faire des économies ». Bruno Le Maire, le patron de Bercy, a fixé le tour de vis à 12 milliards d’euros par an. En clair, Gabriel Attal ne pourra s’appuyer sur la seule politique du carnet de chèques pour éteindre les incendies en cours et à venir.Et son discours s’annonce d’autant plus contraint que le 16 janvier, lors de sa conférence de presse, Emmanuel Macron lui a déjà fixé le cap à suivre : « réarmer » la France. De l’école, où l’éducation civique, le théâtre, l’histoire de l’art et le sport seront renforcés, à la sécurité, en passant notamment par la lutte contre l’infertilité et les inégalités, les chantiers sont nombreux. Mais il y a en un qui est commun à tous:celui de la simplification des normes, l’une des demandes principales des agriculteurs et plus largement du monde de l’entreprise.

« Gabriel Attal va devoir se trouver un espace », observe-ton chez Renaissance. Y compris sur le plan politique. En effet,cette déclaration de politique générale doit lui permettre aussi de s’affirmer comme le patron de la majorité. Et, à cet égard, de soigner ses relations – contrariées – avec le MoDem et Horizons, qui attendent surtout de placer un maximum des leurs dans la deuxième vague de nominations au gouvernement attendue dans les prochains jours

Débauchages

Autre sujet de taille : les relations avec LR. Sauf qu’après les débauchages de Catherine Vautrin et de Rachida Dati, l’heure n’est toujours pas au réchauffement…Si le terrain est accidenté, Gabriel Attal a néanmoins un atout de premier rang: «Il bénéficie d’un vrai crédit de confiance des Français, assure Frédéric Dabi. Ils lui prêtent des qualités rarement évoquées pour un politique : il parle vrai, il est cash, il veut changer les choses, il n’est pas dans le déni… »Il n’empêche, faute de majorité absolue, il ne sollicitera pas la confiance des députés. Et devra surmonter sa première motion de censure. Déposée par la gauche, celle-ci ne devrait pas aboutir. Mais elle donnera le ton des semaines à venir.

Jefferson Desport Sud-Ouest