Charles de Courson, député centriste réélu pour un huitième mandat, s'est porté candidat ce lundi au Perchoir. Yaël Braun-Pivet, la présidente sortante, espère dégager une majorité sur son nom avec le soutien des LR. La gauche semble encore loin de se mettre d'accord sur un candidat unique.
Par Grégoire POUSSIELGUE LES ECHOS
Il est élu sans interruption au Palais-Bourbon depuis 1993 et entamera ce jeudi son huitième mandat ! Plus ancien élu de l'Assemblée, le député centriste Charles de Courson , 72 ans, s'est déclaré ce lundi candidat au Perchoir. « Dans cette période inédite et chaotique, il est fondamental que le président de l'Assemblée nationale soit le garant de son bon fonctionnement, de la dignité et de la profondeur des débats et qu'il ne soit pas au service de coalitions partisanes, parfois contradictoires et animées par le seul objectif de se distribuer les postes entre eux », a-t-il déclaré dans un communiqué.
Entre 2022 et 2024, Charles de Courson siégeait parmi le petit groupe LIOT et au sein de la commission des Finances. Il s'est fait connaître du grand public en ferraillant contre la réforme des retraites au printemps 2023, allant jusqu'à porter une motion de censure contre le gouvernement d'Elisabeth Borne, qui a échoué à 9 voix près .
Règles spécifiques pour l'élection au Perchoir
Dans une Assemblée séparée en trois blocs - le Nouveau Front populaire (NFP), le camp Macron et le RN - mais où les voix des groupes plus petits (Les Républicains et LIOT) deviennent stratégiques pour dégager des majorités, le député de la Marne fait miroiter une présidence transpartisane.
Le résultat de la course au Perchoir donnera un résultat intéressant en tout cas : soit le NFP, première force sur le papier l'emporte, ce qui lui donnera des arguments pour obtenir Matignon ; soit le camp d'Emmanuel Macron gagne, ce qui lui permettra de prouver qu'il est capable de dégager des majorités pour gouverner.
L'élection du président de l'Assemblée nationale obéit à des règles spécifiques : il faut une majorité absolue au premier ou au second tour, et une majorité relative au troisième, c'est-à-dire arriver premier. Les candidats peuvent se maintenir pour les trois tours car il n'y a pas d'élimination. Un député qui n'est pas candidat au premier tour peut l'être au deuxième ou au troisième, ce qui fait de cette élection un immense réservoir à surprises et coups de théâtre. Le premier tour aura lieu ce jeudi à 15 heures.
Yaël Braun-Pivet veut continuer
Charles de Courson est loin d'être le seul à viser le Perchoir. Au sein du camp Macron, la présidente sortante, Yaël Braun-Pivet, entend bien retenter sa chance. « Je suis une femme de compromis. Cela fait deux ans qu'en présidant cette Assemblée j'ai créé du compromis. Cette Assemblée n'avait pas de majorité absolue non plus, et pourtant depuis deux ans nous avons réussi à avancer ensemble », a-t-elle encore répété la semaine dernière sur France 2. Selon nos informations, elle devrait être désignée mercredi matin par le groupe Renaissance.
Naïma Moutchou, députée Horizons et ancienne vice-présidente de l'Assemblée nationale, s'est également mise sur les rangs, sans que sa candidature ne soit confirmée à ce jour, tout comme plusieurs députés Modem comme les anciens ministres Philippe Vigier ou Geneviève Darrieussecq.
La candidature de la présidente sortante est combattue par la gauche, qui accuse Yaël Braun-Pivet de pactiser avec le Rassemblement national (RN) en vue de sa réélection pour faire barrage au Nouveau Front Populaire. « Yaël Braun-Pivet magouille en coulisses avec le RN, avec Sébastien Chenu [député RN et ancien vice-président de l'Assemblée, NDLR] pour se distribuer les postes », a attaqué ce lundi matin la députée européenne La France insoumise (LFI) Manon Aubry sur CNews.
« C'est faux, rétorque l'entourage de Yaël Braun-Pivet. Elle n'a aucun contact avec le RN et n'aura pas mathématiquement besoin des voix des députés RN pour être réélue ».
Pas de postes à responsabilités ni pour le RN ni pour LFI
Sur le papier, Yaël Braun-Pivet mise sur les voix des Républicains (LR) et de certains députés LIOT pour faire barrage au candidat du NFP au troisième tour. Lundi matin, Gabriel Attal, nouveau président du groupe Renaissance (rebaptisé pour l'occasion Ensemble pour la République) a été chargé de mener les négociations avec LR et les autres partis. La députée LR du Doubs Annie Genevard sera candidate au moins au premier tour.
Derrière la présidence de l'Assemblée nationale, se jouent également tous les autres postes de la nouvelle législature. Au cours de cette première réunion de groupe des députés Ensemble pour la République, il a été acté, à une très large majorité, que ni LFI, ni le RN ne devaient accéder à des postes à responsabilités à l'Assemblée nationale. Cela concerne la présidence, mais aussi les présidences de commission ou la questure.
Le NFP se déchire
Côté NFP, il y a presque autant de candidats au Perchoir que pour Matignon . LFI demande une candidature unique et a annoncé ce lundi après-midi bloquer les discussions avec le PS en vue du choix d'un Premier ministre tant que cette demande ne sera pas acceptée. Boris Vallaud pour le PS ou encore Cyrielle Chatelain pour Les Ecologistes ont marqué leur intérêt pour le poste.
Le député communiste André Chassaigne est également sur les rangs. Mon nom « est porté par des députés de sensibilités diverses qui craignent le désordre et l'instrumentalisation de la fonction, souligne l'élu du Puy-de-Dôme. Les arguments avancés sont ma connaissance de l'institution, l'expérience liée à mon ancienneté, mais aussi ma réputation de président de groupe respectueux de la fonction parlementaire et ouvert au dialogue. Il ne s'agit pas d'une initiative personnelle. Si le choix d'une candidature unique pour les quatre groupes de gauche a été actée, pour le moment aucun nom n'a été avancé », a-t-il déclaré à « L'Humanité ».
Grégoire Poussielgue