ÉDITO. Affrontements à Nîmes, Béziers et Limoges : sans repères, sans valeurs, sans limites
Ces violences qui se multiplient et se répandent à travers le pays, des "quartiers" de grandes métropoles jusqu’aux villes moyennes, donnent un sentiment d’abandon total : le citoyen qui les observe ou les subit ne comprend pas pourquoi, dans un pays apparemment favorisé comme la France, des jeunes mineurs enfilent des cagoules, se munissent de mortiers d’artifice pour tout casser et incendier, voitures, écoles, logements, commerces, jusqu’à certains commissariats. Cette violence qui s’est désormais installée dans le paysage social nous apparaît comme inéluctable, comme la conséquence presque banale d’une société sans repères, sans valeurs, sans limites. Tout serait permis, à commencer par semer le désordre, tout uniforme est un « ennemi » qu’il faut repousser, le quartier un territoire sans autre loi que celle des bandes – une poignée de jeunes violents, irréductibles, organisés, le plus souvent liés au trafic de drogue, auxquels se joignent par force d’autres jeunes, admiratifs, apeurés ou soumis. Les parents, les enseignants, les éducateurs, souvent lassés, découragés, constatent chaque jour leur impuissance. La police n’intervient souvent qu’au dernier moment, quand tout devient insupportable, et sa présence est vécue comme une provoc, un prétexte. La ville est abandonnée au chaos.
Comment stopper cet engrenage ? Comment inverser le cours de cette violence ? Comment restaurer un semblant d’ordre ? Les idées ne manquent pas bien sûr, elles se chevauchent dans les têtes, s’embrouillent des plus inutiles aux pires. Interroger le témoin d’un déferlement urbain, il en appellera à une répression sans faille, à des peines de prison fermes. Un autre voudra qu’on en finisse avec l’angélisme de la justice des mineurs, héritée d’un autre temps. Un troisième exigera un couvre-feu ou encore l’impossible maintien de CRS sur place. Celui-là s’interrogera sur le contrôle des réseaux sociaux – un contrôle, oui, mais comment ? Des politiques sont allés jusqu’à imaginer « la Légion dans les quartiers », ou, au contraire, comme aujourd’hui la France insoumise, le désarmement des polices municipales.
C’est d’ailleurs aux politiques, qui proposent et votent les lois, de prendre en charge le dossier des violences urbaines – et ils le font plus ou moins à chaque fois que l’émotion populaire déborde, avec des déclarations tonitruantes et des rajouts aux procédures les plus répressives. En vain ?
Pour qui cherche une issue satisfaisante, répondre aux violences des mineurs ressemble à un océan d’interrogations. On a seulement compris que c’est notre société d’abondance, notre mode de vie qui les nourrit, que le laxisme envers ces jeunes est un danger pour tous, qu’un changement d’attitude du monde adulte est indispensable – et qu’il ne faut plus avoir peur de prononcer des mots comme discipline, sentence, autorité et prison.