3781-Mieux vaut tard 2 posts
Mieux vaut tard
Qu’est-ce que le progrès ? Il y a cinquante ans, on aurait sans doute répondu : plus d’autoroutes, de logements, d’énergie, de confort. Aujourd’hui, peut-être dirait-on moins de pollution, moins de gâchis, moins de dégâts à l’environnement… sans toutefois vouloir tourner le dos à ce mode de vie que nous avons acquis. Voilà pourquoi nos concitoyens sont toujours favorables à la réalisation des grands projets, même si, « en même temps », ils ont pris conscience des enjeux environnementaux que cela peut entraîner.
Ainsi, après la dernière guerre, on a truffé nos montagnes de barrages hydroélectriques. Des villages ont été rayés de la carte, des cimetières engloutis, des souvenirs et des larmes avec. Un chagrin qui n’a guère pesé dans les décisions. Cela dit, aujourd’hui, 11 % de notre électricité vient des barrages, et nous avons d’immenses réserves d’eau disponibles. Pas si mal…
Lancer ainsi des chantiers à la hussarde n’est plus possible aujourd’hui. Depuis longtemps, on recueille l’avis des riverains, on consulte, on soupèse. Dans le même temps, la contestation de certains projets s’est élaborée. Une conscience écologique a émergé, et mené des combats. Certains légitimes, d’autres plus folkloriques, comme la célèbre épopée du scarabée pique prune qui a retardé pendant six ans la réalisation de l’autoroute Le Mans-Tours… Ces dernières années, ces protestations ont pris un tour plus radical, comme à Sivens ou à Sainte-Soline. Tout le monde ne rêve pas des mêmes choses pour demain.
Ce nouveau regard critique envers des grands travaux plombe notamment deux très vieux projets qui nous concernent. Qui, depuis plusieurs décennies, avaient été sacrifiés au profit d’autres régions. Ainsi, on parle de la LGV Paris-Toulouse depuis le milieu des années 80. Elle devait passer par Limoges et mettre 3 h 19. C’était fait, c’était signé, c’était acquis pour dans les cinq ans ! Las ! Entre-temps, Lille, Lyon et Strasbourg sont passés devant. Et pour finir, c’est Bordeaux qui décroche la ligne, torpillant la liaison directe entre la Ville rose et la capitale. Pendant ce temps, ici, c’est la navette aérienne qui fait le job : bonjour le bilan carbone.
Le deuxième projet escamoté, c’est l’autoroute Toulouse-Castres. C’est Albi, sur l’axe vers le Massif central, qui a gagné la quatre voies, il y a 40 ans, malgré la puissance économique du bassin castrais. Qu’aujourd’hui, ces deux chantiers soient lancés ne fait que réparer un retard bien injuste. Mais quatre décennies ont passé : à l’époque, pas grand monde n’aurait contesté ces travaux. Aujourd’hui, ils se retrouvent comme d’autres dans l’œil du cyclone, victimes d’une sorte de décalage temporel. Mais pour la majorité des habitants de la région, les choses sont claires : mieux vaut tard que jamais.