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Plans sociaux et décrochage économique
Les plans sociaux chez Auchan et Michelin, avec respectivement
2 400 et 1 200 suppressions de postes à la clé, frappent
des entreprises bien connues des Français. Mais pas grand
monde n’a entendu parler de Milee, sauf les 10 000 personnes
qui travaillent chez ce distributeur de prospectus publicitaires et dont
les emplois sont eux aussi menacés par une liquidation judiciaire
Bien sûr, la vie économique est faite de destructions et de créations,
mais les plans annoncés par Bibendum et par le groupe Mulliez ne sont
pas des cas isolés : ils sont le signe d’un décrochage économique plus
large. Les difficultés du puissant secteur de l’automobile, par exemple,
ont placé de nombreux équipementiers au bord du dépôt de bilan. Et
les derniers chiffres nationaux montrent une forte augmentation des
défaillances d’entreprises.
Ce marasme tient en partie à la fin des prêts garantis que l’État
avait consentis pendant la pandémie de 2020. Ces plans d’aide
massifs, qui expliquent en partie l’envolée de la dette publique
dont on parle tant, ont contribué à maintenir sous perfusion
un certain nombre d’entreprises
aujourd’hui fragilisées par le remboursement de ces prêts.
Mais le problème est plus large, et renvoie à une perte de compétitivité
qui touche l’ensemble de l’industrie européenne. En témoignent les
difficultés de Volkswagen, la plus grande entreprise allemande, qui
menace de fermer trois usines outre-Rhin et diminuer de 10 % les salaires
pour faire face à la mévente de ses voitures et à la chute de ses
exportations. Et le malaise des autres constructeurs, dont Stellantis,
entraîne la fermeture de nombreuses petites usines sous-traitantes.
L’Europe est en train de découvrir l’étendue des dégâts et l’on comprend
pourquoi le rapport alarmiste de Mario Draghi, l’ex-gouverneur
de la Banque centrale européenne (BCE), fait tant parler à Bruxelles.
Christine Lagarde, qui a succédé à « super Mario » à la tête de la BCE,
relaie ces avertissements. Et la nouvelle Commission d’Ursula
von der Leyen se sait attendue sur ce front industriel plombé par trois
ans d’inflation et de hausse des coûts de l’énergie.
Obligée de compter sur elle-même pour sa future sécurité, l’Europe
doit aussi se doter d’un bouclier économique – à commencer par un
marché unifié des capitaux – si elle veut restaurer sa compétitivité,
garder et développer son industrie et éloigner le risque d’être marginalisée
par les États-Unis et la Chine.
Christophe Lucet édito Sud-Ouest