Ces bulles qui pourraient éclabousser Trump

«Yes I can. » S’il ne venait pas d’une des innombrables
personnes qu’il exècre (Barack Obama en l’occurrence),
Donald Trump pourrait récupérer le fameux
slogan de celui qui occupa la Maison-Blanche de 2008
à 2016. Son successeur se vante aujourd’hui d’avoir convaincu Coca-
Cola, la boisson qu’il engloutit à outrance, de changer sa légendaire
formule en remplaçant le sirop de maïs par du sucre de canne, matière
première qui fait la fortune de US Sugar Corporation, une entreprise
basée… en Floride, l’État où vit Trump.

Tant pis pour les agriculteurs de la « corn belt » (ceinture de maïs) qui
ont massivement voté pour lui. Peut-être les Américains comprendront-
ils un jour que ce président ne sert que ses intérêts personnels
et ceux des milliardaires. Mais il est quand même stupéfiant que, dans
une démocratie mature, une multinationale, dont le chiffre
d’affaires (33 milliards de dollars) dépasse le budget du
Kenya ou de la Tunisie, s’aplatisse devant la foucade d’un
chef d’État. Imagine-t-on le général de Gaulle faire modifier
la recette de la Vache qui rit ?

Une autre affaire, moins anecdotique, pourrait faire plus de bulles et
éclabousser le locataire de la Maison-Blanche. Son nom revient en
effet avec insistance dans le sombre et glauque feuilleton Jeffrey Epstein,
ce milliardaire découvert pendu dans sa cellule en août 2019 et
accusé d’avoir manigancé un vaste trafic pédophile international.
Rien n’indique que Trump a participé à ces orgies, mais les deux
hommes se connaissaient bien et on a enregistré la façon délicate et
romantique dont le président parle des femmes. C’est son ex-ami Elon
Musk qui a remis un dollar dans la machine à ragots.

Pour la première fois depuis son retour à Washington, Trump se
retrouve harcelé par sa base la plus enragée et la plus complotiste,
celle qu’il n’a cessé d’encourager quand il attaquait Joe Biden. Tout
était bon pour tirer la campagne vers le caniveau. Le vainqueur a
obtenu ce qu’il convoitait, pas ses électeurs au cerveau azimuté qui
veulent savoir si Epstein a été suicidé par les démocrates pour étouffer
un scandale sexuel dans lequel ils seraient évidemment compromis
jusqu’aux yeux.

Voici donc le manitou du MAGA pris à son propre piège par des vautours
qu’il a gavés de charognes et qu’il qualifie à présent de « crétins
crédules ». On sait ce qui se passe quand on secoue trop fort une
canette de Coca-Cola. Même chose avec une canette de cloaque.

    éditorial Sud-Ouest  Benoît Lasserre