Bardella et Maréchal en Israël,tout sauf un détail

Voilà donc les deux eurodéputés d’extrême droite Jordan
Bardella et Marion Maréchal en Israël pour une visite de
deux jours. Et c’est tout sauf un détail. Que le président du
Rassemblement national et la petite-fille de Jean-Marie
Le Pen aient été invités par le gouvernement israélien en dit long sur le
renversement des valeurs en cours. Et leur voyage est d’autant plus
édifiant qu’ils ont été conviés à une conférence sur… l’antisémitisme. Il
faut se pincer pour le croire.

Malgré les efforts de cosmétique et les coups de peinture sur la devanture,
le Rassemblement national reste l’héritier direct du Front national.
Et cette filiation ne peut être oubliée. Parmi les fondateurs de ce
parti se trouvent Pierre Bousquet, un ancien Waffen-SS de la division
Charlemagne, des nostalgiques du régime collaborationniste de Vichy
et un certain Jean-Marie Le Pen, dont les propos antisémites ont
jalonné sa vie politique. Faut-il rappeler son « point de détail de
l’histoire » à propos des chambres à gaz ? Ou son tristement
célèbre « Durafour crématoire» ?

Toutefois, aussi édifiante soit-elle, cette arrivée de Jordan Bardella et
Marion Maréchal en Israël ne saurait s’expliquer par le seul succès de
l’entreprise de dédiabolisation menée sans relâche par Marine Le Pen.
Certes, le souci de normalisation de la fille de Jean-Marie Le Pen et sa
quête de respectabilité sont au coeur de sa stratégie. Mais cette visite
témoigne aussi de mouvements plus profonds, à commencer par les
conséquences du conflit israélo-palestinien. Alors qu’au lendemain
des massacres du 7 octobre, La France insoumise a refusé de qualifier
les tueurs du Hamas de terroristes, alors qu’elle ne cesse depuis d’accuser
Israël de génocide sur la population gazouie, la formation de Jean-
Luc Mélenchon, sous le regard du reste de la gauche, a laissé le RN
reprendre le flambeau de la lutte contre l’antisémitisme, en plus de
celui du combat contre l’islamisme.

Ce naufrage est d’autant plus inquiétant que ce déplacement du duo
Bardella-Maréchal est aussi une démonstration de force des extrêmes
droites. Des États-Unis de Donald Trump à l’État hébreu de Benyamin
Netanyahou, en passant par à la Hongrie de Viktor Orbán notamment,
elles s’affichent au grand jour, dopées à l’opportunisme le plus cynique,
chacun dans son couloir se chargeant de piétiner l’histoire. Que le
Rassemblement national ait désormais table ouverte en Israël ne traduit
pas qu’une seule perte de repères. C’est d’abord une défaite des
partis de gouvernement.

                                     Jefferson Desport edito Sud-Ouest