951-Intervention à l'Assemblée Nationale de Dominique Orliac sur le PLFSS 6 posts

   Dominique Orliac députée du Lot, au nom du groupe PRG  
 



"Mesdames et messieurs les ministres, Mesdames Messieurs les Rapporteurs, Madame la Présidente, chers collègues.

 

Ma satisfaction est grande d'intervenir pour la première fois devant une majorité de gauche pour analyser ce PLFSS 2013

 

Je relève cependant que ce budget ne compte, à mon sens, pas assez de mesures structurelles, pourtant jugées indispensables par l'IGAS et l'Inspection Générale des Finances, mais un ensemble de mesures traditionnelles, des propositions classiques d'ajustements, avec une nouvelle fois des économies sur le médicament. Nous attendions une vraie réforme structurelle notamment sur les modes de prélèvements et sur l'ensemble du dispositif.

 

Sur un montant potentiel d'économies de 1,3 milliard d'euros sur les produits de santé soit 60 % du PLFSS, il y a 1 milliard d'euros sur le médicament qui devient la seule variable d'ajustement.

Or le médicament ne représente que 20 % des dépenses d'assurance maladie qui correspondent à  40% du budget de la Sécurité Sociale. Vous l'avez d'ailleurs dit vous-même, Mr le Ministre, vous qui connaissez bien ce secteur :  « Cette année il y a un gros effort sur le médicament ».  Il est à craindre que cette décision soit à court terme et destructrice pour cette activité. Monsieur Gilles Johanet, ancien Président du Comité Economique des produits de santé, qui n'est pas un ennemi politique, a dit récemment que le médicament en matière de prix était « à l'os » et que le médicament était devenu déflateur pour les comptes de l'assurance maladie.

 

Certes il y a eu des affirmations de votre part :

 

·        Priorité à l'hôpital public

·        Pas de déremboursement de médicaments

·        Modification du calcul des recettes sociales sur tous les revenus

·        Non aux dépassements d'honoraires excessifs mais rien sur le prix du marché du remplacement médical tel qu'il s'impose aujourd'hui aux établissements hospitaliers publics dans un jeu déséquilibré de l'offre et de la demande

 

Je les approuve pleinement et j'attends leur mise en œuvre.

 

Il faut constater que malgré les contraintes fortes des derniers PLFSS  l'Assurance Maladie reste en déficit (+8,6 milliards en 2011) avec par ailleurs un ONDAM de plus en plus respecté.

 

La France maîtrise ses dépenses de médicaments, qui ne représentent que 1/5 des consommations de soins et de biens médicaux. L'IRDES et les comptes nationaux de la santé placent, dans ce domaine, la France en 5ème position derrière les USA, le Canada, la Turquie, et l'Allemagne ex-aequo avec le Japon et la Belgique.

L'information, en ce qui concerne le médicament, doit être objective, scientifique et indépendante. Ce domaine est très passionnel, comme on l'a vu avec les nombreuses réactions après la parution d'un livre caricatural et imprécis sur le sujet. Vous avez dit votre intérêt pour la mise en place d'un répertoire officiel des médicaments qui doit être mené au niveau européen, comme les AMM aujourd'hui. Nous y sommes depuis longtemps favorables.

 

J'en reviens au contenu de votre texte :

 

·        L'ONDAM à +2,7  % équilibré entre soins hospitaliers et soins de ville est positif

 

·        Pour l'hôpital, trop peu de choses même si nous approuvons la fin de la convergence tarifaire public/privé que vous avez affirmée

 

Dans ce domaine une mission globale vient d'être confiée à Edouard COUTY, dont on connaît la compétence, qui fait suite à de nombreux rapports sur l'Hôpital. Et je ne peux passer sous silence, comme députée du Lot, avec le drame que nous venons de vivre, les effets néfastes des restructurations hospitalières, la suppression des maternités de proximité que nous avons dénoncée d'ailleurs depuis longtemps. 

 

Nous avons critiqué la politique de Nicolas Sarkozy sur l'Hôpital public asphyxié faute de moyens. Une perspective de modernisation de l'offre de soins est donc nécessaire avec une diminution de l'hospitalisation classique et une véritable médecine de proximité coordonnée et sans oublier que beaucoup de promesses faites par le précédent gouvernement ne sont pas financées.

Je voulais aussi affirmer que la pérennisation de la visite collective à l'hôpital est une utopie trop idéaliste pour quiconque connaît la vie hospitalière et l'individualisme des professionnels surtout dans le domaine de la prescription.

 

Maintenant, je voudrais évoquer le point essentiel de ce projet de loi à savoir les taxations prioritaires que vous avez choisies sur le médicament.

 

J'ai relativisé tout à l'heure la part des médicaments sur les dépenses de santé, c'est une vérité.

 

En ce qui concerne les médicaments génériques, la substitution associée au tiers-payant et l'action des pharmaciens s'est avérée efficace. Mais dès 2015, les pertes de brevets ne seront pas significatives. Il y aura donc un palier. Vous n'aurez plus comme levier que la pression sur les prix avec pour conséquence la concentration des laboratoires de génériques et leur délocalisation.

 

Quant au réseau pharmaceutique (grossistes-répartiteurs et officines), ce plan va être dévastateur et mettre en péril la bonne répartition sur le territoire national et l'égal accès aux soins pour tous. L'officine doit évoluer vers une véritable profession de santé et être un partenaire essentiel pour le parcours de soin, si par contrat on lui en donne les moyens, ce n'est aujourd'hui pas le cas !

 

500 pharmacies ont fermé ces dernières années, 500 vont fermer dans les 2 ans (selon la profession). La pharmacie ne peut pas être l'éternel contributeur au déficit de l'Assurance Maladie, comme depuis 5 ans.

A l'hôpital, la diminution de 150 millions d'euros sur le budget médicament hospitalier, génère des difficultés, avec la sortie de la T2A de certains  médicaments surtout en oncologie. .. Avec des disparités de traitement dans un même hôpital ou entre hôpitaux.

 

Pour couronner le tout, avec l'article 50 vous sacrifieriez 4000 pharmacies détruisant ainsi proximité et maintien des officines dans les zones fragiles, avec un montage donnant au marché et aux marchands la distribution des médicaments dans les EHPAD. Vous prenez, Madame la Ministre, une lourde responsabilité de sécurité sanitaire pour ces malades dans les EHPAD, en rendant caduque l'acte global pharmaceutique reposant sur la validation des prescriptions suivie de la dispensation vers les unités de soins. Cette disposition va à l'encontre de la sécurisation de la prise en charge médicamenteuse des patients.

Pour ma part, je défendrai un amendement de suppression de cet article.

 

Le projet de modernisation de notre système de santé présente des avancées que nous approuvons comme :

 

·        La rémunération au forfait des équipes de soins de proximité pour la prévention, l'éducation thérapeutique et le dépistage

·        Le recrutement de 200 praticiens locaux de médecine générale dans les zones fragiles

·        L'expérimentation d'un parcours de soins pour les personnes âgées

·        L'indemnisation à 100 % de l'IVG

·        L'extension des AMM par l'agence nationale de sécurité du médicament, cela clôturera le monopole coûteux d'un médicament dans la DMLA. D'ailleurs, en ce qui concerne l'ophtalmologie, il est vital et urgent de trouver un cadre légal et sécurisé à une collaboration entre ophtalmologistes et orthoptistes libéraux, afin de pouvoir assurer la pérennité de la prise en charge des patients.

·        La taxe sur les boissons énergisantes par l'amendement de Gérard Bapt. J'avais déjà appelé votre attention sur les dangers de la taurine dans une question écrite.

 

Nous voudrions voir avancer sur le plan législatif et règlementaire des dossiers « santé » :

 

  • Les études médicales, tout d'abord.

Il est indispensable de valoriser financièrement les maîtres de stage en médecine générale; de développer l'aide au logement et au transport pour les étudiants en stage dans les zones rurales et semi-rurales, de favoriser le développement des Maisons et Pôles de Santé Universitaires, futurs moteurs de la prise en charge globale en soins primaires, notamment en augmentant le nombre d'enseignants de médecine générale. Des mesures doivent être prises pour développer la coopération interprofessionnelle, et ce dès la formation.

 

De façon générale, les mesures incitatives qui ont été proposées pâtissent du manque d'information qui les entoure. Aujourd'hui, 95% des internes de médecine générale déclarent ne pas connaître les aides à l'installation. Un travail de proximité doit être entrepris au niveau des ARS avec un guichet unique efficace. Les mesures coercitives, absentes du projet présidentiel, doivent être abandonnées et le retrait de l'amendement 553 à l'article 40 est un impératif.

 

  • L'exercice de la médecine générale.

Des décisions pour restaurer la confiance, pour libérer les capacités d'innovation et donner à nos jeunes et futurs confrères le désir de reprendre le flambeau sont indispensables.

 

  • D'autres dossiers essentiels : la clarification de la gouvernance de la santé avec un pilotage plus performant des ARS et la remise en ordre des agences, dont les auditions des présidents en commission ne nous ont pas convaincus.

 

  • Une vraie politique industrielle et de recherche sur le médicament.

Vous avez dit, Madame la Ministre, que l'industrie pharmaceutique ne doit pas faire payer sa mutation vers les biotechnologies par la Sécurité Sociale, mais depuis des années, malgré le Crédit Impôt Recherche, il n'a été rien fait, à la différence de nombreux pays, pour la mise en place d'une véritable politique : pour renforcer la collaboration recherche privée/recherche publique, pour une politique de prix soutenant les brevets nationaux. 

 

Cette industrie représente 7 milliards d'euros positifs en commerce extérieur (qui va si mal). Elle représentait le double il y a 3 ans, et à cela s'ajoute une perte grave de brevets nationaux. Nous sommes déjà tributaires de l'étranger pour les nouvelles thérapeutiques.

 

Enfin, nous Radicaux de Gauche, seront particulièrement vigilants sur les dossiers de bioéthique et fin de vie, qui étaient présents dans le programme présidentiel à notre demande. La réponse récente de votre ministre déléguée sur la fin de vie lors des questions d'actualité à un membre de notre groupe 2RDP, Olivier Falorni, en était assez loin et ne nous a pas du tout satisfait.

 

EN CONCLUSION

 

Nous devons répondre à l'urgence de justice sociale criante dans notre pays. Mais, nous le savons, la vraie question pour notre protection sociale, c'est aussi de retrouver une économie en expansion donc une dynamique de recettes.

 

Il est compréhensible qu'en quelques mois vous n'ayez pas pu engager toutes les réformes structurelles nécessaires, mais il est indispensable de sauvegarder notre système de santé.

 

Ce texte n'est pas encore celui que nous souhaitions. Rendez-vous avec votre majorité en 2014."






24/10/2012
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