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Dimanche 15 septembre 2024 |
Semaine décisive pour Michel Barnier dans sa quête difficile d'un gouvernement « équilibré »
Après avoir fait la tournée des journées parlementaires des groupes susceptibles de le soutenir, le Premier ministre a entamé ce week-end des entretiens bilatéraux pour bâtir son gouvernement. La place de LR notamment fait partie des questions qui agitent le « socle » qu'il tente de mettre en place.
Par Isabelle FICEK Les Echos
La mission de Michel Barnier à Matignon ? Elle s'apparente à l'ascension des Grandes Jorasses par la face nord. Et la construction de son gouvernement en est une étape tout autant délicate que cruciale. Si le Savoyard, en faisant ces derniers jours la tournée des journées parlementaires des groupes politiques susceptibles de le soutenir, a assumé d'avancer « pas à pas » et de « prendre le temps », il a aussi lâché que la France aurait un gouvernement « la semaine prochaine », c'est-à-dire dans cette semaine qui s'ouvre, même si peu imaginent voir les choses aboutir très rapidement.
Tout en donnant quelques signaux au long de ses pérégrinations auprès du groupe Ensemble pour la République puis Horizons et Modem et enfin chez les LR, Michel Barnier multiplie dans la coulisse les consultations, des poids lourds de sa famille et au-delà en passant par Jean-Louis Borloo. Il a ce week-end entamé des entretiens bilatéraux téléphoniques autour de l'architecture du gouvernement et des personnalités de cette équipe qu'il souhaite « la plus collective possible » indique son entourage, avec des « périmètres efficaces, sans doublon. » Michel Barnier a également reçu samedi Gérald Darmanin et ce dimanche Sébastien Lecornu, mais pour les remercier pour les JO. Des messages d'hommage, sans surinterprétation.
« Canaux ouverts »
Le Premier ministre a aussi pris soin d'assurer que son gouvernement serait « équilibré, représentatif, pluriel ». Dès sa première intervention sur TF1, il avait indiqué vouloir rassembler, y compris à gauche . En dépit de nombreux refus, de la présidente socialiste de la région Occitanie Carole Delga en passant par le maire de Saint-Ouen Karim Bouamrane ou encore celui du Mans Stéphane Le Foll, « des canaux sont ouverts » avec la gauche, promet son équipe. D'anciens ministres d'Emmanuel Macron et pas des moindres - Elisabeth Borne et Jean Castex - ont aussi décliné.
Alors que nombre de sortants laissaient entendre qu'ils resteraient bien au gouvernement, le Premier ministre a aussi précisé qu'il ne s'agissait pas là d'un « remaniement » mais d'un « nouveau gouvernement ». « Ce nouveau gouvernement doit aussi s'illustrer avec de nouveaux visages, de nouvelles personnalités et talents », appuie un proche pour lequel Michel Barnier a « les coudées franches ». Côté Elysée, on confirme que le chef de l'Etat « laisse la main à Michel Barnier ». « Je suis assez sûr qu'il n'a pas mis de liste à lui, il veut vraiment que ce soit la mise de Barnier », ajoute un proche d'Emmanuel Macron. Ce qui a pu décontenancer des sortants. Tout juste l'entourage du chef de l'Etat rappelle qu'il a souhaité un gouvernement « d'union républicaine qui rassemble le plus largement possible », ce qui « implique évidemment une juste représentation du bloc central ».
Imposer sa vision ou garder l'esprit olympique
Aussi, après les déclarations de Laurent Wauquiez insistant sur une « politique de droite » auprès de Michel Barnier et face à ce retournement incroyable pour LR de voir arriver à Matignon l'un des siens, des voix se sont fait entendre dans le camp présidentiel, disant tout haut ce que beaucoup pensent tout bas. « Il faut un équilibre gouvernemental qui tienne compte de la réalité de l'Assemblée. Or LR, avec ses 47 députés, est en train de se comporter de la même manière que le NFP qui, cet été, estimait qu'il pouvait imposer sa politique même s'il ne disposait que de 193 voix », a prévenu le Modem Marc Fesneau dans « La Tribune Dimanche ». « Les Français nous ont demandé de travailler ensemble, pas qu'une famille politique impose sa vision aux autres », abonde un conseiller. Bref, de quoi souligner que l'esprit de compromis n'est pas ce qui est le plus ressorti des déclarations publiques de certains LR ces derniers jours.
« Personne n'envisage sérieusement un gouvernement uniquement LR, personne à droite ne le demande d'ailleurs. Ce qui est demandé, c'est un vrai changement par rapport à l'ère précédente et une juste représentation de la droite par rapport à son poids au Parlement », réplique un haut cadre LR, rappelant ainsi son poids au Sénat. Devant sa famille politique, Michel Barnier avait insisté sur la « responsabilité » et le fait qu'il faudrait « travailler avec tout le monde.» Ce dimanche, après la parade olympique, le Premier ministre a voulu, écrit-il sur X, garder une leçon des JO, selon laquelle «quand les responsables politiques et le pays s'unissent, à tous les niveaux de l'action publique et par-delà les clivages politiques, rien n'est impossible.» Il a appelé à garder l'esprit olympique, «en mettant de côté les sensibilités politiques et en pensant seulement au bien commun». Ardu.
Isabelle Ficek