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Le parti lepéniste retrouve son accent russe
Quel cachottier, ce Jordan Bardella ! Il a attendu que le rideau
tombe sur les élections législatives pour annoncer qu’il présidera
un nouveau groupe au Parlement européen, bâti sur les
décombres d’Identité et démocratie. Ce n’est pas par modestie
que celui qui se voyait à Matignon a masqué cette information.
Disons qu’elle fissurait les belles déclarations d’indépendance affichées
pendant la campagne électorale à l’égard du Kremlin.
Le RN s’était, certes, engagé à poursuivre le soutien logistique et budgétaire
à Kiev s’il était appelé à diriger le pays. Jordan Bardella avait
même qualifié la Russie de « menace multidimensionnelle pour la
France et l’Europe ». Reste que l’Ukraine a fait part de son soulagement
après l’échec du parti lepéniste. Preuve que sa confiance en Jordan
Bardella a ses limites.
À juste titre puisque le Rassemblement national a choisi d’accompagner
le Premier ministre hongrois Viktor Orbán et de
rejoindre « Les Patriotes pour l’Europe » dont il est l’authentique
architecte. Le fauteuil de numéro 1 n’échoit à l’élu français
que parce qu’il fournit le contingent le plus important, soit
30 membres sur un total de 84, représentant 12 pays. Le patron,
c’est le Hongrois ! Et lui, il est Premier ministre ! Il préside même pour
un semestre le Conseil de l’Union européenne et s’est empressé d’aller
à Moscou et Pékin faire sa révérence aux dictateurs Poutine et Xi, alliés
de circonstance contre l’Ukraine, et compères de tyrannies avec la
Corée du Nord et l’Iran.
Comme Poutine, Orban est toujours prêt à aider financièrement ses
amis. En 2022, c’est Budapest qui a octroyé un prêt de 10,6 millions
d’euros à Marine Le Pen pour sa campagne élyséenne. Un prêt qui
refait surface dans l’enquête pour des soupçons de financement illégal
confiée à un juge d’instruction. Et la double finaliste de 2017 et 2022 est
attendue le 30 septembre au tribunal de Paris où elle sera jugée pour
détournement de fonds européens entre 2004 et 2016. L’extrême droite
déteste l’Europe mais fait moins la fine bouche quand celle-ci rémunère
des assistants parlementaires soupçonnés de travailler en fait
pour le parti. En s’associant avec Viktor Orbán et d’autres partis assujettis
au Kremlin, dont la Lega italienne ou le FPÖ autrichien, le RN rappelle
sa véritable orientation diplomatique. Il aurait tort de se gêner.
Pour la plupart de ses électeurs, le danger vient du sud, pas de Moscou.
Benoît Lasserre, éditorial Sud-Ouest