3259- Nouvelle REVUE de presse 21 posts
Qui veut parier que Barnier n’utilisera pas le 49.3 ?
Le gouvernement Barnier pourrait donner son feu vert aux
casinos en ligne et récupérer quelques dizaines de millions
d’euros à verser dans les soutes d’un État dont la coque prend
l’eau. Commençons donc par un petit jeu où il n’y a rien à
gagner. Qui est prêt à parier que le Premier ministre ne déclenchera
pas le énième 49.3 du second quinquennat Macron afin de faire adopter
sa loi de finances 2025 ? On ne voit pas beaucoup de doigts se lever.
Et pour cause. Élisabeth Borne n’a pu que recourir à cet article de loi
pour faire adopter ses budgets alors que sa majorité parlementaire,
bien que relative et fragile, affichait quand même plus de stabilité et
d’unité que l’actuelle alliance de la carpe républicaine et du lapin
macroniste.
Le discours officiel assure que le chef du gouvernement souhaite un
débat aussi serein que lui dans l’hémicycle, sachant que tout ce qui est
détricoté au Palais-Bourbon sera reprisé par le Sénat où
Michel Barnier compte plus de partisans. Faut-il s’y fier ?
Chaque jour qui passe révèle les fissures de ce qu’on appelle « le
socle commun ». Les députés du MoDem, mouvement qui participe
à la coalition Barnier, ont voté, avec l’opposition de
gauche et contre l’avis de l’exécutif, la pérennisation de la surtaxe sur
les hauts revenus, prévue pour ne durer que trois ans.
Ces mêmes centristes sont coupables, selon leurs partenaires, d’avoir
favorisé l’élection d’un écologiste, Jérémie Iordanoff, à la vice-présidence
de l’Assemblée nationale, jusqu’ici occupée par la LR Annie
Genevard et briguée par une autre élue LR, Virginie Duby-Muller. Le
socle commun vit bien.
S’il dégaine le 49.3, le Premier ministre prendra ses responsabilités et
lancera la patate brûlante à ses opposants de gauche et d’extrême
droite qui devront s’associer pour faire chuter le gouvernement via
une motion de censure. Le NFP est-il prêt à voter comme le parti lepéniste
alors que nombre de ses députés doivent leur siège au front
républicain, certes balafré et à géométrie variable ?
Marine Le Pen a-t-elle intérêt à donner le coup de grâce à un cabinet
qui a forcément besoin de sa neutralité active ? Est-elle disposée à
mêler les voix de son groupe à celles des ennemis Insoumis et à ternir
son obsession de la respectabilité politique ? On entendra souvent
parler de morale, main sur le coeur, dans les arguments échangés.
Puisqu’on parle finances, la morale ne coûte rien. C’est bien la seule.
Benoît Lasserre édito Sud-Ouest
******
François Mitterrand Président de la République à Figeac (souvenirs 1982)
Commentaires
La société d'archipel est-elle une fatalité ? Le politologue Jérôme Fourquet et le sociologue Jean Viard observent tous les deux un "triomphe de l'individu" mais leurs conclusions sont différentes.
- Jérôme Fourquet Politologue
- Jean Viard Sociologue, directeur de recherche associé au Cevipof-CNRS
"Nous sommes dans une société d'individus", s'accordent Jean Viard, sociologue, directeur de recherche associé au Cevipof-CNRS et Jérôme Fourquet, directeur du département opinion et stratégies d'entreprise à l’IFOP. En revanche, les deux observateurs ont une vision différente des changements en cours dans la société française.
"Nous sortons d'une civilisation", estime Jean Viard
"Le spectacle de la politique ne donne plus envie d'être démocrate", s'inquiète Jean Viard. "Il y a toujours des colères", explique le sociologue, "le problème, c'est qu'elles ne sont plus canalisées aujourd'hui ou alors par le populisme, c'est ça qui est dangereux". Selon lui, "nous sortons d'une civilisation, c'est une nouvelle civilisation d'individus qui n'ont plus les mêmes racines".
Il réfute le terme de "décivilisation", utilisé par Jérôme Fourquet, qui mène les individus "dans le mur de l'effondrement" et "au fascisme". L'archipélisation "existe dans toutes les démocraties occidentales sauf que nos voisins sont des pays fédérés, qui ont appris dès le plus jeune âge à raisonner en mode multiple". Pour nous rassembler, le sociologue propose un "grand récit autour de l'écologie".
"La zone commerciale" au cœur de la société, dit Jérôme Fourquet
"La messe dominicale a été remplacée par la virée chez IKEA", estime de son côté Jérôme Fourquet. "Quand on vit en province, le cœur battant de la société française contemporaine c'est la zone commerciale, souvent ouverte le dimanche". L'autonomisation de l'individu "a participé à la déconstruction des grands collectifs d'appartenance", explique-t-il.
Pour le politologue, "Nous devenons des Poke bowl", ces salades composées de différents "toppings" (garnitures), "nous sommes dans une construction de notre propre identité en piochant des des référentiels très divers. On peut s'interroger sur comment on fait société", questionne Jérôme Fourquet.