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Municipales 2026 : dernier crash-test avant la présidentielle

Article de Noa Bloch
 

 

 

Dépouillement des bulletins de vote après le premier tour des élections municipales de Bordeaux (Gironde), le 15 mars 2020.© Thibaud Moritz/Abaca

Cela n'était pas arrivé depuis près d'un quart de siècle. À un an de la présidentielle, les municipales de mars 2026 seront bien plus qu'un scrutin local : un test grandeur nature pour les partis, leurs alliances, leurs stratégies, et leurs candidats. Le dernier vote avant la grande bataille pour l'Élysée, sauf si le président Macron décidait, entre-temps, de dissoudre l'Assemblée.

 

Ces municipales seront un réel indicateur, un crash-test avant 2027. Ce que confirment spécialistes de l'opinion et politologues. « Il faudra suivre le niveau d'abstention, le degré de rejet ou de soutien vis-à-vis du bloc macroniste, mais aussi les rapports de force internes à la gauche », préconise Jean-Yves Dormagen, fondateur de l'institut de sondage Cluster17. « Le dernier scrutin avant une présidentielle est important, il ne faut pas sous-estimer son poids », abonde Frédéric Dabi, directeur général de l'Ifop.

Un scrutin « plus illisible que jamais »

L'histoire le prouve : avant le séisme de 2002, Lionel Jospin avait trébuché aux municipales de 2001, plombé par une « forêt de défaites ». Vingt-cinq ans plus tard, dans quelle mesure un tel scénario pourrait-il se répéter ?

« C'est toujours facile de réinterpréter un événement après coup, mais, en 2001, la gauche perd énormément de villes, ce qui accélère la chute de Jospin », rappelle Frédéric Dabi. Après quatre ans de cohabitation, la gauche au pouvoir perd nombre de villes.

Même les ministres en place sont battus : Dominique Voynet à Montreuil (Seine-Saint-Denis), Jean-Claude Gayssot à Béziers (Hérault), Pierre Moscovici à Montbéliard (Doubs). Quelques mois plus tard, le Premier ministre se lance dans la bataille présidentielle, convaincu qu'il sera au second tour. Il termine troisième derrière Jacques Chirac et Jean-Marie Le Pen.

« Ces élections intermédiaires sont souvent défavorables au camp au pouvoir et plutôt favorables aux oppositions », relève Jean-Yves Dormagen. Mais, à l'ère post-clivage gauche-droite, la donne a changé. Qui incarne le pouvoir aujourd'hui ? Qui porte l'opposition ? « Avec la tripartition du paysage politique depuis les législatives de 2024, ces municipales s'annoncent plus illisibles que jamais », souligne le dirigeant de Cluster17.

 

« Le RN est une machine présidentielle, pas locale »

Les municipales obéissent à leur propre logique : les électeurs ne votent pas de la même manière selon le scrutin. Aux municipales, « on choisit une équipe, un maire, un bilan, plus qu'une ligne nationale », tandis que « la présidentielle, ce n'est pas un parti, c'est une incarnation », note Frédéric Dabi, de l'Ifop.

Jean-Yves Dormagen renchérit : « Les Français savent distinguer ce qu'ils apprécient localement de ce qu'ils refusent nationalement. » Le cas d'Édouard Philippe en est l'exemple parfait : « On peut être très content de lui à l'échelle municipale et voter pour un candidat de gauche, du RN ou du bloc central à la présidentielle, parce que ce n'est pas la même chose. »

Largement réélu au Havre en 2020, localement apprécié, Édouard Philippe voit pourtant sa ville voter massivement à gauche à la présidentielle deux ans plus tard. Un résultat qui s'explique par un fort héritage communiste dans la ville portuaire.

À l'inverse, le RN prospère à chaque présidentielle mais reste faible localement. « Le RN est une machine présidentielle, pas une machine locale », analyse Jean-Yves Dormagen. « Le RN a un fort potentiel dans pas mal de villes, mais reste à savoir s'il peut le convertir en victoires municipales. » Le parti peine à constituer des listes, n'a pas ou peu de partenaires pour nouer des alliances et souffre d'un déficit de crédibilité.

« Un espace d'expérimentation »

Aux municipales, les alliances sont la règle : le centre s'allie, par exemple, avec la gauche ou avec la droite selon les villes. « Dans les différents camps, ces municipales vont être une des clés des logiques d'alliances et des stratégies d'anticipation de la présidentielle », souligne le fondateur de Cluster17.


« On voit des configurations très diverses qui prennent forme, y compris des alliances entre Renaissance, Horizons et le PS dans certaines grandes villes », complète Frédéric Dabi. Alors qu'à la présidentielle chacun veut porter ses propres couleurs : « On n'imagine pas un candidat unique entre Édouard Philippe, Bruno Retailleau, Gérald Darmanin ou Gabriel Attal. Les ego sont trop importants. »

Jean-Yves Dormagen le confirme : « On peut avoir des alliances locales à géométrie variable, mais cela brouille l'interprétation des résultats et rend l'élection difficile à lire au niveau national. » Car la présidentielle reste un scrutin à part, « un moment de clarification », souffle-t-il, là où « les municipales sont un espace d'expérimentation et d'alliances ».

Sanction ou soutien à l'égard du bloc macroniste

Pour la gauche, ce scrutin sera un moment de vérité : le PS conserve un réseau solide d'élus locaux, mais « on ne sait pas si cela peut encore se transformer en force présidentielle », rappelle Frédéric Dabi, notamment face à LFI qui, « après avoir fait l'impasse en 2020, pourrait chercher à s'implanter ou à gagner des villes ».


De l'autre côté, les Républicains espèrent profiter d'un centre affaibli pour regagner des villes, tandis que le bloc central se prépare à tester son socle. « Ces municipales permettront de mesurer le niveau de sanction ou de soutien à l'égard du bloc macroniste », assure l'analyste de l'Ifop. Elles diront également si le RN parvient enfin à transformer son poids national en conquêtes locales.

Ces municipales « ne seront pas simples à interpréter », prévient Jean-Yves Dormagen, mais elles diront beaucoup : sur l'état de l'opinion, sur la capacité des partis à s'allier ou non, sur la puissance de rejet des sortants, sur les nouveaux rapports de force à gauche comme à droite. « Elles vont donner une ambiance et une tonalité à la campagne. » À un an de l'échéance suprême, elles feront office de répétition générale



21/07/2025
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