2213- Le monde en 2023 5 posts

 

Le monde qui nous attend en 2023

  • par Gérard Araud, pour Le Point - janvier 2023
Ukraine, Chine, Turquie, Iran… Tour du monde des endroits où va se jouer l’avenir de notre planète pour les douze mois à venir.
 
Je me risque dans l'exercice dangereux de la prédiction, tout en rappelant qu'il est impossible de prédire… l'imprévisible. La crise cardiaque du dirigeant, la révolution de palais, une épidémie, un krach financier, etc. peuvent balayer en quelques heures les analyses les plus fondées.
 
En tout cas, pour les Européens existe une certitude, c'est qu'en 2023 la guerre en Ukraine restera le sujet central de leurs préoccupations. La première question porte sur l'espoir d'une fin du conflit dans les douze mois qui viennent. Dans l'immédiat, c'est exclu : les Ukrainiens sont exaltés par les succès qu'ils ont remportés sur le terrain ; les Russes espèrent rétablir la situation.
Une percée décisive d'une partie changerait la donne, mais les experts estiment, à ce stade, qu'elle est improbable. S'ils avaient raison, ce serait donc l'épuisement qui pourrait conduire à l'ouverture de pourparlers entre les deux ennemis, mais on voit mal les contours d'un compromis qui pourrait s'en dégager. La Russie ne va pas renoncer aux territoires qu'elle a annexés et l'Ukraine ne va pas s'y résigner. Attendons-nous donc probablement à la prolongation du conflit.
 
L'année 2023 pourrait alors poser une seconde question, celle de la fermeté du soutien occidental à l'Ukraine ; aux États-Unis, en premier lieu, où la nouvelle majorité républicaine à la Chambre essaiera de limiter ou, au minimum, de conditionner l'aide que les États-Unis fournissent à Kiev ; en Europe, ensuite, où l'économie subira de plein fouet tous les effets de la guerre et de la rupture avec la Russie. Quelle sera la réaction des opinions publiques ? Manifesteront-elles, comme l'espère Poutine, leur lassitude à l'égard du soutien à l'Ukraine ? Les Européens seront-ils capables d'inscrire leur contribution dans la durée, voire de prendre le relais au moins partiel des Américains ? Nous connaîtrons la réponse en 2023.
 
Bombe iranienne ?
 
Autre inquiétude géopolitique pour les Européens : la Turquie, qui entre dans une année électorale difficile pour la majorité actuelle. Dans le contexte du centenaire de la République, la tentation pourrait être grande pour Erdogan d'effacer le souvenir du fondateur de la Turquie moderne, Mustafa Kemal, qu'il exècre, en revenant sur les résultats du traité de Sèvres de 1923, en particulier en mer Égée aux dépens d'une Grèce qu'il ne cesse de menacer du haut de la puissance recouvrée de son pays.
 
Qu'en sera-t-il d'un Iran qui se rapproche inexorablement de la bombe, hypothèse également inacceptable à Washington, à Riyad et à Jérusalem ? Un accord renouvelant celui qu'avait signé en 2015 la République islamique et qu'avait dénoncé Trump semble désormais hors d'atteinte. Dans ce contexte, des frappes sur les installations nucléaires iraniennes ne sont pas exclues. En dehors même de la crise nucléaire, quel est l'avenir d'un régime islamique enfermé dans une impasse répressive ? 
 
Pour les Français, la faillite de notre politique au Sahel pourrait ne pas avoir porté tous ses fruits amers. Le Burkina Faso semble suivre le Mali en se rapprochant de la Russie. Les opinions publiques s'enflamment contre nous dans l'ensemble de la région. Les gouvernements du Niger ou du Sénégal pourront-ils longtemps résister à cette lame de fond ? Aurons-nous le courage de revoir en profondeur notre politique qui a été trop militaire ?
 
Tête-à-tête sino-américain
Mais ces préoccupations, si intenses soient-elles dans l'immédiat, pèsent peu face à la «grande querelle» qui structurera l'ensemble des relations internationales dans les décennies qui viennent, à savoir le tête-à-tête sino-américain. Cette confrontation n'a pas encore trouvé son équilibre. Le dialogue politique entre les deux superpuissances, qui seul permettra de la stabiliser et d'éviter que les inévitables incidents ne dégénèrent, est encore à l'état d'ébauche. La Chine, qui fait face à des difficultés économiques et politiques, pourrait rechercher l'apaisement, mais, de leur côté, les États-Unis entrent de fait en campagne électorale alors que la lutte contre «la Chine communiste» y devient l'argument de beaucoup. 2023 peut donc aussi bien voir une aggravation des tensions, y compris autour de Taïwan, que le début d'une normalisation.
 
En arrière-plan de ces crises, qui ne sont d'ailleurs pas les seules (la Libye, la Syrie, l'Arménie, etc.), plane la menace d'une récession économique globale. Les banques centrales se sont donc engagées dans une hausse générale et brutale des taux d'intérêt et annoncent la poursuivre en 2023 pour briser l'inflation. L'activité économique en souffrira inévitablement. Problèmes conjoncturels, donc, en 2023, mais aussi structurels avec le choc que subit l'industrie européenne du fait de l'explosion du prix de l'énergie. Des délocalisations risquent d'être la réponse d'ailleurs rationnelle des entreprises.
 
Enfin, n'oublions pas le Covid au moment où la Chine, qui sort de la politique zéro Covid, risque de connaître une explosion de la maladie dans une population peu vaccinée et sans immunité de groupe. On y parle déjà de centaines de millions de personnes infectées. Or, on le sait, le virus voyage rapidement… Et que l'atelier du monde vacille n'est bon pour personne.
 
Une année 2023 marquée, donc, pour l'Europe par des incertitudes généralisées, qu'elles soient politiques, financières, économiques ou sanitaires, le tout dans le climat populiste que connaissent la plupart des démocraties occidentales. Bonne année !�
 
 
 
Peut être une image de 1 personne et costume
 
 


05/01/2023
5 Poster un commentaire

Inscrivez-vous au blog

Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour

Rejoignez les 355 autres membres

blog search directory
Recommander ce blog | Contact | Signaler un contenu | Confidentialité | RSS | Créez votre blog | Espace de gestion