1978 - Ma revue de presse 44 posts


ÉDITORIAL
L’Euro, un terrain très politique

Christophe Lucet Sud-Ouest

 

 

Les anciens Grecs avaient inventé les Jeux olympiques
pour offrir des trêves pacifiques à leurs cités en guerre
perpétuelle. Et la résurrection des Jeux en 1896, sous
l’impulsion de Pierre de Coubertin, avait ranimé cet « esprit
olympique » qui anime les joutes entre athlètes en
reléguant au vestiaire les armes et la haine.
À quelques semaines des Jeux de Tokyo, l’Union européenne
de football (UEFA) s’est appuyée sur ce vieil idéal
de neutralité sportive pour refuser que le stade de Munich
se pare de couleurs arc-en-ciel et serve ainsi à dénoncer
une loi jugée discriminatoire envers les homosexuels en
Hongrie. La décision peut sembler de bon sens au regard
de l’ordre public, puisque l’équipe attendue en Allemagne
était justement celle de Hongrie, escortée par la Brigade
des Carpates, escouade de supporters ultranationalistes.


Mais la polémique déclenchée
par l’UEFA montre que la
neutralité de l’arène sportive
est une fiction. Dès le début de
l’Euro, des équipes ont mis genou
à terre pour dénoncer le
racisme, provoquant la bronca
d’une partie du public. Quant
au « Rainbow Gate », le Premier
ministre hongrois a allumé la
première mèche en choisissant
le jour de l’entrée en lice des
footballeurs magyars dans un
stade bondé de Budapest pour
promulguer une loi liberticide
sous couvert de protection de l’enfance.


Viktor Orban, depuis longtemps dans le viseur de l’Union
européenne pour des atteintes à l’état de droit, utilise
sciemment l’Euro comme caisse de résonance pour son
projet de défense de « la famille traditionnelle ». Et il n’a
sûrement pas été surpris de voir quatorze pays européens,
dont la plupart ont une équipe en compétition, exiger de
la Commission qu’elle sanctionne la Hongrie pour son
nouveau coup de canif aux droits des minorités.
Le choc entre les valeurs libérales qui fondent l’Union, et
les conceptions de la société défendues par la droite ultraconservatrice
hongroise, mais aussi polonaise, est en train de fracturer l’Europe.

On pouvait souhaiter qu’une compétition comme l’Euro reste à l’écart

de ce conflit politico idéologique, mais il n’en est rien.

 

Étonnant ? Pas vraiment.
Car dans une Europe qui a banni la guerre, le sport est
devenu un des rares exutoires des passions nationalistes.
En réaffirmant son refus de l’homophobie tout en refusant
que le stade bavarois serve de tribune à cet engagement-
là, l’UEFA a voulu bien faire. Mais les stades de Budapest
ou de Debrecen pavoisés jusqu’aux cintres de drapeaux
magyars sont aussi des arènes politiques. Et les autorités
sportives n’y peuvent, hélas, pas grand-chose.
ÉDITORIAL



24/06/2021
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