Nouveau Front populaire : les vérités déguisées de Laurence Tubiana

Chef-d’œuvre de l’understatement, le communiqué de rupture de la diplomate en fait une ambassadrice hors pair de cet art tout britannique de déguiser la vérité pour mieux en minimiser la réalité

Publié le 22 juillet 2024 à 18:40 Rémi Godeau L'Opinion

Laurence Tubiana abandonne. Après Huguette Bello, elle renonce à porter la candidature du Nouveau Front populaire à Matignon. Dans ce nouvel épisode de la tragicomédie des gauches inconciliables, la diplomate du climat n’aura pas tout perdu. Chef-d’œuvre de l’understatement, son communiqué de rupture en fait une ambassadrice hors pair de cet art tout britannique de déguiser la vérité pour mieux en minimiser la réalité. Ainsi euphémise-t-elle que « son nom a rencontré des oppositions au sein du NFP » plutôt que de cibler le barrage de La France insoumise et son procès aussi expéditif que partial en macron-compatibilité.

Le procureur Mélenchon n’a pas tort, « Tubiana est la mieux placée pour comprendre qu’on est contre sa candidature ». Elle l’a compris. Et y répond par messages sous-jacents. Plutôt que de canonner la stratégie sans issue du chaos, elle regrette mezzo voce cette incapacité à viser « l’apaisement dont nous avons tant besoin ». Plutôt que d’acter que LFI ne veut pas gouverner, elle revendique encore « un espoir qui oblige », deux semaines d’invectives après le scrutin. Son échec révèle la gravité du blocage : deux cultures du pouvoir, antinomiques, s’affrontent. Mais elle minore : « La gauche a le devoir d’exercer [ses] responsabilités ».

Elle a beau réclamer de « faire de la politique autrement », Laurence Tubiana joue trop de l’implicite et de la retenue pour démontrer qu’elle aurait été capable de mener avec autorité un attelage disparate que seul l’appât des sièges a soudé. Qu’elle aurait su « par le dialogue et la coopération » arracher ce compromis voulu par des électeurs qui n’ont donné la victoire à personne. Sans doute parce que LFI promet l’infamie au briseur d’unité, elle affiche donc une détermination de façade. « Il faut avancer », exhorte-t-elle quand son renoncement démontre au contraire que, pour les gauches, l’accès au pouvoir recule.