3432-Mélenchon et la «forfaiture» 1 post
Depuis l’ouverture de discussions entre la gauche et le gouvernement, l’extrême-gauche crie à la trahison. Pour une raison simple : si un compromis est trouvé, la stratégie de LFI échouera. Donc, si l’on en croit LFI, les socialistes, les communistes et les écologistes, commettent une « forfaiture » en négociant sur la réforme des retraites « dans le dos du Nouveau Front Populaire ». Quel scandale en effet ! Faute de pouvoir mettre en oeuvre leur projet, puisque la gauche n’a pas la majorité, ces trois partis, sans participer à un quelconque gouvernement, cherchent à améliorer la réforme dans l’intérêt des Français et, en priorité, des plus modestes d’entre eux. Double scandale ! Ces négociations sont publiques, et elles peuvent aboutir à un texte plus juste, en suspendant l’application de la réforme et en ouvrant une discussion tout aussi publique avec les partenaires sociaux pour élaborer un système de retraite à la fois socialement plus acceptable et financièrement équilibré. Jusqu’où iront-ils dans l’ignominie ? « Forfaiture ». L’étymologie du mot est intéressante : la forfaiture, à l’origine, désigne une violation du serment féodal qui soumet un vassal à son suzerain. Le terme est donc bien choisi : PS, PCF et Verts, les vassaux de la gauche, auraient manqué à leur suzerain, Jean-Luc Mélenchon. Voilà qui reflète parfaitement la vision de l’Union de la Gauche défendue par LFI : une alliance où tous sont égaux, mais où LFI l’est beaucoup plus que les trois autres. Et où toute déviation hors de la ligne fixée par les Insoumis est immédiatement taxée de trahison, de déloyauté, de crime de lèse-majesté. Cette ligne, en fait, ne porte pas sur la réforme des retraites, mais sur une stratégie plus vaste qui vise à rendre le pays ingouvernable pour renverser le président de la République. Dans ce cadre, ce que dit LFI sur les retraites n’a pas grande importance : en tout état de cause, quelles que soient les concessions obtenues par les partis de gauche, l’extrême-gauche les jugera insuffisantes, négligeables, trompeuses. Pire : nuisibles par définition, puisqu’elles risquent de mettre un obstacle sur la route que le leader LFI croit voir s’ouvrir vers l’Élysée. Pour les Insoumis, il ne faut surtout pas améliorer la réforme en faveur des travailleurs, mais attendre le grand soir électoral qui verra Jean-Luc Mélenchon monter sur le trône. Ils ne veulent rien pour les travailleurs, parce qu’ils veulent tout pour eux-mêmes. Illusion dangereuse au demeurant : en cas l’élection présidentielle prochaine, c’est Marine Le Pen qui part grande favorite. Comme le dit fort bien Olivier Faure « La gauche du tout ou rien, c’est la gauche du rien ». Alors qu’il est possible, en réduisant l’âge pivot, ou bien en le supprimant et en négociant sur les annuités, ou encore en prenant mieux en compte la pénibilité (entre autres possibilités), de rendre la réforme plus favorable aux classes populaires. C’est la différence historique entre les deux gauches : les réformistes font des réformes, les révolutionnaires ne font jamais la révolution. La première améliore, pas à pas, la condition des travailleurs ; la seconde, qui occupe le ministère de la parole (ou de l’insulte), ne fait rien, sinon accuser la première de trahison.Mélenchon et la «forfaiture»