Inquiets mais résilients. Tel est l'état d'esprit des Français après cette semaine historique où l'on a vu Donald Trump traiter Volodymyr Zelensky en ennemi, Vladimir Poutine assister avec gourmandise à ce renversement des alliances, et l'Europe se tétaniser en comprenant que l'allié américain n'en était plus vraiment un. Indéniablement, notre sondage Ipsos-Cesi école d'ingénieurs-La Tribune Dimanche montre qu'un possible désengagement du président américain, sur l'Otan ou sur le dossier ukrainien, angoisse. « Le niveau d'inquiétude est très élevé, souligne Brice Teinturier, directeur général délégué d'Ipsos. En même temps, cela montre que les Français ont très bien compris le basculement qui est en train de s'opérer. »

Pour autant, et c'est là l'un des enseignements principaux de l'étude, ils refusent que la France et l'Europe baissent les bras  : deux tiers d'entre eux plaident pour la poursuite de l'appui à Kiev quand bien même les États-Unis fermeraient, eux, le robinet. Que ce soit sur la livraison d'armes, l'aide humanitaire ou même l'accueil des réfugiés, le soutien est même supérieur à celui enregistré il y a un an. « En cela, Trump est un accélérateur de solidarité, traduit Brice Teinturier. Et puis il y a une prise de conscience collective que céder face à Trump et Poutine serait une erreur, que cela nous mettrait en danger. »

Autre preuve que les Français voient la Russie et le conflit ukrainien comme des menaces qui les concernent  : sur un sujet aussi sensible que l'envoi de troupes européennes pour garantir le respect d'un éventuel cessez-le-feu, la moitié d'entre eux s'y dit favorable. « Si l'on exclut les sympathisants RN, c'est majoritaire partout », note le dirigeant d'Ipsos. C'est d'ailleurs une constante de cette enquête  : sur la plupart des thèmes, les électeurs de Marine Le Pen sont à rebours du reste des sondés. « Des années de discours conciliants à l'égard de Moscou ne sont pas sans conséquences », glisse Brice Teinturier. Malgré tout, ainsi que les sympathisants Insoumis, ils soutiennent largement l'idée d'une défense européenne si les États-Unis venaient à lâcher le Vieux Continent.