3886-Simplifier, mais il n’y a rien de plus compliqué !
Simplifier, mais il n’y a rien de plus compliqué !
Si c’était simple de faire simple, ça se saurait. « La simplification,
c’est vieux comme le monde ! », si on paraphrase une célèbre
réplique des « Enfants du paradis ». Chaque président de la
République, chaque chef de gouvernement promet un choc de
simplification. Pour employer un mot aussi abscons que ceux de Gabriel
Attal – « désmicardiser », « débureaucratiser » – lors de son discours
de politique générale début 2024, la simplification consisterait à
« décourteliniser » le pays. Salut au dramaturge Georges Courteline
qui, en 1893, caricaturait ces « Messieurs les rond-de-cuir ».
Le cuir a la peau dure. Hier, à l’Assemblée nationale, les députés macronistes
ont voté contre un texte de loi dit de simplification lancé par leur
patron de parti Gabriel Attal pendant qu’il était Premier ministre et
avant que la dissolution ne le « dématignonise ». Le processus
législatif s’est embrouillé lorsque le RN ainsi que Les Républicains,
pourtant membres du même exécutif que les troupes attalistes,
se sont emparés du projet, déjà fourre-tout, et
assené un coup de massue sur les zones à faibles émissions
(ZFE). Pour sauver ces zones pleines d’épines, voici les députés
macronistes contraints de s’opposer à ce texte issu de leur majorité,
rejoints par la gauche, y compris les Insoumis, qui ont mêlé leurs voix
aux lepénistes et à LR afin de zigouiller les ZFE.
La simplification, on en redemande ! Avec MaPrimeRénov, par
exemple. D’abord supprimé, puis seulement suspendu, ce dispositif
d’aide à la rénovation énergétique, dont les formulaires ont désespéré
bien des impétrants, est donc maintenu, avec un périmètre restreint,
par le gouvernement après la colère des professionnels du bâtiment.
L’exécutif invoquait des fraudes pour légitimer sa décision. Drôle de
prétexte. A-t-on torpillé l’Assurance-maladie alors que 628 millions
d’euros se sont évaporés dans la fraude en 2024 ? Ou le RSA avec
800 millions d’euros de détournements ? Sans doute était-il moins
sorcier de supprimer MaPrimeRénov, mais c’est compliqué ensuite de
justifier son rétablissement.
Une autre prime sortie du chapeau par François Bayrou peut-elle
simplifier le dénouement du conclave sur les retraites, rendu plus ardu
quand son promoteur a déclaré qu’on ne reviendrait pas à un départ à
62 ans ? Il eût été plus simple que le Premier ministre se tût, mais un
responsable politique qui tient sa langue, c’est difficile à trouver.
Benoît Lasserre éditorial Sud-Ouest