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Qui pour prendre la tête des institutions européennes ?

À près d’un an des élections européennes, les esprits s’échauffent, discrètement, à Bruxelles, pour le grand big bang quinquennal des institutions européennes. Entre frictions, ambitions et équations politiques -Nicolas Gros-Verheyde, à Bruxelles pour Sud-Ouest

 

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Les élections européennes se dérouleront du 6 au 9 juin 2024, ce qui peut paraître lointain au commun des mortels. Pas à Bruxelles. Dans les cercles rapprochés des dirigeants européens, chacun y pense. C’est même devenu le sujet de conversation favori.L’équation, au niveau européen, est en effet beaucoup plus complexe qu’au plan national.

Il faut renouveler les quatre postes les plus visibles, dits de « tête » : le chef de la Commission européenne (l’exécutif européen), le haut représentant de l’UE (le chef de la diplomatie européenne), le président du Conseil européen (qui réunit les chefs d’État ou de gouvernement des 27) et la présidence du Parlement européen. Soit Ursula von der Leyden, Josep Borrell, Charles Michel et Roberta Metsola. Mais il faut aussi choisir ou élire 27 commissaires européens, les présidents des commissions parlementaires, les chefs de cabinets des commissaires, véritables éminences grises, etc. Pas simple. Un puzzle passionnant

 

Tout d’abord, chaque désignation obéit à un processus différent. Le président du Conseil européen est nommé (élu en théorie) par ses pairs. La présidence de la Commission européenne doit satisfaire trois critères : être proposée par son État membre, être acceptée par les 27 chefs d’État et de gouvernement (choix fait souvent au consensus), se voir élue par le Parlement européen (à la majorité). Passer ces trois étapes et satisfaire tout le monde exgent un réel engagement. Ensuite, aucun parti politique en Europe n’a de majorité ni absolue ni même relative. Il faut au minimum trois, voire quatre partis pour avoir une majorité. Cette diversité politique doit se refléter dans la distribution des postes. Mais quelle sera la majorité. Difficile à prévoir. Car les élections continuent de se dérouler dans un cadre national. Enfin, il faut respecter certains équilibres : principalement entre hommes et femmes – un principe non écrit devenu règle obligatoire au niveau européen –, comme entre les États membres. Les postes doivent être ainsi subtilement répartis entre les « petits » et les « grands », entre le sud, le nord, ou l’est, entre les « anciens » membres et les « nouveaux ». De quoi faire s’arracher les cheveux à la meilleure des mathématiciennes, à l’amateur de puzzles compliqués ou au maniaque chevronné du Rubik’scube.

 

 

Le jeu du chamboule tout Malgré tout, au jeu de « qui pour remplacer qui », quelques noms circulent déjà dans le Landerneau européen. Pour le poste de président du Conseil européen, c’est évident : le Belge Charles Michel s’en va. Il a fait deux mandats de deux ans et demi et ne peut pas être reconduit. C’est la règle ! Pour le remplacer, plusieurs noms ont été avancés, tels celui du Premier ministre portugais Antonio Costa. Socialiste, il a su passer la crise économique et a bonne réputation parmi ses pairs. Il est discret, pas trop fort en gueule : un bon point pour ce poste. Mais il est fragilisé en interne. Charles Michel ne compte pas quitter la politique européenne. Ce libéral bon teint, ami d’Emmanuel Macron, se verrait bien passer de « l’autre côté » au poste de chef de la diplomatie européenne. L’Espagnol Josep Borrell qui tient la barre depuis bientôt quatre ans comme haut représentant de l’UE (le titre officiel du poste) marchera sur ses 80 ans. Les milliers de kilomètres parcourus chaque jour usent. Cette obligation n’est pas faite pour déplaire au Belge. Charles Michel adore parcourir le monde, représenter l’Europe et poser sa marque, avec talent, lors des réunions internationales. À la tête de la Commission européenne, certains misent tout simplement sur le renouvellement de l’actuelle titulaire du poste, l’Allemande de la CDU, Ursula von der Leyen. Travailleuse, elle a traversé deux crises majeures (Covid et Ukraine) en jouant l’intérêt européen, jugent ceux qui la connaissent. L’intéressée, prudente, n’a encore rien dit. « Elle n’a pas pris sa décision », confirme à « Sud Ouest » son porteparole. Mais elle y pense sérieusement d’après nos informations. Présente en mars dernier, à un séminaire du gouvernement allemand, elle a reçu l’accord, voire la demande de jouer les prolongations.Le fait qu’elle soit du bord opposé à l’actuelle coalition au pouvoir dirigée par le social-démocrate Olaf Scholz ne bloque rien. Au contraire. Au Parlement européen, impossible à prévoir. Tout dépendra des élections. Mais l’habitude qui s’est prise est celle de diviser le mandat pour le « perchoir » entre les deux principaux partis. Ce qui permet de multiplier le champ des possibles.

 

Tensions dans les couloirs Pour être parfaite du côté politique, cette combinaison de trois noms, issue des principaux partis de l’actuelle coalition majoritaire européenne ne ravit pas tout le monde. Loin de là. Les pays de l’est européen se sentent oubliés. C’est le sentiment de la Première ministre estonienne, Kaja Kallas. L’adepte du verbe haut l’a dit crûment au site « Politico » il y a quelques jours. « Il est temps de mettre des personnes » issues des pays de l’Est aux « postes de premier plan » . « Nous sommes membres de l’Otan et de l’Union européenne depuis dix-neuf ans. Avons-nous des gens pires que les vieux Européens ? Je pense que la réponse est que non. » Autre hiatus : cet attelage ne tient aucunement compte du bouleversement en cours au niveau politique. Or, aujourd’hui, élection après élection, les conservateurs et l’extrême droite ont le vent en poupe dans plusieurs pays. Ils sont à la tête de trois gouvernements en Europe et non des moindres (Italie, Pologne, Hongrie) et apparaissent comme des faiseurs de rois dans plusieurs autres notamment en Finlande, Suède, voire en Belgique. Eux aussi pourraient réclamer un poste ou jouer les trouble-fêtes.

 

Dernière interrogation : que pense la France ? L’avis de Paris est nécessaire. Or, personne n’a encore sondé ni percé ce que voulait Emmanuel Macron. Le principal décideur en la matière. Soutenir Ursula von der Leyen serait possible. Mais Paris réclamera une compensation, concrète sur un autre poste. Faites vos jeux… 



10/05/2023
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