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Le PS pris à contrepied

par Laurent Joffrin | publié le 26/06/2025 Le Journal.Info
 

En déposant une motion de censure avant même de connaître le sort définitif de la négociation en cours sur les retraites, les socialistes se sont exposés à un pas de clerc quelque peu ridicule.

 

Laurent Joffrin

Ils ont l’air un peu benêts, les socialistes. Voulant croire que les négociations sur les retraites se soldaient par un échec irrémédiable, mais souhaitant surtout adopter une posture d’opposants sans concessions pour ne pas laisser la France insoumise seule sur ce créneau, ils ont déposé une motion de censure hier matin. Deux griefs motivaient cette décision : l’absence de toute avancée tangible à la fin du « conclave » auquel ils avaient consenti ; le refus de François Bayrou de revenir devant le Parlement pour discuter des amendements à la loi de 2023.

Las ! Plus malin et plus opiniâtre qu’on le dit souvent, le Premier ministre de tenir hier après-midi une conférence au cours de laquelle il a satisfait, en grande partie tout du moins, les demandes du PS, ce qui prive leur motion d’une bonne partie de sa pertinence. Il souhaite ainsi intégrer dans la loi les points d’accord dégagés par les syndicats et le patronat, et non plus retomber seulement sur le texte initial. Il actera ainsi une augmentation des pensions des mères grâce à un mode de calcul plus favorable et un abaissement de l’âge pour partir à la retraite sans décote de 67 à 66,5 ans… Il souhaite aussi donner plus de responsabilité aux partenaires sociaux dans le pilotage du régime de retraites privé, sur le modèle de la gouvernance des retraites complémentaires Agirc-Arrco. Enfin, sur le point qui achoppe – les modalités de prise en compte de la pénibilité dans le calcul des annuités – il assure pouvoir trouver une « voie de passage » qui se rapprocherait des demandes syndicales. Le tout assorti d’un éloge appuyé de la CFDT et d’une promesse de débat au Parlement sur tous ces points.

Rien ne dit pour l’instant qu’il parviendra à ses fins. Mais s’il aboutit à un texte de compromis, le PS aura du mal, comme il le fait aujourd’hui, à parler d’un simple « enfumage ». Ce qui pose une question simple : pourquoi les socialistes ont-ils voulu à toute force déposer leur motion de censure alors que la partie n’était pas tout à fait jouée ?

La réponse jette une nouvelle fois une lumière crue sur leur posture. On craint en effet d’y voir l’éternel complexe des réformistes vis-à-vis de la gauche radicale, qui continue à juger ces avancées dérisoires et à exiger l’abrogation totale de la réforme. Comme si la crainte du « qu’en dira-t-on ? » militant était encore une fois plus forte que la satisfaction de voir le texte amélioré, ne serait-ce que partiellement par rapport à la loi en vigueur, ce qui pourtant justifierait la démarche adoptée au départ dans un souci de recherche du compromis.

Le résultat du congrès, qui a donné l’avantage aux tenants d’une ligne plus radicale et l’approche des municipales, où une partie du PS souhaite en fait renouer des alliances avec la gauche radicale, expliquent ce raidissement, bien plus que la défense de l’intérêt des futurs retraités. De même le retour à un âge pivot de 62 ans, exigé par Boris Vallaud dans son discours expliquant la censure, semble désormais bien anachronique, quand de multiples projections financières laissent prévoir un déficit persistant du système et quand la CFDT, premier syndicat de salariés, adepte d’une ligne responsable, a envisagé d’accepter un âge de départ à 64 ans, nettement plus réaliste que la demande socialiste. Qui ne voit dans ce revirement du PS une rechute idéologique qui l’éloigne à nouveau de son rôle historique de parti de gouvernement ?

Laurent Joffrin



27/06/2025
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