3750-Proportionnelle, le retour d’un serpent de mer 3 posts
Proportionnelle, le retour d’un serpent de mer
C’est donc dans une Assemblée sans majorité que le sujet
de la proportionnelle aux législatives va faire son retour.
Et ce, à l’initiative de François Bayrou, qui recevra dès
aujourd’hui les chefs de parti. On le sait, le Premier ministre
est un fervent partisan de ce mode de scrutin, censé favoriser
une plus grande représentativité du corps électoral.
Seulement, ressortir ce serpent de mer de notre vie politique dans
un Hémicycle aussi fragmenté semble presque anachronique. Alors
que les législatives de 2022 n’ont offert à Emmanuel Macron qu’une
majorité relative, celles de l’été 2024 consécutives à la dissolution,
l’ont tout simplement privé de majorité, tout comme les autres
forces politiques. Les Français n’ont pas eu besoin de la proportionnelle
pour l’appliquer à la lettre. Et le résultat de 2024 est
d’autant plus significatif que les électeurs se sont fortement
mobilisés.
Mais à l’arrivée, il y a aussi l’immobilisme. Sans majorité,
pas de grande réforme. C’est notre quotidien depuis
bientôt un an. Et se profile désormais la
perspective d’un quinquennat inutile. Quant à la promesse selon
laquelle la proportionnelle favoriserait la culture de la coalition,
qu’il soit permis d’en douter. Le Nouveau Front populaire n’a pas
passé l’hiver. Quant au bloc central, il n’a de bloc que le nom.
Il n’empêche. Si offrir une meilleure représentativité des sensibilités
s’entend, surtout dans cette période où la défiance domine, encore
faut-il parvenir à un consensus. Le MoDem et le RN y sont favorables,
la gauche n’est pas alignée, les macronistes non plus, et la
droite n’en veut pas. Sans compter qu’il faudra trouver aussi la
bonne formule. Les listes devront-elles être départementales ou
régionales ? Quid des circonscriptions et de l’ancrage local ?
La partie est donc loin d’être gagnée. Mais en rouvrant ce dossier,
François Bayrou renoue surtout le dialogue avec le RN. Lequel agite
toujours la menace d’une motion de censure. Sous cet angle, la
proportionnelle a donc tout du terrain d’entente idéal, sinon de la
monnaie d’échange. Or, ce sujet ne peut être l’antivenin d’une potentielle
censure. Et encore moins l’heureuse assurance-vie de partis
politiques en mal de financement ou soucieux de leur pérennité.
La situation actuelle de l’Assemblée ne cesse de le rappeler : sans
majorité, il n’y a pas d’autre politique possible que celle des petits
pas, des marchandages et des charmeurs de serpent. Institutionnaliser
le risque de l’ingouvernabilité doit bien se mesurer.
Jefferson Desport édito Sud-ouest