3268-L’exécutif veut épargner les petites retraites 1 post
Comment demander un effort aux retraités tout en préservant les plus modestes ? La mesure, très polémique, est aussi technique que politique. « Le plus logique est de moduler les versements en fonction de leur niveau de vie », assure une source gouvernementale. Soit geler pendant six mois la pension des plus aisés, tout en continuant d'indexer celle des plus modestes sur l'inflation, autour de 1,8 % selon l'Insee.
Sur le papier, cette différenciation a l'air simple. Mais, dans un pays ayant plus de 40 régimes de retraite qui ne communiquent pas toujours entre eux, elle tourne au casse-tête ! La ministre du Travail, Astrid Panosyan-Bouvet, a d'ailleurs évoqué un « sujet opérationnel ». Selon les experts, il faut au moins entre six et neuf mois de préparation pour y parvenir techniquement. « De fait, pour janvier prochain, comme prévu dans le projet de loi de finances, déjà, ce n'est pas réalisable », regrette un conseiller de l'exécutif.
Aussi le gouvernement planche-t-il, avec les différents organismes de retraite, sur une solution dont La Tribune Dimanche a eu connaissance : « Pendant le premier semestre 2025, on gèlera toutes les pensions pour tout le monde, et à partir de juin ou juillet on donnera un petit coup de pouce aux plus modestes, en guise de rattrapage des mois perdus. À partir de l'été 2025, on revalorisera leur pension de 2,6 ou 2,7 % (soit 1,8 % auquel on ajoutera les six mois perdus), quand pour les pensions des plus aisées on restera à 1,8 %. »
L'effet coup de pouce
Si cette option tient aujourd'hui la corde, c'est aussi parce qu'elle présente l'avantage d'afficher, après l'effort, un effet coup de pouce. Un geste qui, espère le gouvernement, sera d'autant mieux ressenti - et donc apprécié - que l'inflation aura encore ralenti l'été prochain, selon ses prévisions. « Les retraités recevront une revalorisation de leur pension alors que les prix dans les rayons, normalement, auront encore baissé », souligne l'exécutif. Enfin, le timing pourrait coïncider avec le calendrier électoral : alors que la perspective d'une nouvelle dissolution l'été prochain est dans tous les esprits, une hausse des retraites au moment d'un nouveau vote sera toujours bienvenue !
Reste cependant une autre difficulté : comment définir un retraité modeste ? Où mettre le curseur ? À 1 000 euros de pension par mois ? 1 200 ? 1 400 ? L'arbitrage promet de faire l'objet d'intenses tractations politiques. Sans compter que, pour compliquer encore un peu plus l'équation, les centristes suggèrent un système de revalorisation des pensions à trois étages, avec des paliers de ressources à 1 700 et 2 500 euros de pension...
Impensable pour le gouvernement : le seuil choisi déterminera le manque à gagner pour les finances publiques. Selon l'exécutif, 10 % des retraités touchent à peine 1 000 euros de pension par mois, quand près d'un tiers reçoivent autour de 1 200 euros. L'exécutif, qui espérait dégager près de 4 milliards d'euros pour l'État et la Sécurité sociale en gelant les pensions pendant six mois, verrait donc une partie du pactole s'envoler. Si de nombreux retraités modestes sont épargnés, il devra trouver cet argent ailleurs.