2368-La médiocrité de ses opposants, atout majeur du président Emmanuel Macron 4 posts

L'atout majeur de Macron, c'est la médiocrité de ses opposants

L'anti-macronisme ne fait pas un programme.

Éric Ciotti à l'Assemblée nationale, le 15 mars 2023. | Ludovic Marin / AFP
Éric Ciotti à l'Assemblée nationale, le 15 mars 2023. | Ludovic Marin / AFP

Rarement un président avait été tant encalminé. Plus précisément, tous les leviers que met à sa disposition la Ve République semblent hors d'usage.

La dissolution? Elle atténuerait encore sa majorité relative. Le référendum? Il signerait sa défaite. Le remaniement? Il serait perçu comme une gesticulation sans effet durable. 

Reste une chance pour le chef de l'État: il n'a pas d'adversaire. Entendons-nous bien: les opposants au macronisme ne manquent pas. Dans les milieux artistiques, académiques et bien sûr parlementaires, ils sont même chaque jour plus affirmés. En la matière, nulle pénurie, forte inflation.

Mais à cette heure, aucune personnalité politique ne s'impose comme l'évidence. L'alternative naturelle.

Soigne ta droite

Prenons les chefs de file des grands partis d'opposition.

Qui imagine Éric Ciotti à l'Élysée? Poser la question, c'est y répondre. Les Républicains, première force d'opposition au parlement, ont à leur tête un leader contesté, moqué, dont l'attachement à la sécurité et aux Alpes-Maritimes ne suffit pas à forger un destin national.

Les divisions au sein de son propre camp l'empêchent de rêver plus grand. «Comment imaginer affronter Poutine et Xi Jinping quand on se laisse déborder par Aurélien Pradié?», lui assèneront ses adversaires.

À gauche, La France insoumise peine à tirer profit du chaos politique.

Bien sûr, Éric Ciotti n'est que l'homme lige d'un autre candidat: Laurent Wauquiez. Mutique, ce dernier attend des jours meilleurs pour affirmer ses ambitions. Déjà brûlé par son revers aux européennes de 2019 (8% pour la tête de liste qu'il avait désignée, à savoir François-Xavier Bellamy), bouté hors de la présidence de LR par ses «amis», l'homme du Puy-en-Velay se fait discret. Par ambiguïté: sur le fond, son parti est favorable à la réforme des retraites. Et par contraste: il ne veut pas mêler ses voix avec celles de La France insoumise –ni paraître soutenir, lui le héraut revendiqué de l'ordre, les débordements que celle-ci encourage.

Marine Le Pen affronte le même dilemme. Vanter la contestation sans soutenir la rue ni ses poubelles enflammées. Appeler à l'ordre sans se ranger derrière le pouvoir. D'où la posture de surplomb adoptée par la candidate du RN, sans que personne puisse dire quelle est exactement son opinion sur le régime des retraites. Si le mutisme évite les fautes de carre, il ne permet pas de gagner la course.

Pas mieux à gauche

À gauche, La France insoumise peine à tirer profit du chaos politique. Cette crise avait pourtant tout pour favoriser les «insoumis». Chez les Français se fait sentir une demande accrue de justice sociale (contre la réforme des retraites) et d'horizontalité démocratique (contre le 49.3). Soit deux des principaux piliers du programme «L'avenir en commun».

Las!Les outrances à l'Assemblée nationale (injures, cris, obstructions) n'ont satisfait que les sympathisants

déjà convertis, et rebuté tous les autres. Pire, l'incapacité de Jean-Luc Mélenchon à passer la main après trois présidentielles perdues –malgré un score ascendant– donne l'impression d'un parti qui dispense des leçons de démocratie, sans se les appliquer à lui-même.

 

Au moment où La France insoumise promet une VIe République fondée sur le dialogue, l'horizontalité et le parlementarisme, l'éviction brutale de François Ruffin, Clémentine Autain ou encore Alexis Corbière des instances dirigeantes du mouvement sonne comme une purge des rivaux potentiels pour 2027. Et comme un démenti, dans la pratique, des promesses séduisantes –mais théoriques.


 

François Ruffin le dit d'ailleurs à sa manière, dans un long post publié samedi 6 mai sur son blog, consacré à la stratégie de la gauche pour 2027: «Jupiter, on a déjà donné. Il n'y aura pas de Messie, pas de super-héros qui viendra, avec ses petits bras musclés et son magnifique cerveau, qui viendra relever la France. Il faut une équipe.»

Une équipe, mais dans quel état? Au Parti socialiste, Olivier Faure est toujours contesté par une petite moitié de ses troupes. Même la désignation des candidats socialistes aux élections sénatoriales de septembre prochain tient du psychodrame. La convalescence sera longue avant de prétendre incarner une force alternative pour 2027.

 

Chez les Verts, la nouvelle direction est… verte. Récemment arrivée à la tête du parti écolo, Marine Tondelier doit lutter contre les visées hégémoniques de LFI, qui souhaite une liste commune pour les élections européennes. La trentenaire doit gagner la bataille de la notoriété et rassembler les courants de son mouvement avant de pouvoir penser à 2027. Pas une mince affaire.

Quiconque prétend à la succession d'Emmanuel Macron devra se distinguer de lui.

Quant au Parti communiste, il est certes unifié derrière son chef de file, Fabien Roussel. Mais le capital sympathie ne fait pas une élection, un sondage ne fait pas un vote, une punchline ne fait pas un programme. Il y a loin entre les 2,28% de la dernière présidentielle et la volonté de jouer les premiers rôles pour la prochaine.

Bref, de l'extrême droite à la gauche de la gauche, obsessionnels mais désorganisés, les contempteurs du macronisme font penser à Caton l'Ancien, le sénateur romain. Obsédé par Carthage, la rivale de Rome, il concluait inlassablement ses discours par ces mots: «Il faut détruire Carthage» («Delenda est Carthago»). «Il faut détruire le macronisme», répètent aujourd'hui ses lointains héritiers. Oui, mais encore?

 

Succession

Dans cette mêlée générale, dont personne n'émerge mais dont tout le monde pâtit, le macronisme n'est finalement guère menacé. Les oppositions n'ont, à cette heure, pas trouvé la clé pour s'imposer en force alternative crédible.

Pour Emmanuel Macron, le danger viendra plus sûrement de son propre camp. Sa position de «lame duck» («canard boiteux», expression qui désigne, aux États-Unis, un président qui n'a pas le droit de se représenter) va aiguiser les ambitions.

Édouard Philippe et Bruno Le Maire lorgnent sur 2027. François Bayrou ne passe jamais son tour. Et qui imagine Gérald Darmanin rester inactif?


Quiconque prétend à la succession d'Emmanuel Macron devra se distinguer de lui. Faire entendre un «oui, mais», selon la formule giscardienne pour rompre avec le gaullisme. Mettre en avant «la rupture», expression choisie par Nicolas Sarkozy pour «tuer le père», Jacques Chirac, au terme de ses deux mandats élyséens.

 

Gardez-moi de mes amis, mes ennemis je m'en charge…



12/05/2023
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