Du beau boulot

DOMINIQUE DELPIROUX

  • DOMINIQUE DELPIROUX DDM - MICHEL LABONNE
Publié le 
Dominique Delpiroux la DDM

Vérifier le bilan comptable et changer la couche du petit dernier. Répondre en détail au mail du client et lancer le lave-vaisselle. Participer à la visioconférence avec les partenaires australiens les pieds dans une bassine d’eau fraîche par temps de canicule, petit plaisir aussi innocent qu’invisible !
C’est bien par obligation avec la crise du Covid que le télétravail a déboulé dans la vie de millions de salariés. Une vraie révolution qui a changé à la fois la vie des travailleurs et des entreprises. Trop changé. ? On dirait qu’après une période fastueuse pour le job maison, le balancier est en train de refluer du côté de l’usine, avec des patrons qui se sentent un peu trop seuls dans leurs grands open spaces. Voilà qu’ils sifflent le retour à la case bureau ! Raisons invoquées : la cohésion de l’équipe, la dynamique du groupe ainsi plus créative et… des équipes « sous la main ». On pourrait évoquer le vieux réflexe du contremaître qui fait le tour de son atelier pour vérifier qu’il n’y a pas de tire-au-flanc. Alors, dans les mois à venir, on peut s’attendre à ce que le télétravail marque le pas. Il y a peut-être aussi chez les dirigeants, un besoin de se rassurer, de garder le contrôle sur ce qui est finalement, leur bébé.
Voilà qui n’est pas du goût des employés, qui s’étaient habitués à ce rythme. Oubliées les heures perdues dans les transports. Oublié le stress du petit à récupérer à la crèche : à eux, pour une fois, la maîtrise des horloges. Une autonomie relative, car – réflexe de culpabilité ? – beaucoup s’impliquaient encore plus dans leur tâche. La crise sanitaire est passée, mais le télétravail persiste, du moins à temps partiel, un ou deux jours par semaine dans beaucoup d’entreprises. Un aménagement qui procure aux salariés une respiration jugée précieuse.
Va-t-on réduire à peau de chagrin ces temps d’autonomie ? Possible, mais le pli est indéniablement pris et l’idée du boulot à distance a fait son chemin. Elle séduit beaucoup de candidats à l‘embauche. Et parmi eux, des jeunes diplômées, dynamiques, compétents, et cultivés. Ils sont prêts à s’impliquer, mais sans sacrifier une vie de famille, des activités sportives, culturelles ou associatives. La possibilité de télétravailler devient une exigence. Alors, les employeurs qui veulent garder leurs troupes autour d’eux ne risquent-ils pas de se priver des meilleurs éléments ? Ou de démotiver ceux qui avaient pris goût à une vie moins trépidante ? Enfin, dans un pays comme la France, on entendra forcément l’argument du « recul des acquis sociaux ».
Il y en a une autre qui sera toujours favorable au télétravail : c’est notre petite planète. Chaque journée passée à la maison, c’est en moyenne 6 kg de CO2 économisés. Et ça, c’est déjà du beau boulot.