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Christophe Lucet
Le Liban sous respirateur artificiel
Sur le plan financier, la conférence sur le Liban qui se tenait à
Paris ressemble à un succès bon à prendre. Près d’un milliard
de dollars a été promis - surtout par les pays occidentaux -
pour venir en aide aux 800 000 civils libanais chassés de chez
eux par les frappes israéliennes visant le Hezbollah, et qui errent au
pays du Cèdre quand ils ne trouvent pas de refuge.
Politiquement, en revanche, le chat est maigre. 70 nations avaient
certes répondu à l’appel d’Emmanuel Macron, mais le niveau des
délégations, notamment parmi les pays arabes de la région, était modeste.
Et l’absence des Israéliens et des Iraniens, parties au conflit,
rendait incantatoire l’appel au cessez-le-feu immédiat tant au Liban
qu’à Gaza. Le pilonnage israélien sur le Hezbollah et les accrochages
au sol entre Tsahal et la milice chiite se sont d’ailleurs poursuivis
comme si de rien n’était.
Faut-il désespérer de voir s’interrompre l’engrenage guerrier
alors que l’Américain Antony Blinken repartait d’Israël une
nouvelle fois bredouille malgré onze navettes dans la région
depuis le 7 octobre 2023 ? Un fil, ô combien ténu, semble renoué
avec ce qui reste d’état-major au Hamas après la mort de son chef
Sinouar. Mais en admettant que lamilice palestinienne lâche du lest
sur la libération des derniers otages,l’intransigeance de Netanyahou
rend un accord bien théorique.
En vérité, tout semble figé dans l’attente du verdict de l’élection américaine
du 5 novembre. Les États-Unis, qui restent la seule puissance à
même de peser sur l’issue du conflit, retrouveront peut-être alors une
marge de manoeuvre. En attendant, l’initiative de la France, si souvent
décrite comme impuissante mais qui garde une influence à Beyrouth,
a un double intérêt : rappeler l’urgence de ne pas faire du Liban sud un
autre Gaza, et offrir un chemin hors de l’impasse.
Une mesure retient l’attention : celle d’offrir à l’armée libanaise les
moyens de faire enfin, avec les casques bleus de la Finul, ce que la
résolution 1701 des Nations Unies lui demande de faire depuis dixhuit
ans : tenir le sud du Liban en lieu et place du Hezbollah qui s’y est
incrusté, et dont l’affaiblissement actuel offre une opportunité qui
pourrait ne pas se retrouver de sitôt.
Mais il reste une condition à remplir : l’élection du président que le
Liban attend depuis deux ans et sans lequel la souveraineté libanaise
est un mirage. Or convaincre les factions libanaises d’enterrer leurs
sempiternelles querelles ne sera pas le plus facile.