2630-Prise d’otage à la hongroise 2 posts


ÉDITORIAL
Prise d’otage à la hongroise

 

Il en avait fait la menace et l’a exécutée : seul contre tous, Viktor
Orban a mis son veto à une nouvelle enveloppe européenne
pour aider l’Ukraine au moment où celle-ci en a tant
besoin. Jouant de la règle de l’unanimité qui empêche l’Union
européenne d’avoir une politique étrangère digne de ce nom, le
Premier ministre hongrois a administré à ses 26 collègues la seconde
gifle de l’année, après sa poignée de main à Vladimir Poutine
en octobre à Pékin.


La Hongrie, 1 % de la population du continent, tient donc la clé
d’une décision qui engage l’avenir de l’Ukraine comme pays libre
et, par ricochet, celui de l’UE à laquelle il appartient et qui
pourrait, si l’armée de Kiev flanche, se trouver à son tour dans le
collimateur de la Russie.


Certes, Orban n’était pas né quand les chars soviétiques ont
envahi Budapest en 1956 pour mater dans le sang la révolte populaire
contre le régime soutenu par Moscou. Mais il pourrait s’aviser
que si l’URSS a succombé, l’impérialisme russe n’est pas mort. Et
on peut être surpris de voir l’ancien étudiant libéral et anticommuniste
qu’était Orban manger aujourd’hui dans la main du maître
du Kremlin, et importer chez lui, avec le pétrole et le gaz russes,
une bonne dose d’autoritarisme poutinien au mépris des règles du
club démocratique que son pays a rejoint en 2004.


La dérive « illibérale » du Magyar crispe les institutions de Bruxelles.
Après des lustres de patience, ellesont réagi en gelant 21 milliards

d’argent européen destiné à la Hongrie. Dire que le couteau lui a

été mis sous la gorge serait mentir : avant même le vote sur l’aide

à l’Ukraine, dix milliards étaient déjà débloqués pour prix d’un retour

très timide d’Orban dans les clous européens. Poussant son avantage,

le leader hongrois réclame la totalité du magot avant d’envisager de
changer d’avis.


Assez malin pour avoir laissé voter l’ouverture de négociations
d’adhésion dans l’UE avec l’Ukraine et la Moldavie qui
prendront de toute façon des années, Orban continue donc de
faire chanter Bruxelles avec, dans le viseur, le scrutin européen
de juin 2024 où il escompte, non sans raison, une vague populiste
conforme à ses désirs. Et dire que la Hongrie exercera une
partie de l’an prochain la présidence tournante de l’Union européenne!

Orban, qui vient de perdre un précieux allié en Pologne avec la
victoire de l’opposition proeuropéenne, ne pourra pourtant pas
empêcher l’UE de trouver en janvier un moyen de contourner
son nouveau veto. Son chantage, bien rodé, ne vise-t-il pas surtout
à tirer le bénéfice maximal de l’Union européenne en tirant
sur l’élastique ? Reste à savoir combien de temps cet agaçant
chantage à la hongroise va pouvoir durer.

                                         Edito Sud-Ouest  Christophe Lucet



16/12/2023
2 Poster un commentaire

Inscrivez-vous au blog

Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour

Rejoignez les 355 autres membres

blog search directory
Recommander ce blog | Contact | Signaler un contenu | Confidentialité | RSS | Créez votre blog | Espace de gestion