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Le PS à Matignon, ultime recours d’Emmanuel Macron?
Ça fait d’ailleurs déjà longtemps que les socialistes se sont habitués à vivre sous le signe de ce double procès. Entre le marteau insoumis et l’enclume macroniste.
Alors maintenant que François Bayrou vit ses dernières heures à Matignon, qu’une nouvelle vacance du pouvoir se précise, les socialistes sont-ils condamnés à servir de roue de secours à un nouveau gouvernement Bayrou bis, un gouvernement proto-macroniste ?
C’est la question que tout le monde se pose dans le landerneau politique. Et pour y répondre, il faut s’interroger un instant sur ce qu’il pourrait y avoir dans la tête du président de la République. Parce que oui, Emmanuel Macron pourrait se dire que jamais les socialistes n’oseront censurer un nouveau Premier ministre de peur de précipiter une dissolution potentiellement destructrice.
Et c’est là que le pari présidentiel pourrait se révéler aussi erroné que celui qui avait été fait le 9 juin 2024, au moment de la dissolution. Il y a énormément de socialistes qui n’acceptent pas l’idée d’avoir à béquiller un gouvernement au nom de la stabilité, gouvernement dont ils ne partagent ni l’approche, ni l’orientation politique.
Pour la plupart des députés socialistes contactés par l’Opinion, Gérald Darmanin et Sébastien Lecornu, les «Tic et Tac» de Matignon, dont les noms reviennent perpétuellement parmi les primo-ministrables, sont deux véritables chiffons rouges.
En réalité, l’identité du futur locataire de Matignon, le casting en tant que tel importe peu aux socialistes. Même un Eric Lombard, le ministre de l’Economie, ou une Catherine Vautrin, jugés peut-être plus souples à l'égard de la gauche, n’auraient pas une durée de vie à Matignon nécessairement plus importante que celle qu’a eue François Bayrou.
Ce que veulent les socialistes et en particulier Olivier Faure aujourd’hui, ce n’est pas une cogestion, ce n’est pas une union nationale ou un parfum de cohabitation, c’est une cohabitation avec la gauche.
Sur tous les tons, ces derniers jours, on entend la gauche et les écologistes se dire «prêts à gouverner». Et d’ailleurs, lors de leur grand raout de rentrée à Blois, leurs universités d'été annuelles, les socialistes ont présenté un contre-budget, une proposition alternative à celle de François Bayrou, avec un véritable choc fiscal, 26,9 milliards de recettes nouvelles, avec notamment la fameuse taxe Zucman qui vise les patrimoines supérieurs à 100 millions d’euros.
Mais aussi 31 milliards d’euros de prélèvements nouveaux si l’on inclut cette fois-ci la baisse des aides aux entreprises. En réalité, on le voit, ce contre-budget socialiste, c’est un cocktail keynésien qui s’apparente à du «LFI light».
Et si on met de côté l’irréalisme budgétaire de ce plan, on peut néanmoins comprendre les arguments brandis par les chefs à plumes du Parti socialiste. On leur a demandé de s’affranchir, de se dissocier de La France insoumise au nom d’une conception républicaine.
Ils l’ont fait au début de l’année en allant négocier un pacte de non-censure à Bercy, sous les quolibets et les railleries de Jean-Luc Mélenchon. On leur a demandé de faire passer la stabilité du pays et de permettre au pays d’avoir un budget, de faire passer tout ceci avant leurs misérables intérêts boutiquiers, ils l’ont fait !
Aujourd’hui, les socialistes estiment avoir avalé suffisamment de couleuvres. Même un François Hollande, pourtant partisan de la stabilité, estime qu’il ne peut plus suivre et votera contre la confiance à François Bayrou. C’est dire s’il y a une forme d’exaspération et une envie d’exercer les responsabilités dans les rangs socialistes.
Alors évidemment, confier les clés de Matignon à un Premier ministre socialiste n’est certainement pas l’hypothèse privilégiée dans l’esprit du chef de l’Etat. Mais aurait-il d’autres choix ?
Après avoir grillé quatre Premiers ministres de suite depuis sa réélection en 2022, après avoir tiré les cartouches Barnier et Bayrou, Emmanuel Macron pourrait peut-être considérer que sa survie politique suppose aujourd’hui de faire quelques concessions sur son bilan à la gauche, de manière à pouvoir finir son mandat à l’Elysée.
Ce serait évidemment coûteux pour son bilan. Cela mettrait probablement à mal une partie de sa politique de l’offre. Mais à la vitesse à laquelle se multiplient les appels à la convocation d’une élection présidentielle anticipée – on entendait encore mardi 2 septembre Valérie Pécresse –, le président de la République pourrait considérer que ce renversement est la condition sine qua non de sa survie politique ?