Édouard Herriot, figure emblématique du radicalisme français, a marqué l'histoire politique de la France par son engagement et sa longévité au pouvoir. Né en 1872, il commence sa carrière en tant que professeur de lycée à Lyon avant de s'engager en politique lors de l'affaire Dreyfus, un événement qui cristallise son attachement aux valeurs républicaines et à la justice. C'est en 1905 qu'il accède à la mairie de Lyon, une ville dont il sera l'incontournable maire pendant plus de cinq décennies, bâtissant une véritable légende locale. Cette longévité exceptionnelle à la tête de la troisième plus grande ville de France témoigne de son ancrage populaire et de sa capacité à incarner les aspirations de ses concitoyens.

 

Militant du Parti radical, il en devient président en 1919, une consécration pour celui qui n'a cessé de défendre les principes de laïcité, de démocratie et de réformes sociales progressistes. Son parcours politique national commence en 1912 avec son élection comme sénateur du Rhône, suivie de son élection comme député en 1919. Très vite, il est appelé à des responsabilités ministérielles, devenant en 1916 ministre des Travaux publics, des Transports et du Ravitaillement. Mais c'est surtout en 1924, à la faveur de la victoire du Cartel des gauches, que son rôle sur la scène politique nationale s'affirme pleinement. Nommé Président du Conseil par le président Gaston Doumergue, il se retrouve à la tête du gouvernement. Toutefois, malgré sa vision réformiste, il est confronté à une situation financière délicate qui précipite sa chute. Son engagement ne s'affaiblit pas pour autant, et il continue de jouer un rôle clé en présidant la Chambre des députés avant de redevenir brièvement chef de gouvernement en 1926.

 

Au cours des années 1930, Herriot reste un acteur central des grandes recompositions politiques. Après les émeutes de février 1934, il participe à un gouvernement d'union nationale sous Doumergue pour tenter de stabiliser la République. Cependant, fidèle à ses convictions, il se retire rapidement lorsque le Parti radical prend un virage plus à gauche, une orientation qu'il considère incompatible avec ses propres positions. Malgré ce désaccord, il joue un rôle décisif dans la formation du Front populaire en 1936, contribuant à l'union des forces de gauche face aux périls montants de l'extrême droite et des crises internationales.

Durant la Seconde Guerre mondiale, Herriot adopte une attitude prudente. Opposé au régime de Vichy, il choisit toutefois de s'abstenir lors du vote fatidique du 10 juillet 1940 qui confère les pleins pouvoirs au maréchal Pétain, se démarquant ainsi de certains de ses collègues tout en conservant une certaine prudence. Son retour à la vie publique après la guerre est marqué par sa présidence de la Chambre des députés de 1947 à 1954, où il œuvre pour la reconstruction démocratique de la France dans un contexte marqué par la Guerre froide et la décolonisation.

 

Édouard Herriot incarne une certaine idée de la République, ancrée dans le pragmatisme et la modération. Il a su naviguer au milieu des crises de son temps, tant économiques que politiques, tout en restant fidèle à ses idéaux de laïcité et de démocratie. Son héritage est celui d'un homme profondément attaché aux institutions républicaines, soucieux de moderniser la société française tout en préservant l'équilibre entre les forces politiques. Son parcours, de la mairie de Lyon au sommet de l'État, en fait l'une des grandes figures du radicalisme et du XXe siècle politique français.