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Non, l’élection au perchoir n’est pas volée
Vétéran respectable et respecté de l’hémicycle, André Chassaigne
affichait la légitimité requise pour présider l’Assemblée
nationale. Mais il aurait fallu qu’il obtînt plus de voix que
son adversaire Yaël Braun-Pivet et, en démocratie, il est permis
d’aller chercher des voix en dehors de son camp. La division est un
poison, l’addition un remède. Entendre le député du Puy-de-Dôme
utiliser les mots rageurs des élus Insoumis ou lepénistes qui n’ont que
la vitupération aux lèvres, et dénoncer une victoire volée, façon Donald
Trump, ça fait mal aux oreilles.
D’où vient cet étrange théorème selon lequel un mandat vous appartient
et pourrait donc vous être dérobé ? Oui, bien sûr, la réélection de
Yaël Braun-Pivet est le fruit de tractations entre le bloc macroniste et les
Républicains de Laurent Wauquiez. Est-ce proscrit par le code électoral?
Quel chef de parti, quel élu peut affirmer, sans que son nez
s’allonge, qu’il n’a jamais goûté de ce pain-là ? Entre Éric Ciotti
et Jordan Bardella, aucune négociation en coulisses ? Entre
les quatre fédérés du Nouveau Front Populaire, aucun arrangement
à l’abri des regards ? Soyons sérieux ! Au lieu de hurler au hold-up
et de menacer la victoire de Yaël Braun-Pivet d’un
recours comme le promet Sandrine Rousseau, le NFP ferait mieux de
surmonter son amertume et de se demander pourquoi il n’est pas capable
de convaincre au-delà de son pré carré, pourquoi il s’unit sur le
perchoir mais n’est pas fichu de s’accorder sur le nom d’un Premier
ministre, dévaluant chaque jour sa crédibilité pour piloter la France.
Au moins, ne peut-il pas accuser Emmanuel Macron d’être responsable
de sa mésentente. Quoique… Si les dirigeants de gauche découvrent
que le macronisme, bien avant la dissolution, ne se bouche pas le nez à
l’idée de gouverner avec les Républicains, donc de leur réserver des
bonnes places au Palais-Bourbon, il est temps d’envisager des séances
de rattrapage à Sciences Po où on leur fera, de surcroît, une haie d’honneur.
Le court succès en trompe-l’oeil de Yaël Braun-Pivet rappelle surtout
que le pays traîne un souci né de la décision aventureuse du 9 juin et du
barrage républicain du 7 juillet. Aucune majorité stable ne peut émerger
sans alliance, à l’écart des extrêmes. Élu de la circonscription de
Thiers, André Chassaigne devrait le savoir mieux que personne. L’intérêt
général et le devoir ordonnent de plier les couteaux.
Benoît Lasserre édito Sud-Ouest