2062- Ma revue de presse 28 posts

Molière , pas besoin du Panthéon

édito (Sud-Ouest)

Benoît Lasserre
« Tenons-nous enfin
prêts, au risque de
devenir Alceste, à
observer le bal des
Tartuffe alors que le
rideau se lève sur la
présidentielle »

 

 

Molière au Panthéon, qu’irait-il faire dans cette galère ?
Non point que le prestigieux édifice de la rue Soufflot
soit infamant pour le père de la Comédie Française
ou que celui-ci y mérite moins son caveau que Voltaire, Victor
Hugo, voire Zola. Aux partisans du transfert, comme Francis
Huster, Anne Hidalgo et Valérie Pécresse à l’unisson, qui
voient, dans le refus de l’Élysée, une fourberie de Macron, on a
envie de demander : à quoi bon ?


Applaudi sans relâche depuis ses premières pièces, écrites
dans le mitan du XVIIe siècle, célébré dans l’Hexagone et à l’étranger,
indétrônable champion des manuels scolaires et des
cours de théâtre, Molière a-t-il besoin de cette consécration
laïque ? Et qu’a-t-il fait pour le pays, si ce n’est faire rire ses
compatriotes d’hier et d’aujourd’hui, ainsi qu’avoir taillé des
diamants purs dans la pierre de la langue française ?


Voilà qui est certes digne de la gratitude de la Nation mais est ce
comparable aux plus récentes cérémonies ? Par exemple, Geneviève
de Gaulle, Germaine Tillion, Simone Veil ou Joséphine Baker,
lumineuses héroïnes du combat contre toutes les haines et toutes
les ténèbres. Par exemple, Maurice Genevoix, érigé en porte-drapeau
des millions de fantômes de la Grande Guerre. Par
exemple, Pierre Brossolette et Jean Zay, martyrs de la Résistance
au nazisme, la vraie Résistance, honteusement falsifiée par ceux
qui défilent contre le vaccin.


Ne boudons cependant pas notre plaisir de cette querelle,
tellement française, autour des cendres de Molière. Et imaginons
les chefs-d’oeuvre que lui aurait inspirés l’actualité de
ces derniers mois ou des prochaines semaines. Comment aurait-
il parlé de cette maladie que des jocrisses en quête de
publicité persistent à qualifier d’imaginaire ? Comment aurait-
il traité le phénomène #MeToo, lui qui a doté plusieurs de
ses personnages en jupons d’une intelligence bien plus vive
que leurs partenaires masculins et fait de la jeune Agnès une
pionnière du féminisme ? Comment aurait-il réinventé ses
« Précieuses ridicules » autour d’Anne Hidalgo et de Christiane
Taubira qui se chamaillent pour des miettes électorales ?


Le Covid a propulsé tant de Diafoirus sur les plateaux de
télévision, dont le plus imbu de lui-même brandissait un clystère
rempli d’une molécule soi-disant miraculeuse, qui fut
vite démasqué comme un joueur de pipeau. L’épidémie a
aussi eu la peau d’Harpagon, protégeant en vain sa cassette et
anéanti par le « quoi qu’il en coûte ». Tenons-nous enfin prêts,
au risque de devenir Alceste, à observer le bal des Tartuffe
alors que le rideau se lève sur la présidentielle. Pour tout ceci,
même si ce n’est pas sur le parvis du Panthéon, il est temps de
proclamer : « Entre ici, Poquelin ! »



14/01/2022
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