EDITO. Suppression des ZFE : marche avant, marche arrière

    • Dominique Delpiroux.Dominique Delpiroux.
      Dominique Delpiroux. DDM
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    Dominique Delpiroux La DDM

    On a dit, d’abord, "Zones à Faible Emission". Et puis, "Zones à Forte Exclusion". Désormais, "Zones de Franches Engueulades". Car, si l’Assemblée Nationale a supprimé avant-hier soir ces ZFE, le débat n’en est pas pour autant apaisé, bien au contraire. La faute à un texte sans doute rédigé à la va-vite et qui subit désormais le sort du bébé que l’on jette avec l’eau du bain. Cette tactique où l’on avance de deux pas pour reculer de trois, notamment en matière environnementale, semble devenue une habitude chez nos gouvernants.

     

    Créer des ZFE part d’un constat. La pollution dans les grandes agglomérations encrasse inexorablement nos poumons. Pour des milliers de personnes, cette pollution finit par être mortelle. Et puis, les centres-villes doivent à tout prix s’émanciper de la dictature de la voiture.

    Malheureusement, les "Crit’air" basés sur les types ou l’âge de véhicules se sont révélés souvent injustes. Ainsi, une petite diesel de 15 printemps, peu gourmande, se retrouvait tricarde, quand d’énormes SUV voraces mais récents restaient dans les clous. Au final, la mesure allait pénaliser très fortement parmi les plus modestes, pas forcément les plus polluants.

    Supprimer les ZFE aujourd’hui va sans doute soulager certains salariés et pas mal de petits artisans. Mais pour beaucoup le mal est fait, la vieille bagnole jetée à la casse pour une galère de transports quotidienne. Et que dire de ceux qui entre-temps, on fait le sacrifice d’acheter une électrique et qui auront le sentiment d’avoir été roulés. En revanche, les asthmatiques, les cyclistes, les piétons, qui respiraient un peu mieux vont recommencer à tousser. On risque une fois de plus, de dresser des catégories de Français les uns contre les autres. On a besoin de ça, en ce moment ?

    Ces valses hésitations sont épuisantes. On se souvient forcément de l’écotaxe, passée à la trappe ; on se demande comment on a pu gaspiller ainsi deux milliards d’euros. On s’interroge devant la loi Duplomb qui en matière agricole, veut aussi faire marche arrière sur les pesticides. Autre loi dans la tourmente parlementaire : "zéro artificialisation nette des sols", qui prive trop souvent les maires de terrains pour construire, alors même qu’il y a des millions de mal logés dans notre pays.

    Tant de textes lancés au doigt mouillé nous désespèrent, car bien souvent, c’est l’écologie qu’on a oubliée, avant ou après. Contrairement à ce que claironne Marine Le Pen, les Français ne considèrent pas que celle-ci est nécessairement "punitive". Ils savent qu’il y a des efforts à faire, ils ont conscience des enjeux de la planète. Mais il serait temps que, dans les faits, les lois sachent marcher sur deux jambes : l’environnement et le progrès. Juste en marche avant.