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Le chef étoilé Julien Poisot quitte le château de Mercuès pour son propre resto, à Cahors
Après dix ans au château de Mercuès, Julien Poisot ouvre une nouvelle page à Cahors où il vient de racheter le bien connu Au fil des douceurs. Une nouvelle aventure sans étoile.
Il renonce à l’étoile. Et met les voiles. Julien Poisot, le chef cuistot du château de Mercuès vient de sortir par la grande porte après dix ans passés aux fourneaux de cette institution. Le cordon-bleu ouvre une nouvelle porte-fenêtre : celle de l’ancien restaurant Au fil des douceurs, face au pont Valentré. Un projet qu’il réfléchissait bien avant de traverser le pont. " J’ai toujours voulu avoir mon propre établissement mais je n’avais jamais vraiment eu l’occasion de sauter le pas ", confie ce grand costaud, barbe rousse aux airs de Viking. Avant le Lot, le cuisinier a passé six ans dans la prestigieuse maison Loiseau. Trois ans dans le chic et parisien Tante Louise en tant que chef, trois ans au relais Bernard Loiseau, un trois-étoiles, en Côte-d’Or, comme sous-chef. Après cette expérience, déjà, se pose la question d’ouvrir sa table à lui. Le chef fait le choix du cœur. " À ce moment-là, j’avais bien affiné ma cuisine dans la pertinence des goûts. Je voulais surtout savoir si j’étais capable de décrocher une étoile. J’ai cherché un établissement qui pouvait y prétendre ", raconte-t-il. Sur la carte de France, il pointe Mercuès du doigt.
Le château cherche un cuistot, Julien Poisot espère une étoile. Mais attention : pas question de bénéficier de celle qui fait déjà rayonner l’établissement grâce à l’ancien chef. Il demande au Michelin de la rayer du guide : il compte bien se la gagner tout seul. Dont acte, en 2017, trois ans après son arrivée. " C’est une époque où j’ai été très sollicité, par de belles maisons et des resorts. J’ai tout refusé. Je ne voulais pas me laisser amadouer par les sirènes qui chantent et j’avais plein de projets pour Mercuès, j’avais envie d’être l’artisan de l’évolution du château ", se souvient-il. Et puis, la routine. " Je ne suis pas du genre à rester trop longtemps au même endroit, j’étais en quête d’une nouvelle dynamique, d’un challenge ", avoue-t-il. Julien Poisot a fait le tour : il veut tourner la page. À 41 ans, avec Justine Basin, sa seconde de cuisine et compagne, il rachète Au fil des douceurs. La voilà, son occasion de sauter le pas.
Il ne vise plus l’étoile
" On passe d’un monument historique à un autre, du cèdre de Mercuès à celui sur notre nouvelle terrasse cadurcienne", observe-t-il amusé. Les travaux ont commencé cet été. Les vitres opaques ont disparu, le rouge vif a été recouvert d’un vert sauge sur les murs, le bar déplacé. " Ici, on ne vise pas l’étoile. On veut se libérer de tout un tas de choses. On ne veut plus faire une cuisine pour avoir l’étoile ou une note au Gault & Millau. On veut faire une cuisine qui fait plaisir ", souligne le chef. Un tas de choses à se délester comme le recrutement. " On passe d’une brigade de 12 personnes à deux, c’est-à-dire, moins de difficultés pour trouver du personnel ", fait remarquer Justine Basin qui est aussi associée. Chez Suzanne, le nom de la grand-mère de Julien Poisot qui tenait une boulangerie familiale en Côte-d’Or, le nombre de couverts ne dépassera pas quarante. Les dimensions ont changé. Le cahier des charges aussi.
" On garde nos standards et notre exigence, dans la justesse l’assaisonnement et du dressage par exemple. L’excellence est restée dans notre ADN. On va proposer une cuisine différente, celle du cœur", résume le désormais gérant. Une cuisine végétarienne ? Ils rigolent. " Non, on aime trop la viande pour ça ", répondent-ils à l’unisson. À la carte : des produits de saison et du terroir sans que l’on n’en sache plus pour le moment. Le restaurant ouvre à la fin de septembre pour un service midi et soir, du mardi au samedi. Maintenant, sous l’ombre d’un autre cèdre, et sous les yeux de mamie Suzanne, il n’y a plus qu’à.
Les Larguille ont pris leur retraite
Ils sont nombreux les Cadurciens à s’interroger depuis cet été. C’est que la façade du restaurant a déjà bien changé. L’enseigne bien sûr, Chez Suzanne et non plus Au fil des douceurs. La déco aussi. " On est très heureux que la transition se passe avec un grand professionnel, on a le coeur plus léger ", note Philippe Larguille qui a tenu les marmites de cette table pendant dix ans avec sa compagne, en salle, Muriel Larguille. Plus exactement, le Lotois a ouvert en 2013, après avoir passé 23 ans à cuisiner sur son bateau, à Cabessut. Avant ça, il tenait la pâtisserie Aux délices du Valentré. Les plus anciens se souviennent bien. " En fait, c’est simple, j’ai commencé à pâtisser en 1990 et depuis, je n’ai pas cessé de cuisiner ", traduit-il. Depuis qu’il est à la retraite, il a un peu coupé les ponts avec la cuisine. " Je me suis promis d’arrêter pendant six mois. Après, je recommencerai, pour moi, ma famille et les proches ", imagine-t-il déjà. En juillet, les fidèles clients sont venus lui dire au revoir avec des mots chaleureux et des tapes dans le dos. " On est parti avec beaucoup d’émotions mais on a le sentiment de laisser l’établissement entre de bonnes mains ", répète-t-il.