3208- Faire beaucoup avec peu 6 posts
Sans majorité et face à une dette « colossale », Michel Barnier admet devoir « faire avec peu »
Le Premier ministre s'est engagé, dans sa déclaration de politique générale, ce mardi devant les députés, à ramener le déficit à 5 % du PIB en 2025. Il a affiché un ton ferme sur la sécurité et l'immigration, dans une ambiance agitée. Prudent, il s'est dit ouvert à une « réflexion » sur la proportionnelle.
Publié le 1 oct. 2024 à 19:03Mis à jour le 1 oct. 2024 à 19:34
Michel Barnier se savait très attendu pour sa déclaration de politique générale (DPG) qu'il a prononcée ce mardi à l'Assemblée nationale. Même par la gauche du Nouveau Font populaire (NFP) qui le juge illégitime, par le Rassemblement national (RN) qui détient la clé de sa survie et par les groupes qui composent son gouvernement (EPR, Droite républicaine, Modem, Horizons…), laissés dans le flou de ses intentions… « Il avance sur des épines, pas sur des oeufs », résumait à sa façon avant la DPG le communiste André Chassaigne.
Devant les 577 élus lors des élections des 30 juin et 7 juillet - dont de nombreux anciens ministres des gouvernements d'Emmanuel Macron -, le nouveau locataire de Matignon a délivré une feuille de route axée sur la réduction des déficits et la mise en oeuvre de « cinq chantiers prioritaires » pour les Français : le niveau de vie, l'accès aux services publics (école, santé…), la sécurité, l'immigration et la fraternité.
Les députés LFI brandissent leur carte d'électeur (STUPIDE !)
Sans surprise, la séance a été agitée . Sans lui laisser le moindre répit, les députés LFI ont brandi leur carte d'électeur au tout début de son discours. Une manière de rappeler à Michel Barnier que, selon eux, Emmanuel Macron n'a pas respecté le verdict des urnes au soir des législatives en le nommant à Matignon. Une motion de censure du PS sera débattue la semaine prochaine.(Agitation qui n'a rien donné)
Les mêmes députés LFI n'ont eu de cesse, ensuite, de tenter de l'interrompre. Sans succès. En vieux routier de la politique, Michel Barnier a débité son propos d'un ton monocorde, sans prêter attention aux bruits venant de sa gauche.(Il a bien fait.Moi de gauche je le déplore)
Gaulliste, Michel Barnier n'a pas oublié de citer Charles de Gaulle dès les premières secondes. « Je vous demande de faire beaucoup avec peu, en partant de presque rien », a-t-il dit, citant une lettre du fondateur de la Ve République pendant la Seconde Guerre mondiale.
Déficit à 3 % en 2029
C'est sur le budget que le rappel au général de Gaulle s'illustre le mieux, tant la pente à remonter est raide. Michel Barnier s'est engagé à ramener le déficit à 5 % du PIB en 2025 l'année prochaine, alors que les dernières prévisions sont de -6,2 % pour cette année. L'effort s'annonce donc massif, de l'ordre de plus de 40 milliards d'euros.
Gardant bien des zones d'ombre sur les leviers qu'il allait actionner, Michel Barnier a répété vouloir mettre l'accent sur la réduction des dépenses et, côté hausse d'impôts, sur une contribution exceptionnelle des grandes entreprises et des ménages les plus fortunés. « La véritable épée de Damoclès, c'est notre dette financière colossale qui, si l'on n'y prend garde, placera notre pays au bord du précipice », a-t-il rappelé.
DECRYPTAGE - Le retour à 5 % de déficit en 2025 implique un effort de redressement majeur
Sur le niveau de vie, seule mesure concrète, Michel Barnier a annoncé une revalorisation du SMIC de 2 % dès le 1er novembre . Il a aussi indiqué vouloir élargir le prêt à taux zéro pour les primo-accédants à la propriété , restreint par sous la précédente mandature. S'agissant des dossiers retraite, assurance-chômage et emploi des seniors, il a redonné la main aux partenaires sociaux.
Tour de vis sécuritaire et maîtrise de l'immigration
Sur le plan régalien, son discours a été marqué par une promesse de tour de vis sécuritaire et de maîtrise de l'immigration. Michel Barnier n'a pas dit un mot sur le sujet inflammable de l'Aide médicale d'Etat que son ministre de l'Intérieur, Bruno Retailleau, veut réformer. Après les propos polémiques de ce dernier sur l'Etat de droit, Michel Barnier a également tenté de rassurer les macronistes. « La fermeté de la politique pénale, que les Français demandent, est indissociable du respect de l'Etat de droit et des principes d'indépendance et d'impartialité de la justice, auxquels je suis personnellement, profondément et définitivement attaché », a-t-il dit.
Michel Barnier n'a pas renié l'héritage de sept ans de macronisme. « Nous partons d'une France forte, qui a progressé sous l'impulsion du chef de l'Etat et de ses gouvernements », a-t-il dit. Mais sa déclaration de politique générale s'est transformée en une vaste revue des chantiers (finances publiques, école, santé, écologie, sécurité, immigration…).
Une « journée nationale de consultation citoyenne »
Sans majorité au Palais-Bourbon, Michel Barnier tente aussi de renouer avec les Français qui regardent sévèrement le spectacle politique qui leur est donné depuis trois mois. Il a annoncé la mise en place d'une « journée nationale de consultation citoyenne » pendant laquelle des débats seront organisés dans les collectivités.
Il a aussi promis une « nouvelle méthode », qui, sans trop aller dans le détail, devrait donner une plus grande place au Parlement. « Moins de textes et plus de place pour le débat », a-t-il promis, tout en évoquant l'idée d'un partage de l'ordre du jour entre le gouvernement et le Parlement.
Du bout des lèvres, il s'est déclaré « prêt à une réflexion sans idéologie sur la proportionnelle », réclamée par le RN, la gauche et le Modem, mais vu avec réticence par une partie des bancs des députés macronistes. Les Républicains et Horizons, le parti d'Edouard Philippe, s'y opposent. Marine Le Pen a fixé son exigence : un scrutin proportionnel à un tour, avec prime majoritaire.
Report des élections en Nouvelle-Calédonie
Sur la Nouvelle-Calédonie, où la situation reste tendue et sans solution, il a souhaité la naissance d'une « nouvelle période » et repoussé les élections provinciales à la fin de l'année prochaine. Le projet de loi constitutionnelle réformant le corps électoral, qui avait mis le feu aux poudres au printemps, sera abandonné.
Au niveau parlementaire, Michel Barnier a évoqué trois projets qui avaient été abandonnés avec la dissolution : la loi d'orientation agricole, celle sur la simplification et la dernière sur la fin de vie, « au début de l'année prochaine ».
« Lignes rouges »
Face à onze groupes parlementaires qui ont tous leurs « lignes rouges », Michel Barnier a aussi évoqué les siennes. « J'ai mes propres lignes rouges, qui sont celles de tout le gouvernement. Aucune tolérance à l'égard du racisme et de l'antisémitisme, des violences faites aux femmes, du communautarisme, aucun accommodement sur la défense de la laïcité », a-t-il dit, sous les applaudissements nourris des rangs macronistes, de la droite et de l'extrême droite. « Nous n'accepterons aucune discrimination, aucune remise en cause des libertés acquises au fil des ans », ajouté Michel Barnier, citant la constitutionnalisation de l'IVG, le mariage pour tous ou encore la PMA.
Extraits Les ECHOS
Grégoire Poussielgue