2632- Un débat dont on ne voit pas la fin 2 posts

Un débat dont on ne voit pas la fin

 

 

Elle ne sait pas comment nous dire adieu. Ou plutôt si, Françoise
Hardy sait. Mais elle ne le peut parce que le droit français
actuel ne lui permet pas d’abréger d’elle-même les
souffrances que lui inflige un double cancer du larynx et du système
lymphatique. Épuisée par 55 radiothérapies, à la peine pour
se nourrir, la chanteuse, âgée de 80 ans, souhaite, avec l’accord de
ses proches, en finir, mais pas en catimini. « La Tribune dimanche
» publie sa lettre à Emmanuel Macron (1) qui évite de secouer
trop fort le récipient de l’émotion, piège dans lequel ce débat
peut facilement faire tomber.


Rien de plus normal, la fin de vie est un sujet clivant. Pas
comme l’immigration ou l’âge de départ à la retraite qui opposent
la droite et la gauche, sans mouche au fleuret. La compassion,
l’empathie, l’humanisme même ne sont en revanche l’apanage
d’aucun parti politique. Ni d’aucune foi, ni d’aucune religion,
alors que les évêques, les rabbins ou les imams multiplient

les avertissements à l’égard du pouvoir laïc ou supposé tel.

La Conférence épiscopale craint, en cas d’une loi instituant le droit

à mourir et le suicide assisté, « une rupture de digue ».

Argument entendu à l’époque du mariage homosexuel. Dix ans après,

jamais le mariage hétérosexuel ne s’est aussi bien porté.


Quant au louable commandement, « tu ne tueras point », faut-il rappeler

tout le sang versé depuis des siècles au nom de Dieu, en France et dans

le reste du monde ? Avant de se raviser, le grand rabbin Haïm Korsia avait

commis un dérapage obscène en comparant l’euthanasie avec la Shoah.

On peut comprendre pourquoi Emmanuel Macron, tout en refusant

de s’impliquer personnellement dans le débat (personne
n’est dupe) tarde à donner son feu vert à un projet de loi dont il a
promis qu’il serait voté pendant son deuxième quinquennat.
Sans l’imprimatur élyséen, rien n’avancera. Comme d’habitude.


On s’étonne davantage de la procrastination présidentielle à
propos d’une loi qui obtient l’assentiment d’une majorité de
Français alors que, selon lui, rien n’allait assez vite pour la réforme
des retraites qui coalisait l’hostilité de ses compatriotes, traités
d’irréductibles Gaulois. L’âge légal aurait-il déjà été reporté à
64 ans si les différents cultes s’en étaient mêlés ? La question se
pose. Bien sûr qu’une législation autorisant le droit à choisir sa
mort et impliquant le personnel médical ne peut naître d’un claquement
de doigts jupitérien ou d’un 49.3. Il faut en discuter,
écouter et soupeser les arguments pour et contre. Mais une fois
un projet lancé, on ne peut pas tergiverser. Plus que la décision,
c’est l’indécision qui contribue à envenimer le climat. Sur ce sujet,
Emmanuel Macron doit faire preuve de hardiesse.

 

                                    Benoît Lasserre éditorial Sud-Ouest



18/12/2023
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