L'édito de Bruno Jeudy. Compromis Bayrou-PS, le temps retrouvé
Par Bruno Jeudy
Photo d'illustration
LTD/CYRILLE GEORGE JERUSALMI
Par Bruno Jeudy
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LTD/CYRILLE GEORGE JERUSALMI
François Bayrou en rêvait depuis ses débuts en politique. Cette semaine, le Premier ministre a trouvé les mots et les concessions suffisantes pour réunir le PS, la droite et le centre autour d'un pacte de non-censure. Après des débuts hésitants à Matignon, il a réussi son coup et déjoué les pronostics au terme d'une séquence qui pouvait être pour lui celle de tous les dangers.
Certes, ce résultat a été acquis au prix de reculs coûteux pour les finances publiques. Renoncer à relever le ticket modérateur sur les consultations médicales, enlever deux jours de carence aux agents de la fonction publique n'est pas gage de rigueur budgétaire et semble en décalage avec les propos alarmistes sur l'explosion de la dette. Mais, pour que le phénix renaisse de ses cendres, il se contraint moins au courage ! Dès lors, l'objectif de ramener le déficit à 3% en 2029 paraît peu réaliste et le Béarnais, par les promesses faites aux responsables du parti à la rose, se mue en Gascon...
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En tout cas, le chef du gouvernement est parvenu à couper le cordon entre le PS et LFI. Jean-Luc Mélenchon lui-même, si prolixe en tweets comminatoires, n'a pu que constater l'inefficacité de ses anathèmes et des invectives à l'égard d'Olivier Faure et de la direction du PS. Le leader des Insoumis devra se rendre à cette évidence que les menaces ne sont que des armes offertes à ses adversaires. Les élections municipales de 2026 risquent dans ces conditions de se révéler dévastatrices et de sceller la désagrégation définitive du Nouveau Front populaire.
François Hollande, qui a fortement pesé dans la décision du groupe PS de ne pas voter la motion de censure, n'a pas oublié qu'en 2012 l'appui du chef du MoDem avait été décisif pour son accession à l'Élysée. Cet échange de bons procédés de la part de l'ex-président n'est pas exempt de calculs. En effet, les partis de gouvernement ont compris qu'ils avaient besoin de temps pour se reconstruire et préparer l'après-Macron. LR et les macronistes ont affiché leur mauvaise humeur devant les concessions accordées par le gouvernement mais, en réalité, ne sont pas fâchés de ce gel de la scène politique. En privé, Laurent Wauquiez reconnaît l'« habileté » de François Bayrou et s'active... pour préparer 2027 comme tant d'autres (Bruno Retailleau, Xavier Bertrand, David Lisnard...).
De la stabilité à l'immobilisme il n'y a donc qu'un pas, mais les Français aspirent à un peu de répit après de longs mois d'agitation, de querelles et de cacophonie. Si le successeur de Michel Barnier a obtenu un moratoire hivernal, encore faut-il qu'il en fasse bon usage et adopte la sentence ironique de Boris Vian : « Notre temps est précieux. Perdons plutôt le vôtre. » La voie étroite dans laquelle s'est engagé le gouvernement se révèle périlleuse mais la devise latine des conjurés d'Hernani « ad augusta per angusta » (« vers les sommets par les chemins étroits ») laisse l'espoir que les gouvernants retrouvent l'élan et la force de se transcender face à un Himalaya de difficultés.
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