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Jean-Luc Mélenchon, promoteur involontaire de la ligne Glucksmann

 

 

 

Absent du Parlement français et laissant finalement Manon Aubry mener la liste des Insoumis aux élections européennes, Jean-Luc Mélenchon a, par une tactique habituelle chez lui, créé un affrontement défavorable avec le Parti socialiste (PS). L'élection était préoccupante pour La France insoumise (LFI); elle pourrait s'avérer fatale à Mélenchon.

Problème pour ce dernier: tout le processus politique en cours ressemble à une machine infernale posée sur la route de sa candidature en 2027. Cette machine infernale pourrait aussi torpiller La France insoumise, le vaisseau partisan confectionné par ses soins.

Contrairement à ses aspirations initiales, ce n'est ni avec le parti présidentiel ni avec le Rassemblement national que Jean-Luc Mélenchon, par l'intermédiaire de sa liste, va batailler. Son concurrent principal sera l'alliance PS-Place publique (PS-PP) menée par Raphaël Glucksmann, vraisemblable incarnation de ce sur quoi Jean-Luc Mélenchon porte sa détestation, mais également son adversaire le plus redoutable. Raphaël Glucksmann, il est vrai, semble davantage bénéficier des frasques des Insoumis que de sa ligne politique.

Celle-ci combine un évident centrisme économique et social à un atlantisme des plus ardents. Intelligemment, la liste PS-PP joue le contraste avec les Insoumis. Par sa persistante exagération, notamment celle visant à nier ses failles personnelles, Jean-Luc Mélenchon n'a pas eu la prescience de se mettre véritablement en retrait et a exposé tout son édifice politique à la déflagration.

 

L'alchimie gagnante?

 

Adopté à la longue par un PS idéologiquement exsangue, adoubé de nouveau pour cette campagne européenne, Raphaël Glucksmann a construit son identité politique sur la question de l'influence russe et, évidemment, de la guerre russo-ukrainienne. Le PS est habitué, sans en avoir conscience, à écouter placidement voire religieusement des personnalités comme Raphaël Glucksmann ou… Hubert Védrine.

Longtemps coutumier des universités de La Rochelle, Olivier Faure sait bien que, même en temps de tensions internationales extrêmes, il est possible de faire cohabiter tout et son contraire dans ses meetings, le seul impératif étant d'occuper le militant et d'éteindre toute contestation en interne. Pour le PS, «la cohérence suivra!», comme on disait jadis de l'intendance.

 

 

La lassitude de quelques  électeurs de centre gauche s'étant portés sur Emmanuel Macron a créé une disponibilité électorale relativement nouvelle.

 

 

Si la doctrine personnelle de sa tête de liste est très cohérente dans le jeu européen, le PS ne semble pas s'embarrasser d'une idéologie ferme en la matière, ni en aucune autre, publiant une première profession de foi d'une légèreté manifeste. Bref, Olivier Faure, une fois de plus, fait le pari de la sous-traitance.

 
Jean-Luc Mélenchon est devenu celui dont (presque) toute la gauche veut se débarrasser

Billard à plusieurs bandes et poker menteur

La vocation de Raphaël Glucksmann est de lutter contre la Russie de Vladimir Poutine. L'impérieux besoin du PS est de renouveler ses incarnations en n'exposant pas les plus mouillés des siens dans les diverses aventures récentes de la gauche. La ligne de Glucksmann, cohérente sur ce point depuis toujours, est de défendre libertés individuelles et droits humains un peu partout sur le globe, dans un esprit d'universalisme abstrait qui ne tolère pas, dans son discours, le «deux poids deux mesures».

Ironie de l'histoire, Manon Aubry a, quant à elle, fait sa carrière au sein d'Oxfam, une ONG anglo-saxonne. La lassitude des électeurs de centre gauche s'étant portés sur Emmanuel Macron a créé une disponibilité électorale relativement nouvelle. Le deus ex machina est arrivé tôt, et il est bel et bien venu de Jean-Luc Mélenchon qui, en centrant la vie politique sur sa personne, a lui-même réussi à braquer des pans entiers de la société française.

 

 

Bourreau électoral mandaté par le tribunal de l'opinion, rédempteur des récents péchés du PS, Raphaël Glucksmann a toute latitude pour achever son office.

 

 

Les positions de La France insoumise depuis le 7 octobre ont choqué nombre d'électeurs de gauche, sans surprendre non plus un certain nombre d'entre eux, suspicieux depuis un certain temps quant à l'ambiguïté de Jean-Luc Mélenchon sur le sujet d'Israël et de l'antisémitisme.

 

Tant par l'empressement de leur expression initiale que par la litanie des ambiguïtés très vite dévoilées, les Insoumis ont créé l'irréparable dans leurs relations avec de nombreux citoyens et en particulier nombre d'électeurs de gauche. Récemment, comme une sorte de revendication de toutes les suspicions, c'est l'action d'un député LFI de Seine-Saint-Denis visant un citoyen français de la région lyonnaise, et l'accusant publiquement de crimes commis à Gaza, qui a très largement inquiété, choqué ou révulsé beaucoup d'électeurs et donné confirmations aux yeux de certains.

La providence Glucksmann?

Entre déception d'une partie résiduelle du centre gauche macronien et rejet radical de Mélenchon, une partie de l'électorat trouve en la candidature Glucksmann une planche de salut.

À mesure que ces électorats approcheront du jour du scrutin, il se précipiteront dans une «panic room» de fortune confectionnée pour l'occasion par le Parti socialiste. Le discours de Glucksmann est évidemment loin de toute realpolitik. Il peut satisfaire, sur le plan moral et politique, aux critères communément admis dans le débat public des différents pays occidentaux depuis plusieurs décennies.

Entre brutal énoncé relatif au risque porté par la Russie et habituelle mièvrerie de bien de ses colistiers, le public retiendra surtout sa ligne à lui, Raphaël Glucksmann. 

 

 

Le choix de Glucksmann comme tête de liste est une manière discrète de tourner la page de la Nupes, épisode à l'époque quasi inéluctable selon ses signataires mais, en vérité, assez compromettant pour eux. Bourreau électoral mandaté par le tribunal de l'opinion, rédempteur des récents péchés du PS, Raphaël Glucksmann a toute latitude pour achever son office. (extraits)



14/04/2024
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