4175-Nouveau gouvernement : la pantalonnade Retailleau
Nouveau gouvernement : la pantalonnade Retailleau
Au moins Sébastien Lecornu a-t-il tenu les délais. Avant sa prise de parole devant l’Assemblée nationale, demain, pour un discours de politique générale qui en dira long sur sa capacité à durer, le Premier ministre a donc dévoilé hier soir la liste des principaux ministres qu’il embarque dans son expédition, espérant toucher terre après les naufrages de Michel Barnier et François Bayrou.
Les enseignements que l’on peut tirer de ce casting sont doubles : les discussions de ces dernières semaines ont bien montré que l’élargissement du socle partisan n’existe pas pour le Premier ministre. Tout au long de ses 25 premiers jours à Matignon, jamais la porte ne s’est entrouverte pour le Parti socialiste. Conséquence directe, le troisième gouvernement depuis les législatives de 2024 fait la prime aux sortants et à la reconduction de "poids lourds" compatibles avec le macronisme, mais qui, finalement, n’entraînent que peu de traction dans leur sillage. À ce titre, le retour de Bruno Le Maire, ministre de 2017 à 2024, peut difficilement être analysé comme un signe de renouveau…
Autre leçon, qui pourrait carrément se retourner contre lui : pour composer son gouvernement, Sébastien Lecornu est resté suspendu tout le week-end à la décision des Républicains de prolonger leur contrat d’association avec la Macronie. L’occasion pour l’incontournable Bruno Retailleau de renforcer son poids et celui de son camp au sein d’un exécutif particulièrement fragile, lui qui est même allé jusqu’à dresser en soirée une improbable épée de Damoclès au-dessus de la tête de son Premier ministre !
Pour autant, dans l’attente du prochain épisode du psychodrame en cours, l’analyse de cette stupéfiante séquence a du mal à rivaliser avec le sentiment d’une vie politique qui, faute de majorité claire, tourne à vide depuis de longs mois. De négociations en nominations, de feuilles de route en conclave, rien ne semble pouvoir régénérer la pratique du pouvoir, ni offrir un peu d’oxygène au pays.
Pire, l’idée que nos procédures institutionnelles ne suffisent pas à amorcer un changement de cap, à tout le moins de méthode de gouvernement, vient fatalement écorner nos grands principes démocratiques. Le tout, sous le regard de Français désabusés, qui assistent impuissants, pour ne pas dire en colère, à cette pathétique agitation.
"La vie politique est une pièce de théâtre totalement décalée se jouant devant une salle vide", a récemment déclaré, dans une formule choc, le sondeur Jérôme Fourquet, fin observateur de l’état de la France. L’affiche, puis le spectacle donné hier soir auront du mal à ramener du monde aux guichets.