Le général Macron lance sa campagne budgétaire

Sur le plan militaire, du grand art. Rien à dire. Même Clausewitz
ou Napoléon applaudiraient. Le vendredi 11 juillet, on
envoie le général Burkhard, chef d’état-major des armées,
déminer en éclaireur. Sa parole est rare, c’est normal quand
on dirige « la grande muette ». Sa parole est grave surtout. La Russie a
fait de la France son principal adversaire et la guerre de nuisance a
déjà débuté, affirme-t-il.

Le terrain médiatique est prêt, ne reste plus qu’à envoyer la cavalerie le
dimanche 13 juillet avec, sabre au clair, Emmanuel Macron au ministère
de la Défense, encadré par François Bayrou et Sébastien Lecornu.
Cavalerie ou grosse cavalerie ? L’intervention présidentielle se déroule
deux jours avant les annonces très attendues de son Premier ministre
sur les mesures destinées à baisser la dépense publique de 40 milliards
d’euros. Pourquoi d’ailleurs ne pas avoir attendu le 14-Juillet,
jour de fête nationale ? Des prédécesseurs d’Emmanuel
Macron auraient profité de la conférence de presse, tradition
bel et bien oubliée.

Non, les journalistes auraient pu contrarier ce plan sans accroc
et on risquait d’assister, comme aux Champs-Élysées avec la
Garde républicaine, à la chute d’un cavalier. Sur le fond, le chef de
l’État a évidemment raison de souligner la force obscure russe qui
menace le continent et notre liberté. Comment ne pas l’approuver
quand il assure que « pour être libre, il faut être craint et, pour être
craint, il faut être puissant ». Dans un monde idéal, on préférerait
investir dans l’éducation, la culture et la santé. Dans ce monde brutal, il
faut privilégier le kaki et le képi.

Le budget militaire devra donc atteindre les 64 milliards d’euros en
2027, soit deux fois plus qu’en 2017. Du pain béni pour le ministre
Lecornu ? Plutôt une pression supplémentaire car cet argent devra
être dépensé et bien dépensé. Notamment pour combler l’immense
retard pris par la France dans certains domaines. Et la Défense ne pèse
encore que 3 % dans l’ensemble de la dépense publique.

Reste le dernier étage du plan à faire adopter. Comment passer du
treillis L à XXL quand on serre la ceinture ailleurs. Bref, distiller l’idée
que ceux qui feraient échouer cette campagne budgétaire ne seraient
pas si patriotes qu’ils le prétendent. Cousu au gros fil blanc mais Macron
pourra dire qu’il a fait le job. Après tout, le Premier ministre, c’est
Bayrou. Et il est moins au garde-à-vous que Lecornu.

                                    Benoît Lasserre éditorial Sud-Ouest