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DÉCRYPTAGE

Budget, impôts, gouvernement : ambiance à couteaux tirés entre Michel Barnier et le camp Macron

Sur fond de tensions sur la composition du futur gouvernement et notamment la place de LR, les lignes directrices du budget pour 2025 révèlent de nombreuses fractures.

Président du groupe réunissant les députés macronistes, Gabriel Attal a accentué sa pression sur son successeur à Matignon, Michel Barnier (photo d'archives le 5 septembre).
Président du groupe réunissant les députés macronistes, Gabriel Attal a accentué sa pression sur son successeur à Matignon, Michel Barnier (photo d'archives le 5 septembre). (Sarah Meyssonnier/POOL/AFP)

Par Grégoire POUSSIELGUE Les Echos

Publié le 18 sept. 2024 à 18:10Mis à jour le 18 sept. 2024 à 18:23

Michel Barnier peut avoir un motif de satisfaction. A la faveur de sa nomination comme Premier ministre il y a deux semaines , il est devenu la personnalité politique préférée des Français (57 % de bonnes opinions), selon un sondage Ifop-Fiducial pour « Paris Match » et Sud Radio paru mardi.

Pour le reste, les négociations avec l'ancienne majorité d'Emmanuel Macron en vue de la constitution du nouveau gouvernement ont connu un brusque accès de fièvre au cours des dernières heures, préfigurant des crises à venir à commencer par l'examen du budget pour 2025 . « Cela ne s'engage pas bien », note-t-on dans un ministère.

Des hausses d'impôts ?

Retour en arrière. Mardi matin, les députés du groupe Ensemble pour la République (EPR) se réunissent au Palais-Bourbon. De cette réunion ressortent d'une part que la ligne du futur gouvernement reste une inconnue, notamment en matière de fiscalité ou d'immigration, ce que les parlementaires du camp Macron avaient déjà regretté lors de leur rentrée la semaine dernière dans les Yvelines ; d'autre part que les tentatives de Michel Barnier de faire « monter » au gouvernement certains députés se font en catimini, sans discussion globale sur une participation.

Au cours de cette même réunion, Gérald Darmanin assure que Michel Barnier a évoqué des hausses d'impôts. « Pures spéculations. Le Premier ministre analyse la situation budgétaire et aucune option n'est aujourd'hui arrêtée », répond Matignon.

Rendez-vous avec Michel Barnier annulé

Gabriel Attal, libéré de Matignon, monte au créneau mardi dans la soirée dans un message à ses députés, dans lequel il pose clairement la question d'une participation de son groupe au gouvernement. Rendez-vous est pris à Matignon pour ce mercredi matin pour une nouvelle explication avec Michel Barnier. Gabriel Attal doit s'y rendre avec les vice-présidents de son groupe, ainsi qu'avec Gérald Darmanin et Elisabeth Borne.

Mais, entre-temps, le ministre sortant de l'Intérieur lâche une petite bombe sur France2. « Il est hors de question que nous puissions entrer dans un gouvernement, que nous puissions soutenir à l'Assemblée nationale […] un gouvernement qui augmente les impôts », lance-t-il, tout en faisant comprendre qu'il ne fera pas partie de la nouvelle équipe gouvernementale. « Darmanin a compris qu'il ne sera pas au gouvernement, donc il rappelle son pouvoir de nuisance », décrypte un macroniste.

 

Le rendez-vous des responsables d'EPR avec Michel Barnier est annulé dans la foulée, officiellement pour des raisons d'agenda. La ligne de Gérald Darmanin sur les hausses d'impôts ne fait toutefois pas l'unanimité au sein du groupe. « Il faut rétablir l'équilibre des finances publiques. Cela passe par moins de dépenses et ça peut passer par plus d'impôts », déclare dans le même temps sur RTL Yaël Braun-Pivet, la présidente de l'Assemblée nationale, tout en rappelant des « conditions » à une éventuelle hausse d'impôts.

« Situation budgétaire très grave »

Et le Premier ministre, qui n'a de cesse de renvoyer à sa déclaration de politique générale, attendue début octobre, pour dévoiler sa ligne, adresse lui aussi une mise au point ce mercredi dans la matinée. Il évoque « une situation budgétaire » « très grave ». « Cette situation mérite mieux que des petites phrases. Elle exige de la responsabilité », lance-t-il à destination des macronistes. « Mon objectif est de retrouver le chemin de la croissance et de faire progresser le niveau de vie des Français, alors que nous sommes déjà le pays où la charge des impôts est la plus forte », ajoute-t-il.

 

Selon un sondage Elabe pour BFMTV, les Français se prononcent majoritairement pour le rétablissement de l'ISF (67 %), pour les hausses d'impôts pour les plus aisés (54 %) et pour les entreprises « ayant fait le plus de profits » (66 %).

En toile de fond, les macronistes ne cachent pas leurs craintes de voir un gouvernement trop marqué LR et de se voir reléguer au second plan. Entre les rivaux d'hier, LR et majorité sortante, contraints de s'entendre pour former un nouveau gouvernement, rien n'est fluide. Entre-temps, un autre rendez-vous entre Michel Barnier et les représentants des LR a été programmé puis lui aussi annulé. Le Premier ministre est allé rencontrer Emmanuel Macron ce mercredi, confirme l'Elysée, comme l'a annoncé « Le Figaro ». « A l'Elysée, ils commencent à s'impatienter », constate un parlementaire.

Question explosive du budget

Un rendez-vous entre Gabriel Attal et son successeur à Matignon doit être reprogrammé « assez rapidement », assure l'entourage du premier. Mais aucune date n'était encore calée ce mercredi en fin de journée. Entre Matignon et le principal groupe parlementaire qui doit le soutenir, l'ambiance est aujourd'hui à couteaux tirés. « Participer à un gouvernement sans connaître la politique de ce gouvernement, ce n'est pas acceptable. On doit avoir une discussion sur le fond avec Michel Barnier », assure une députée EPR.

Au-delà de la question de la composition du gouvernement, toujours attendue d'ici la fin de la semaine (même si ce calendrier semble tendu au vu des tensions actuelles), celle du budget pour 2025 s'affirme, comme prévu, explosive. En évoquant une « situation budgétaire très grave », Michel Barnier a mis l'ancienne majorité devant ses responsabilités.

 

« Michel Barnier ne découvre rien aujourd'hui, il a tous les éléments à disposition depuis le début », s'étrangle un membre de l'équipe Attal. Personne n'oublie non plus que le directeur de cabinet du Premier ministre à Matignon, Jérôme Fournel , était celui de Bruno Le Maire à Bercy.

De plus, le soutien apporté par LR au Premier ministre, qui a déclaré, sans plus de précisions, vouloir « plus de justice fiscale » lors de sa première interview sur TF1 au lendemain de sa nomination, passe mal au sein de la majorité. « Comment les députés LR peuvent-ils faire semblant de découvrir la situation des finances publiques », s'agace un député Renaissance, qui rappelle le manque de soutien des députés de droite à la réforme des retraites ou à la baisse des dépenses depuis deux ans.

Caroit

Grégoire Poussielgue (avec Sébastien Dumoulin et Isabelle Ficek)




18/09/2024
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