2211- Femmes afghanes, l'angle mort de nos progressistes 4 posts

 

  • par Valérie Toranian, pour Le Point - décembre 2022
En France, les néoféministes se mobilisent contre l’homme blanc occidental. Oubliées, les Afghanes, qui sont, elles, jetées en pâture aux islamistes…
 
Lorsque les talibans ont repris le pouvoir à Kaboul en août 2021, Jean-Yves Le Drian, alors ministre des Affaires étrangères, avait déclaré, sans rire, qu'il espérait les voir former un gouvernement «inclusif». Car, avait-il argumenté, ce n'était pas «la même génération que ceux qui ont contrôlé l'Afghanistan entre 1996 et 2001». Telle était apparemment la thèse du Quai d'Orsay. Entre 2001 et 2021, les fondamentalistes auraient eu la révélation de la modernité.
 
Contrairement aux barbus obtus de l'époque du mollah Omar, les nouveaux talibans allaient pratiquer la charia all inclusive, la fusion du fondamentalisme pachtoune et de l'écoféminisme vegan, une synthèse postmoderne inédite qui allait en surprendre plus d'un ! Mediapart, toujours à la pointe de l'impartialité journalistique, avait même mis en garde les imbéciles qui s'épouvantaient du retour des bourreaux des femmes : il ne fallait se livrer à aucune conclusion hâtive car on «ne connaissait pas leurs intentions».
 
Apartheid sexuel
La différence notable entre la saison 1 et la saison 2 des «Talibans à Kaboul» est qu'il n'y a pas eu, pour le moment, de décapitation de femmes dans un stade. Mais il y a tant de manières de décapiter une population, de la faire mourir à petit feu et sombrer dans le désespoir. L'Afghanistan est le seul pays au monde où une loi interdit aux femmes toute forme de scolarité ou d'éducation. Après l'école primaire et secondaire, c'est désormais l'université publique et privée qui vient d'adopter les règles de l'apartheid sexuel. Refuser aux femmes de faire des études, c'est doublement criminel. Non seulement on les opprime mais on prive aussi les générations féminines futures de l'accès aux soins, puisqu'une femme ne peut être soignée que par une autre femme.
 
Le 24 décembre, les autorités talibanes ont ordonné aux ONG nationales et internationales de ne plus faire travailler de femmes. Le motif ? Elles ne portent pas correctement le hidjab au sein de ces organisations. C'est le coup de grâce pour des milliers de femmes afghanes dont le travail au sein de ces ONG constituait non seulement une précieuse source de revenus, mais aussi une fenêtre ouverte sur la vie. Sans parler du rôle fondamental qu'elles exerçaient comme intermédiaires auprès d'une population de plus en plus pauvre dans un pays en faillite économique. Dix-neuf millions d'Afghans sont en précarité absolue, et six millions sont directement menacés de famine, estiment les experts.
 
La haine anti-femmes des islamistes afghans devrait déclencher un tsunami de mesures de rétorsions de la part de la communauté internationale. Il n'en est rien. On proteste poliment et mollement. La disparition de la surface du monde visible des Afghanes, c'est ennuyeux, mais que voulez-vous, on a déjà fort à faire avec l'Ukraine.
 
La haine anti-femmes des islamistes afghans devrait déclencher la fureur des défenseur(e)s des droits des femmes. Il n'en est rien. En France, les néoféministes sont bien trop occupées par la guerre de tranchées qu'elles mènent contre la seule violence qui compte, celle de l'homme blanc occidental, dont la turpitude n'est pas moindre, selon elles, que celle des bourreaux afghans. La pensée décoloniale est passée par là. On ne peut pas condamner des systèmes patriarcaux orientaux plus lourdement que notre «odieux système occidental».
 
Un relativisme faussement progressiste
Les talibans, c'est mal. Mais l'homme français qui fait des blagues lourdes, c'est mal aussi. Il n'y a pas de hiérarchie. Le principe même de hiérarchie est un principe de dominant qui suppose certaines valeurs supérieures à d'autres. C'est inenvisageable. La République islamique qui tue et emprisonne les femmes iraniennes parce qu'elles brûlent leurs foulards, symbole de leur oppression, c'est mal. La République française qui combat le foulard à l'école au nom du principe de neutralité religieuse et de la laïcité, c'est tout aussi mal, car c'est du «racisme d'État», de l'«islamophobie».
 
La religion est sacralisée. La défense des femmes se relativise. Les traditions qui les oppriment ne doivent pas être stigmatisées, car au nom de quel principe moral supérieur peut-on s'y opposer ? Ce relativisme faussement progressiste est un chant funèbre. Il enterre les espoirs des femmes éprises de liberté qui, de Kaboul à Téhéran en passant par le Kurdistan, croient encore que la France porte le message universel de la liberté et des droits des femmes. Mais il faut croire qu'il n'y a qu'en dehors de la France qu'on croit encore en la France.�


02/01/2023
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