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« C'est passé vite »  : le PDG de Figeac Aero quittera bientôt son fleuron aéronautique

Dans un entretien exclusif à La Tribune, Jean-Claude Maillard, à la tête de Figeac Aero depuis 36 ans, revient sur son parcours dans l’industrie aéronautique alors qu’il passera la main avant fin 2028. Mais avant de céder son entreprise à une nouvelle génération d'industriels, il n'entend pas se reposer sur ses lauriers et passe à l'offensive sur le secteur de la défense.
 
Florine Galéron
Jean-Claude Maillard, PDG de Figeac Aero, lors du dernier Salon du Bourget.
Jean-Claude Maillard, PDG de Figeac Aero, lors du dernier Salon du Bourget. (Crédits : Florine Galéron)

EXCLUSIF. Au mois de juin dernier, Jean-Claude Maillard prévenait : ce serait « son avant-dernier ou son dernier » Salon du Bourget. L'emblématique PDG de Figeac Aero, aujourd'hui âgé de 68 ans, a dévoilé au printemps son souhait de céder l'entreprise qu'il a fondée en 1989. À l'époque, l'ingénieur d'à peine une trentaine d'années travaille pour Ratier-Figeac, équipementier de premier rang, lorsqu'il décide de créer sa propre société dans le Lot. « J'ai commencé au bon moment en comprenant que les donneurs d'ordre, alors déraisonnablement intégrés, allaient devoir sous-traiter et davantage acheter que produire. Ce que je n'avais pas anticipé, c'est que le marché allait autant se développer », confie-t-il à La Tribune.

Profitant de cette vague, Figeac Aero connaît une croissance fulgurante, passant de 19 millions d'euros de chiffre d'affaires en 2000 à 447 millions en mars 2020 et devenant ainsi le premier sous-traitant aéronautique en Europe. Après le cataclysme du Covid, qui divise par deux son chiffre d'affaires, le fabricant de pièces aéronautiques voit le bout du tunnel. Figeac Aero atteint sur le dernier exercice une chiffre d'affaires de 432 millions d'euros, avoisinant son niveau d'avant crise (447 millions en mars 2020).

Les perspectives à moyen terme du groupe, qui emploie plus de 3 500 personnes dans le monde, sont florissantes. Figeac Aero vise un chiffre d'affaires supérieur à 600 millions d'euros, soit près d'un tiers de plus que son pic historique de 2020, un Ebitda à 100 millions d'euros et un flux de trésorerie disponible (free cash flow) supérieur à 60 millions d'euros par an, soit quasiment le double du niveau atteint sur le dernier exercice. À cela s'ajoute un important plan de désendettement, à l'horizon 2028. C'est également à cette échéance que Jean-Claude Maillard prévoit de quitter l'entreprise :

« C'est passé vite. Quand on est occupé à réaliser un projet, on pense déjà au prochain, ce qui accélère le temps qui passe. Mais je suis fier de la qualité des produits qu'on arrive à mettre sur le marché. Figeac Aero est une belle société avec un bon niveau de rentabilité et encore de grandes perspectives de croissance », analyse le dirigeant après avoir passé quasiment quarante années à la tête de l'entreprise qu'il a fondée.

Nouvelle vague d'actionnaires indiens

D'après les informations de La Tribune dévoilées en mars dernier, Figeac Aero mène depuis plusieurs mois des discussions avec le groupe indien Mahindra. Ce passage sous pavillon indien d'un fleuron aéronautique français ne serait pas une première. Il y a tout juste un an, le sous-traitant AD Industries était racheté par le groupe indien Motherson et, début juin, le basque Lauak a annoncé être entré en négociations exclusives avec l'indien Wipro pour la vente de la majorité de son capital.

Le dirigeant lotois est intransigeant : il ne commente pas les négociations en cours avec de potentiels acquéreurs étrangers. Il accepte en revanche de revenir sur les profonds bouleversements de l'actionnariat de l'industrie aéronautique en quatre décennies :

« Dans la supply chain, j'ai connu trois types d'actionnaires. Dans les années 1980 jusqu'aux années 2000, les actionnaires étaient les fondateurs de la société ou leurs enfants. C'étaient des techniciens qui avaient déjà fabriqué des pièces d'avions dans une autre entreprise. À partir des années 2000, certains d'entre eux ont vendu leur capital à des financiers.

La troisième vague d'actionnaires actuelle est composée d'industriels, dont nombre d'entre eux viennent d'Inde, qui ont réussi souvent dans l'industrie, notamment automobile. Ils ont de l'argent et sont complètement bluffés par les perspectives offertes par l'aéronautique sur le long terme. »

Avant de poursuivre : « L'aéronautique est une industrie avec 5 % de croissance moyenne annuelle 'sans rien faire' en quelque sorte. Un dirigeant, avec une stratégie plus offensive pour aller chercher des parts de marché, peut atteindre 10 % à 20 % de croissance. D'ailleurs, Figeac Aero a enregistré une croissance de 23 % par an sur la période 2010-2020. »

Jean-Claude Maillard ajoute que les grands donneurs d'ordre aéronautiques « aiment ces investisseurs parce que l'Inde est un gros débouché pour eux que ce soient en termes d'avions civils ou militaires » : « On rappelle que Dassault vend beaucoup de Rafale en Inde. Les sociétés indiennes ont de l'argent pour investir et des capacités de production quasiment sans limites et pas chères. »

Alors que plusieurs voix dans la filière se sont élevées au printemps dernier face au « risque à terme de voir des groupes indiens maîtriser la fabrication des aérostructures d'avions », le dirigeant lotois considère que « les règles de pérennité des sociétés, à savoir être sur un marché porteur avec un gros potentiel technique et industriel, restent les mêmes ».

Fidèle à ses principes, Jean-Claude Maillard n'hésite pas à faire cavalier seul quand il le juge nécessaire et ne s'implique pas dans toutes les instances de la filière, ce qui peut agacer. Surnommé par certains « le seigneur de Lot », en raison de son poids dans l'économie locale, il a su rester proche de ses collaborateurs et remet chaque année en mains propres les médailles du travail aux salariés avec plus de vingt ans d'activité professionnelle. Une personnalité clivante que le dirigeant assume parfaitement : « C'est bien résumé », lâchera-t-il au cours de l'entretien.

 

Des usines pour la défense

Au-delà de son changement de capital et avant son départ, Jean-Claude Maillard prépare un dernier mouvement stratégique. Figeac Aero s'apprête à prendre un grand virage vers le secteur de la défense. « Avec le démantèlement du bloc de l'Est, dans les années 1990, nous avons considéré que la menace avait disparu et que nous n'avions plus besoin de nous armer. La guerre en Ukraine a révélé que le risque était toujours là. Les États européens ont décidé de s'équiper. Figeac Aero souhaite fortement développer sa capacité de production à destination de la défense », informe le dirigeant.

 

Alors que la région Occitanie a annoncé un plan de 200 millions d'euros à destination des industriels de la défense, Figeac Aero se veut offensif dans cette réorientation stratégique. « Je voudrais des usines dédiées à la défense au sein de mon groupe, soit en mobilisant des sites de production existants, soit en construisant une autre usine », explique le PDG de Figeac Aero. Des discussions sont engagées avec la Région Occitanie pour faciliter l'émergence d'une telle usine.



20/07/2025
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