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Des logements pensés pour le froid dans un monde qui se réchauffe – par Bruno Barlet

Le gouvernement vient d’intégrer le confort d’été dans le plan national d’adaptation au changement climatique (PNACC). Pour la première fois, la rénovation énergétique intègre la question de l’adaptation aux fortes chaleurs. Mais il faut aller plus loin. Ce plan manque encore d’objectifs concrets et d’un plan de mise en œuvre rapide.
Le problème est connu, les solutions aussi. Pour éviter que nos logements ne deviennent des bouilloires thermiques, il faut agir maintenant. Les travaux d’adaptation sont souvent simples et rapides à mettre en place : protections solaires (volets et stores), ventilation naturelle, végétalisation, gestion intelligente des apports de chaleur…
Autant de moyens d’éviter ou de retarder le recours à la climatisation, qui alourdit la facture énergétique et qui n’est pas à la portée de tous les ménages. Car si 25 % des foyers français sont déjà équipés de climatiseurs, ce sont surtout les ménages les plus aisés qui peuvent se permettre cette solution, dont l’investissement et le coût de fonctionnement sont bien supérieurs aux alternatives passives et sobres.
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Confort thermique d’été et sobriété énergétique : deux ingrédients clés de la valeur du logement. Les bénéfices économiques sont aussi évidents. Un logement bien adapté aux températures extérieures voit sa valeur patrimoniale renforcée : selon les Notaires de France, un bien mieux classé sur le plan énergétique peut se vendre entre 6 % et 18 % plus cher qu’un bien mal classé. Dans un contexte où les prix baissent et les transactions ralentissent, la « valeur verte », quant à elle, continue de progresser et devient un élément central dans la valorisation patrimoniale des logements.
A l’inverse, l’inaction aura un coût bien plus élevé : au-delà des dépenses de santé publique liées aux vagues de chaleur, elle risque de faire peser sur les ménages une double facture énergétique d’hiver et d’été.
Le confort d’été n’est pas un luxe. C’est une nécessité. Il ne s’agit pas seulement d’améliorer le quotidien des Français : il en va aussi de leur santé. En France, en 2025, on peut mourir de la chaleur dans les logements. En 2024, plus de 3 700 décès ont été attribués à la chaleur selon Santé publique France.
Les élus locaux, les collectivités et les acteurs de la construction doivent aussi prendre leur part. Il est possible d’accélérer la transition en intégrant systématiquement ces enjeux dans les projets d’aménagement, en incitant la filière du bâtiment à innover et en formant les professionnels à ces nouvelles exigences. Une meilleure prise en compte de l’adaptation pourrait être favorisée par leur intégration dans les réglementations des rénovations. Cela permettrait de garantir la prise en compte du confort d’été dans toutes les « rénovations performantes » et globales, qui peinent à adresser cet enjeu aujourd’hui.
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En parallèle, la recherche et l’innovation doivent être soutenues pour favoriser des matériaux et des technologies capables de limiter l’impact des températures extrêmes sur nos habitats. L’architecture bioclimatique, qui permet de tirer parti des éléments naturels pour optimiser le confort thermique, est encore trop peu répandue alors qu’elle offre des solutions durables et efficaces.
Les pays méditerranéens, confrontés depuis longtemps aux chaleurs extrêmes, ont développé des savoir-faire que nous pourrions utilement intégrer dans notre urbanisme. Lorsqu’on construit la ville, ou même un simple logement, on le fait pour les cinquante prochaines années, pour le confort et la sécurité des occupants.
Climatisation. Nous devons également revoir nos comportements en matière de consommation énergétique. Une climatisation excessive entraîne un cercle vicieux : plus nous refroidissons artificiellement nos espaces, plus nous consommons d’électricité, en rejetant plus de chaleur dans les espaces urbains, ce qui accroît les effets d’îlots de chaleur (élévations de température extérieure pouvant aller jusqu’à +5°C).
Il est urgent de promouvoir des solutions de protection et d’accompagner les ménages dans leur adoption. La simple utilisation de protections solaires automatisées permet de réduire de 4° à 7° (*) la température intérieure des logements, retardant et réduisant ainsi le besoin de climatisation.
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Enfin, les acteurs de la rénovation, de la construction et de l’aménagement du territoire, doivent intégrer le confort d’été comme un critère essentiel dans leurs décisions.
Le changement climatique est plus rapide que l’adaptation du parc de bâtiments. Le confort d’été ne doit plus être une option. C’est un impératif de santé publique et de résilience climatique.
* : Température maximale par rapport à une maison non équipée de protections solaires. Etude TBC pour la FFB : Analyse de la contribution énergétique des volets roulants étude normative & réglementaire, 2010.
Bruno Barlet est directeur RSE du groupe industriel français Somfy, pionnier de la maison connectée.