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À l’Assemblée nationale, les tartuffes de la vertu budgétaire

  • par Sophie Coignard, pour Le Point - mars 2024
Face aux mauvaises nouvelles, le gouvernement comme les oppositions se livrent à un concours d’hypocrisie confondant.
 
Au théâtre, le double comique de situation et de répétition ferait rire. Mais, dans la vraie vie, celle de la politique française, il donne aussi envie de pleurer. L'Insee a confirmé, mardi aux aurores, ce que tout le monde soupçonnait déjà : le déficit budgétaire pour 2023 est plus élevé que prévu ; il représente non pas 4,9 mais 5,5 % du PIB, avec un trou supplémentaire de 15,8 milliards d'euros. Le ministre de l'Économie et des Finances avait préparé les esprits, mais, annoncée de manière officielle, la mauvaise nouvelle a fait l'effet d'une petite bombe.
Sa déflagration résonne encore quand, en début d'après-midi, débutent les questions au gouvernement à l'Assemblée nationale. Toutes les formations d'opposition pilonnent les unes après les autres. Et le gouvernement répond par la voix du Premier ministre Gabriel Attal, du ministre de l'Économie et des Finances Bruno Le Maire et de celui des Comptes publics Thomas Cazenave.
Tous trois jouent les matamores mais sont embarrassés. Il leur devient difficile de revendiquer le monopole de la compétence gestionnaire, qualité dont s'est toujours prévalue la macronie, notamment face à Marine Le Pen et au RN. Alors ils éludent. Gabriel Attal entonne le vieux refrain de l'héritage, et rappelle la situation financière dégradée qu'ont laissée les prédécesseurs d'Emmanuel Macron.
«Depuis dix-sept ans, le déficit public de la France ne s'est trouvé qu'une seule fois sous la barre des 3 % du PIB, à savoir sous la présidence d'Emmanuel Macron, grâce à l'action de sa majorité au début de son premier mandat», ajoute-t-il à l'adresse d'Olivier Marleix, président du groupe LR.
 
La faute au Covid-19... Vraiment ?
 
La crise du Covid-19 est aussi invoquée, mais les autres pays européens ne l'ont-ils pas affrontée eux aussi ? Et sur les 1.000 milliards de dette supplémentaire accumulés depuis 2017, seul un quart environ est imputable à la gestion de la pandémie, comme le leur fait remarquer un député.
Thomas Cazenave assure que les autres pays européens ont eux aussi connu une baisse de leurs recettes fiscales liée au ralentissement de l'activité économique. Pourtant, le Portugal affiche un excédent, et le déficit public moyen dans la zone euro, estimé à 3,2 % du PIB, est bien inférieur à celui de la France.
Bruno Le Maire s'en prend à la droite, qui donne des leçons de redressement des comptes mais qui n'a pas voté la réforme des retraites et qui a voulu «introduire 127 milliards d'euros de dépenses supplémentaires dans le projet de loi de finances pour 2024».
Accuser les autres n'est jamais glorieux. Mais sur ces deux sujets, il n'a pas tort. Les discours outragés de la droite sur la dépense publique ressemblent aux envolées de Tartuffe sur la vertu du dévot.
 
Un député RN vante quant à lui les propositions économiques et financières de son parti pour sortir de l'ornière. Il oublie de mentionner la nationalisation des autoroutes, la retraite à 62 ans, l'exonération de l'impôt sur le revenu pour les moins de 30 ans, mesures qui coûtent à elles seules 75 milliards d'euros.

 

  • Socialistes et Insoumis se trouvent de nouveau unis pour défendre leur cause éternelle : l'augmentation des impôts. «C'est de recettes que nous manquons», clame le représentant des premiers, tandis que celle des seconds reproche les «cadeaux fiscaux aux plus riches et aux multinationales».
Le plus raisonnable, en apparence, est le vétéran de cette Assemblée, le centriste Charles de Courson, qui s'exprime au nom du groupe Liot. Fin spécialiste des finances publiques, il prononce un réquisitoire articulé. Puis il s'indigne que les réductions de dépenses ne fassent pas l'objet d'une loi de finances rectificative, avec débat et vote parlementaire. En théorie, il a raison. Dans les faits, il est le dernier à pouvoir formuler une telle revendication. N'est-ce pas lui qui a porté la motion de censure contre la réforme des retraites en mars 2023 ? Une motion de censure votée allègrement, dans son sillage, par LFI et par le RN. La réponse à M. de Courson est donc dans la question qu'il a posée. Lui qui siège dans l'hémicycle sans discontinuer depuis 1993 ne peut l'ignorer.�
 
 
 
  


15/04/2024
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