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Donald Trump et sa délirante croisade anti-sciences
Il n’y a pas que sa honteuse trahison de l’Ukraine et sa conception
boutiquière de la diplomatie à mettre au débit de Donald Trump.
Au point qu’on peut se demander ce qu’il aurait fait à l’égard de
l’Europe en 1944. Pas question de mélanger les époques ou de
franchir le si commode point Godwin. Non, il suffit d’écouter de nombreux
historiens (les vrais, pas ceux qui ont obtenu leur diplôme sur le
réseau X) affirmer que nous vivons un moment identique au début des
années 1930 avec une crise économique angoissante et la montée des
périls totalitaires, si ce n’est qu’à l’Est, le stalinisme s’appelle
désormais le poutinisme.
Encore faut-il commencer par croire les historiens. Et tous ceux qui,
par leurs études, leurs recherches, leurs expériences, ont acquis un
savoir, une analyse, une méthode qu’ils partagent via des livres, des
brevets ou des enseignements. Ce qu’on appelle la science et qui effraie
les tyrans parce qu’elle établit des faits, pouvant détricoter une opinion
ou un dogme, parce qu’elle développe le doute et l’esprit critique.
Quand on est, comme Trump, ovationné par des compatriotes
qui assurent que la terre est plate, que l’Homme a été créé par Dieu et
que le réchauffement climatique est une invention chinoise, quand
on préfère répandre l’idée fausse d’une vérité alternative plus crédible
que la réalité des faits, il est logique de discréditer la science et
de vouloir la faire rimer avec silence en lui coupant les vivres ou en
envisageant la suppression du ministère de l’Éducation.
Grâce à ses universités et ses laboratoires, l’Amérique a fourni aux prix
Nobel de médecine, de physique, d’économie et de chimie le plus gros
contingent de lauréats, parfois d’origine étrangère, attirés par la liberté
offerte ainsi que d’incomparables moyens financiers. America « great
again» ? Mais ce pays était déjà un géant scientifique. Des illuminés
sectaires prennent le risque de le noyer dans l’obscurantisme en éteignant
cette lumière qui brillait sur le monde.
Sous prétexte d’une sainte croisade contre le wokisme – qui n’est certes
pas un fantasme outre-Atlantique –, Trump utilise un bulldozer pour
écraser un moustique. Son remède maccarthyste sera plus funeste que
le mal. Il faut espérer que le mouvement de protestation de ce vendredi
affichera un énorme succès et, qui sait, que les conservateurs éclairés
(il en reste sûrement) comprendront que la Maison-Blanche est aux
mains d’un ayatollah.
Éditorial Sud-Ouest Benoît Lasserre