La fin des Jeux Olympiques signe le retour des tractations politiques. Comment entrevoyez-vous la suite des événements ? Emmanuel Macron va-t-il à nouveau chercher à temporiser avant de nommer un Premier ministre ?

Il faudrait être devin pour prédire ce qu’il se passera dans les semaines à venir. Le président de la République dispose de plusieurs options. La première est de continuer à "procrastiner", à attendre que la situation se décante pour ne pas partir à l’aveuglette. C’est une hypothèse envisageable mais qui comporterait plusieurs dangers car les acteurs politiques ont besoin d’une forme d’immobilisme. Une autre solution évidente serait de nommer un Premier ministre, puisque c’est à lui que revient la tâche de composer un gouvernement. Il est bien connu qu’Emmanuel Macron aspire à constituer l’alliance la plus large possible, en excluant LFI d’un côté et le RN de l’autre. Cela semble impossible, car pour l’instant, les socialistes sont étroitement liés aux Insoumis. On peine à voir le moindre élu PS s’écarter de cette alliance.

À droite, il n’y a simplement pas de quoi faire une majorité absolue. Donc, il faut trouver un Premier ministre qui soit de droite ou de gauche et qui résisterait à une motion de censure. C’est le problème que doit dénouer Emmanuel Macron.

Qui selon vous peut ravir Matignon ? L’hypothèse Xavier Bertrand vous semble-t-elle tenir la corde ? Quid de Bernard Cazeneuve ?

Nommer Xavier Bertrand à Matignon serait une façon pour le Président d’admettre sa défaite aux élections législatives. Cette nomination apporterait en effet une nouvelle dynamique au paysage politique car Xavier Bertrand n’est pas issu du sérail présidentiel. Il en va un peu de même pour Bernard Cazeneuve. Si ces deux profils posent quand même des défis complexes à gérer pour Emmanuel Macron, ils auraient le mérite d’échapper à une motion de censure. Leur nomination pourrait même ouvrir la voie à une première loi sur le retour à la proportionnelle, qui est dans beaucoup d’esprits. Idem pour le vote du budget.

Qu’en est-il de Lucie Castets ? Le chef de l’État semble se refuser à nommer la candidate du NFP…

Malheureusement pour elle, je pense que l’Histoire finira par l’oublier. Il est évident qu’il n’y aura pas de Premier ministre issu du Nouveau Front Populaire, car l’alliance de gauche est bien trop éloignée de la majorité absolue. De plus, il est clair qu’Emmanuel Macron ne souhaite pas la nommer. Je pense que son tour de piste prend fin.

Michel Barnier ou Jean-Louis Borloo semblent également pressentis pour succéder à Gabriel Attal. Quel regard portez-vous sur ces profils ?

C’est similaire à Xavier Bertrand ou Bernard Cazeneuve : il s’agit de personnalités respectables, ayant déjà exercé le pouvoir, qui sont un peu à la marge de leur mouvement mais pas assez pour être mis en censure… Ces hypothèses ne sont pas invraisemblables, mais ils ne sont pas non plus les favoris.

Faut-il craindre une nouvelle dissolution de l’Assemblée nationale en 2025 ?

Cette hypothèse semble tout à fait plausible. Après une année de cohabitation avec une Assemblée nationale ingouvernable, Emmanuel Macron pourrait choisir de "mettre fin à la récréation" et revenir à la case départ.

N’y aurait-il pas un grand risque pour le chef de l’État ?

Même si cela affaiblirait indéniablement sa majorité, il serait préférable pour lui qu’une Assemblée plus stable se dégage. Je crois que tous les députés perçoivent clairement qu’ils ne sont là que pour un an.