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« Mon Dieu, protégez-moi de mes amis»
Avant même que Donald Trump ait pris les rênes de son pays,
la coupe est déjà pleine pour l’Europe. « Mon Dieu, protégez-
moi de mes amis, mes ennemis, je m’en charge », écrivait
Voltaire. C’est la situation précise dans laquelle se retrouvent
les Européens, obligés de parer les menaces et les ingérences
grossières du tandem Trump-Musk alors que la menace militaire
russe et la rivalité économique avec la Chine devraient mobiliser
toute son énergie et celle des Américains.
On ignore encore si la notion de « famille occidentale » est à ranger au
magasin des antiquités, mais une chose est sûre : elle n’a strictement
aucun sens pour le revenant de la Maison-Blanche et son lieutenant
libertarien cousu d’or. Ivres de leur succès de novembre dernier, ils
ont dégainé l’artillerie lourde pour abattre ce que l’Europe incarne de
plus redoutable à leurs yeux : sa volonté de défendre un monde
dans lequel on veut encore réguler la loi du plus fort.
On l’aurait parié : Elon Musk, après avoir traîné dans la boue
le chancelier allemand et le Premier ministre britannique,
est tombé à bras raccourcis sur le « tyran de l’Europe »,
à savoir Thierry Breton. Le Français a beau avoir quitté
son siège de commissaire européen, il continue de personnifier
ce que le gourou du réseau X déteste par-dessus tout : la
modération des contenus et la mise à l’amende des ingénieurs du
chaos.
Musk a beau peser 400 milliards de dollars, il craint comme la peste le
pouvoir régulateur de Bruxelles. Place donc à l’intimidation, à l’ingérence
et à la subversion. Jouant les États nationaux contre l’Union et
l’extrême droite contre les modérés, Trump et son sniper ont pour
projet de briser l’unité des alliés pour les dominer et les manipuler au
mieux de leurs intérêts néo impériaux. Et à vrai dire, la stratégie de la
zizanie peut marcher, si on en juge par la cour éhontée que leur fait
l’Italienne Giorgia Meloni, sans en référer à ses partenaires.
Les Européens sont prévenus : leur politique étrangère sera aussi
difficile à mener avec Washington qu’avec Pékin et Moscou. Peut-être
même plus difficile. C’est décevant et inquiétant à plus d’un titre, mais
c’est la réalité des quatre ans qui viennent, et peut-être même au-delà.
Le mieux est par conséquent de ne pas tabler sur un retour des
bonnes manières transatlantiques et de solidifier par tous les moyens
le bloc européen. Car dans le monde des « Trusk », le mot coopération
ne fait plus partie du vocabulaire.
Christophe LUCET édito Sud-Ouest